S’il ne s’agit pas de l’article le plus médiatique de la loi de modernisation du système de santé, l’article 37 sur le « contrat unique » provoque néanmoins de vives réactions parmi les médecins acteurs de la recherche clinique. Cet article a en effet pour but d’encadrer et de simplifier la mise en place d’essais cliniques en imposant notamment la gratuité des produits mis à disposition par les firmes pharmaceutiques, mais aussi en inscrivant dans la loi le concept de contrat unique entre les promoteurs des essais cliniques et les représentants légaux des établissements de santé.
Jusqu’à présent, les laboratoires pharmaceutiques signaient une convention avec l’hôpital en ce qui concerne les éventuels surcoûts hospitaliers liés à un essai clinique : les examens médicaux et les consultations, et une autre convention avec les médecins investigateurs (des ARO, des CIC et des associations) chargés de recruter les patients, d’acheter du matériel, de fournir le personnel et de s’occuper de l’aspect légal. Dans une instruction du 17 juin 2014, le ministère des Affaires sociales et de la Santé affirme vouloir « simplifier et accélérer la mise en place des recherches biomédicales à promotion industrielle dans les établissements de santé en mettant en place un contrat unique intégrant les honoraires des investigateurs ». L’idée est que les honoraires des personnels employés dans la mise en place de ces essais soient encaissés directement par les établissements de santé.
La peur du détournement
Pour le Pr Gilles Montalescot, chef du département de cardiologie médicale de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), qui mène une fronde contre l’article 37 via une pétition en ligne, les investigateurs risquent de ne pas voir la couleur de l’argent versé aux hôpitaux. « Les sommes versées par les laboratoires servent à combler les déficits des hôpitaux qui refusent de reverser l’argent aux associations, même partiellement. On nous vend ça comme une modernité mais on est en train de créer une couche administrative », enrage-t-il.
Plusieurs amendements ont été déposés, visant à proposer une suppression ou une modification de l’article 37. Le député Bernard Accoyer (UMP, 1re circonscription de Haute-Savoie) a ainsi suggéré que l’on réintègre le médecin chercheur dans le contrat unique qui serait ainsi signé à la fois par le promoteur, le représentant légal de chaque établissement de santé et les investigateurs. « Un contrat tripartite serait en effet une bonne solution », reconnaît Gilles Montalescot.
Les amendements ont été retirés suite aux garanties assurées par la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine en ce qui concerne la souplesse : « Chaque établissement va mettre en place des dispositifs pour assurer la fluidité et assurer aux investigateurs le versement des sommes issues de l’industrie. »
Le CHU de Bordeaux cité en exemple
Parmi les établissements ayant déjà mis en place ce genre de dispositif, Marisol Touraine a évoqué le cas du CHU de Bordeaux qui a mis en place, à la fin de l’année 2014, le groupement d’intérêt économique (GIE) Bordeaux recherche clinique Accelence. Moyennant un prélèvement de 12 % des sommes versées par les industriels, le GIE rémunère directement les attachés de recherche cliniques et les techniciens d’études cliniques qui étaient auparavant engagés par les associations des investigateurs. Selon Philippe Vigouroux, directeur du CHU de Bordeaux, « Accelence permet de garantir la transparence qui est exigée par la loi, mais propose aussi de la réactivité aux médecins investigateurs en mettant à leur disposition une carte de paiement à débit différé de 60 jours grâce à laquelle ils peuvent payer leurs déplacements en congrès mais aussi des dépenses comme l’achat d’un ordinateur ».
Accelence a également permis d’intégrer l’ensemble des centres hospitaliers d’Aquitaine comme ceux de Bayonne, de Libourne ou de Mont-de-Marsan. Pour preuve de l’efficacité d’Accellence, Philippe Vigouroux avance le cas de la convention de partenariat signée cette semaine avec Bristol-Myers Squibb.
« Nous avons signé ce contrat en 7 jours, ce qui est assez exceptionnel, explique le coordonnateur gestionnaire du CHU Joaquim Martinez, en moyenne, on gagne 20 jours de négociation, par rapport à l’époque où il fallait signer un contrat avec le CHU, un autre avec l’investigateur, un troisième avec l’anatomopathologie… » Dans son rapport de 2014, le Leem estimait à 110 jours le délai moyen pour conclure un partenariat de recherche en France.
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