LA GÉNÉRALISATION de la vaccination contre le méningocoque C a été adoptée depuis plusieurs années par de nombreux pays, pourquoi avons-nous attendu 2010 pour, à notre tour, faire le choix de vacciner les jeunes contre cette bactérie particulièrement redoutable ? C’est la question posée au Dr Burtchler par les médecins réunis à l’occasion d’un « Rendez-vous du Quotidien » organisé à Strasbourg sur le thème « vaccination antiméningococcique C : des recommandations à la pratique ». En 2002, rappelle le Dr Burtscher, le Comité technique des vaccinations (CTV) avait considéré qu’il n’y avait pas lieu de recommander la vaccination généralisée en raison du taux considéré comme faible des infections invasives à méningocoque du sérogroupe C (IIM C) en France, de la variabilité des taux d’incidence des IIM C d’une région à l’autre ou d’un département à l’autre et de l’incertitude sur un éventuel déplacement des sérogroupes sous l’effet de la vaccination. La vaccination contre le méningocoque C n’était donc recommandée que pour les groupes à risque : enfants souffrant de déficit en fraction terminale du complément, en properdine ou ayant une asplénie anatomique ou fonctionnelle, sujets contacts d’un cas d’IIM C et sujets vivant dans les zones délimitées où l’incidence du méningocoque du sérogroupe est particulièrement élevée.
Cette stratégie a été modifiée pour plusieurs raisons, explique le Dr Burtscher :
- la France a désormais l’un des taux d’incidence d’infections invasives à méningocoque C les plus élevés d’Europe ;
- de nombreuses alertes sont survenues au cours des dernières années justifiant des campagnes de vaccination localisées, qui ont conduit à vacciner plus de 500 000 personnes ;
- de nouveaux clones virulents ont émergé ;
- une association spatio-temporelle entre grippe et IIM a été mise en évidence ;
- l’efficacité clinique de la vaccination par les vaccins anti méningococcique C conjugués a été démontrée sur le terrain à travers les programmes de vaccination généralisée en Europe et au Québec ;
- il n’y a pas eu de switch capsulaire, autrement dit il n’y a pas eu de commutation du sérogroupe C vers d’autres sérogroupes, notamment B.
Induire une immunité collective.
L’efficacité de la vaccination a été clairement démontrée, non seulement dans les groupes vaccinés, mais aussi dans la population générale. Au Royaume-Uni par exemple, la vaccination a été mise en œuvre dès 1999, d’abord chez les nourrissons avec un rattrapage jusqu’à 18 ans, puis, à partir de 2001, le rattrapage a été étendu aux 19-25 ans. La couverture vaccinale a rapidement atteint plus de 90 % chez les nourrissons et 85 % environ pour le rattrapage. Le nombre de cas d’IIM C a baissé de 90 % dans la population générale, témoignant de l’acquisition d’une immunité collective, souligne le Dr Burtscher. Et les jeunes nourrissons de moins de 3 mois en ont largement profité : il n’y a pratiquement plus d’IIM C dans cette tranche d’âge au Royaume-Uni. Des résultats comparables ont été enregistrés dans d’autres pays, comme l’Espagne et les Pays-Bas. Cette baisse spectaculaire est d’autant plus intéressante que l’on connaît la gravité des IIM C, qui sont plus graves que les IIM B, souligne le Dr Burtscher. Une sévérité qui s’est encore accrue récemment dans notre pays. Le taux de mortalité était de 15,6 % dans la période 1999-2006, il a atteint 19 % en 2008, alors que la mortalité due au méningocoque de sérogroupe B est restée stable à 9 %. Cette évolution défavorable tient à l’augmentation des souches C de complexe clonal ST-11, très virulents, qui représentaient, en 2008, 77 % des méningocoques C, alors que les souches du sérogroupe B sont beaucoup plus hétérogènes, explique le Dr Burtscher.
La survenue d’un purpura fulminans est plus fréquente en cas d’infection à méningocoque C : 39 % contre 24 % pour le méningocoque B. Les séquelles également, notamment les cicatrices et les amputations.
Une dose pour tous, de 1 à 24 ans.
Deux groupes d’âge sont particulièrement exposés aux IIM C : les enfants de moins de 4 ans et les jeunes adultes de 15 à 24 ans. Plusieurs stratégies vaccinales ont été étudiées. Le choix du CTV s’est finalement arrêté sur la vaccination des nourrissons de 12 à 24 mois avec une seule dose de vaccin méningococcique C conjugué avec l’extension dans les 5 années à venir de cette vaccination systématique jusqu’à 24 ans révolus. « Cette stratégie et la nécessité éventuelle d’un rappel à l’adolescence seront réévaluées en fonction des données de surveillance en France et dans les autres pays ayant introduit cette vaccination », précise l’avis du Haut conseil de la Santé publique. Les experts insistent sur la nécessité d’atteindre rapidement une couverture vaccinale élevée, afin d’obtenir une immunité collective et de protéger les moins de 1 an non vaccinés et vulnérables. En pratique, note le Dr Burtscher, il convient de proposer la vaccination à tous les jeunes de 1 à 24 ans. Pour les nourrissons, cette vaccination vient s’ajouter aux autres vaccins de la deuxième année de vie et devrait trouver facilement sa place à l’occasion d’un examen systématique ou d’un rappel vaccinal. Le vaccin antiméningococcique C conjugué peut en effet être injecté fait en même temps que le pentavalent, le ROR ou encore le vaccin antipneumococcique conjugué, en deux sites différents. Chez les plus grands, on peut profiter des rappels ou des consultations pour certificat d’aptitude par exemple. C’est un vaccin bien toléré dont les éventuels effets secondaires sont bénins. Sa grande sécurité d’utilisation a été confirmée sur le terrain dans les pays où la vaccination est généralisée depuis plusieurs années. Aucune mesure de pharmacovigilance particulière n’a d’ailleurs été demandée par les autorités sanitaires, remarque le Dr Burtscher.
(1) Pédiatre, Munster.
(2) Une réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Pfizer.
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