Faut-il aller vers un durcissement des conditions de confinement de la population française ? Une semaine après l'entrée en vigueur de ces mesures sanitaires exceptionnelles, les médecins sont divisés quant à la stratégie à adopter pour lutter efficacement contre l'épidémie de Covid-19.
Dans un manifeste relayé dimanche 22 mars par « Le Parisien », 573 praticiens exhortent les pouvoirs publics à faire mieux respecter les consignes de distanciation sociale. « Nous aider, c'est respecter strictement le confinement », écrivent les signataires qui disent représenter « plus de 50 000 médecins hospitaliers français, internes, chefs de clinique, praticiens hospitaliers, professeurs de médecine de toute la France, des Antilles à Paris et de toutes les disciplines, médicales, psychiatriques et chirurgicales ».
Le texte, paraphé notamment par l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH) et l'Intersyndicat national des internes (ISNI), appelle Emmanuel Macron à être plus ferme sur les interdictions de déplacement et demande « une communication plus explicite » sur le sujet. « Les dérives que nous observons nous apparaissent inacceptables pour la sécurité collective », s'agacent les signataires qui citent en exemple la Chine qui a pu « par un confinement massif et contrôlé, réussir à maîtriser l'épidémie et limiter le nombre de décès ».
Dans un communiqué, les organisations de professionnels de bloc opératoire ont également appelé la population à respecter un « confinement total ». « Aidez-nous à vous aider : restez chez vous », écrivent notamment Le BLOC et le Conseil national des jeunes chirurgiens (CNJC).
De son côté, le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) s'est prononcé en faveur d'un « confinement raisonnable » accompagné d'« un dépistage massif des cas et des suspicions de cas, en milieu ambulatoire ». Dans un avis rendu lundi 23 mars sur la stratégie à adopter face à l'épidémie, le CNGE estime qu'« un confinement basé sur les tests plutôt que sur les suspicions pourrait diminuer l’anxiété de la population et sa réticence aux mesures ».
Inadapté et contre-productif
Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) est lui beaucoup plus critique sur le recours au confinement de la population. S'il reconnaît que cette solution est aujourd'hui indispensable, il regrette ouvertement la pénurie de masques, de gel hydroalcoolique, de tests PCR et tance le « retard dans la mise en place d'autres mesures de distanciation sociale (télétravail, distances de sécurité, etc.) qui instituées plus tôt, auraient aussi pu contribuer à ralentir la propagation du virus ».
Le syndicat va jusqu'à dénoncer un « durcissement policier voire militaire du confinement ». « Culpabiliser et criminaliser des citoyens et des citoyennes qui commencent seulement à comprendre la gravité de la situation après des semaines de flou nous semble donc inadapté et contre-productif, écrit-il ce lundi 23 mars. En tant que syndicat médical, nous refusons de tenir un tel discours qui ne relève pas de notre rôle de soignants. »
Avis du conseil scientifique mardi
Le Conseil d'État a enjoint dimanche 22 mars au gouvernement de revoir d'ici 48 heures certaines dérogations de déplacement « au caractère ambigu », notamment celles pour motifs de santé ou pour l'activité physique, refusant toutefois d'ordonner le « confinement total » réclamé en urgence par le syndicat Jeunes Médecins, l'ISNI et l'Ordre des médecins dans un référé liberté déposé vendredi. Les trois structures appelaient à un confinement à la chinoise accompagné d'un couvre-feu.
L'exécutif devrait prendre une décision dans les prochaines heures. Emmanuel Macron, qui s'est entretenu lundi avec les représentants des cultes, s'est dit opposé à un « confinement total », indique l'AFP. Le conseil scientifique dirigé par le Pr François Delfraissy doit rendre son avis mardi sur les conditions du confinement, dont le prolongement au-delà de la période initiale de 15 jours est jugé « probable » par plusieurs membres du gouvernement.
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