Négocié depuis huit mois, un nouvel accord-cadre triennal (2021-2024) a été signé le 5 mars entre les Entreprises du médicament (LEEM) et le Comité économique des produits de santé (CEPS), chargé de fixer et de réguler les prix.
Pour Philippe Bouyoux, président du CEPS, cet accord « respecte les orientations gouvernementales comme les attentes des industriels » pour garantir l'accès des patients aux soins dans un « cadre financier soutenable ». Selon Frédéric Collet, président du LEEM, ce compromis tient compte « des innovations thérapeutiques qui arrivent à un rythme soutenu au bénéfice des patients et de la volonté des pouvoirs publics de refaire de la France un grand pays producteur de médicaments ». Ce texte a été aussi salué par les ministres concernés (Santé, Économie et Industrie) comme la traduction de la priorité donnée à la politique conventionnelle avec les industriels.
Plusieurs objectifs ont été poursuivis : l'accès accéléré aux innovations, le soutien à la production de médicament en France et la simplification des procédures d'accès au marché. Florilège des mesures emblématiques.
Accélérer les délais : fast-track
La réduction des délais de mise sur le marché des médicaments est une volonté partagée entre le gouvernement et les industriels. Ces délais, après obtention de l'autorisation de mise sur le marché, demeurent longs et préjudiciables : plus de 500 jours en moyenne en France, loin des 180 jours fixés par la directive européenne. L'amélioration des délais post-AMM est donc prioritaire. Dans cet objectif, l'accord prévoit d'élargir la procédure de fixation des prix (fast-track) à des situations nouvelles.
Cette procédure accélérée permet à un labo de demander au CEPS un avenant conventionnel « dans un délai maximum de 15 jours ouvrés », en fonction du niveau d'amélioration du service médical rendu (ASMR) défini par la Haute Autorité de santé. Cette fast-track s'étendra aux médicaments ayant une ASMR 1 (majeure), 2 (importante) ou 3 (modérée) dont la stratégie thérapeutique est dominante en termes d'efficience. Elle concerne aussi les ASMR 4 (mineure) lorsque la stratégie thérapeutique est dominante en termes d'efficience et permet des économies.
En cas d'échec des négociations, l'accord met en place une nouvelle « procédure arbitrale » de fixation des prix à titre expérimental sous conditions.
Faciliter l'accès aux innovations
L'accord mentionne plusieurs leviers. Il prévoit la stabilité des prix nets « durant les cinq premières années de commercialisation des produits les plus innovants » (ASMR 1 à 3). Le texte propose aussi une nouvelle doctrine conventionnelle concernant les prix des médicaments de technologie innovante (MTI) – regroupant les thérapies géniques et cellulaires.
Pour tenir compte des spécificités des médicaments onéreux (administration souvent unique, durée d'effet prolongé, etc.), l'accord valide la prise en compte de l'incertitude au travers de « contrats de gestion de risques » qui clarifient les conditions de prix selon les performances observées en vie réelle. Autre avancée : le fractionnement des paiements sur plusieurs années permettant un étalement des charges.
Limiter les pénuries en cas de besoin de santé publique
Pour maintenir une offre suffisante de médicaments qui répondent à un besoin de santé publique, l'accord prévoit plusieurs mesures de stabilité et prévisibilité des prix : impossibilité de pratiquer deux baisses de prix à moins de deux ans d'intervalle ; possibilité d’obtenir une hausse de prix pour une classe thérapeutique présentant, du fait de ses coûts de production, des difficultés d’approvisionnement ; ou encore stabilité des tarifs des médicaments ASMR 5 durant les trois premières années de commercialisation. L'accord élargit les conditions d'accès à un prix européen pour certains médicaments apportant un progrès incrémental (ASMR 4), répondant à une besoin de santé publique non couvert.
Relocaliser et soutenir la filière tricolore
Alors que la crise a révélé la dépendance de la France en matière de production des médicaments, l'accord abrite un chapitre entier pour soutenir les investissements des industriels, relocaliser la production et valoriser les exportations.
Le CEPS pourra attribuer un prix « élevé » aux médicaments ASMR 1,2, 3 dans le cas où les principales étapes de fabrication (principes actifs, produit fini, conditionnement) sont réalisées en France. Pour favoriser les exportations, l'accord prévoit la stabilité du prix facial de deux ans – renouvelables une fois – pour les produits dont au moins une étape de fabrication se situe en Europe notamment en France (et dont plus de 60% des volumes sont exportés).
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