LA PRISE en charge et l’évolution clinique de l’angor stable sont l’objet de différences selon que l’on est un homme ou une femme. Les femmes sont moins bien explorées et moins bien traitées. Ce biais est particulièrement préoccupant car chez les femmes comme chez les hommes, l’insuffisance coronaire constitue la première cause de mortalité (1). Malheureusement, pour les médecins mais également pour les patientes, les maladies cardio-vasculaires sont très souvent considérées comme une pathologie d’homme (2). Cette inégalité hommes-femmes est également constatée dans les essais cliniques… Alors qu’elles constituent plus de 50 % de la population en France et ailleurs dans le monde, les femmes n’y ont été représentées qu’à hauteur de 20 à 30 % dans les essais publiés entre 1986 et 2003.
Un pronostic moins favorable.
Les inégalités concernent l’insuffisance coronaire stable et ne sont pas sans incidence sur le pronostic à cinq ans. C’est ce qu’a montré le programme européen Euro Heart Survey, qui a porté sur plus de 3 000 patients consultant pour la première fois pour angor stable (3). Les femmes constituaient 42 % de l’échantillon, et l’épreuve d’effort a été significativement moins souvent mise en œuvre, avec un odds ratio de 0,81 par comparaison avec les hommes. Quant à la coronarographie, elle a été réalisée encore moins souvent, avec un odds ratio de 0,59 par comparaison avec les hommes, à niveau de risque cardio-vasculaire comparable. En ce qui concerne les traitements, enfin, les différences hommes-femmes sont apparues nettes, avec une probabilité d’une revascularisation faible chez les femmes, même lorsque la maladie coronaire était documentée. Ces différences concernent également, de manière statistiquement significative, la prévention secondaire, en particulier l’usage d’antiagrégants plaquettaires et d’hypolipémiants.
Ces différences sont très préoccupantes, le risque cardio-vasculaire étant plus élevé chez la femme que chez l’homme après infarctus myocardique aigu (4). En effet, chez les femmes, la mortalité globale atteint 25 % à un an, contre 16 % chez les hommes. Cet état de fait concerne surtout les premiers jours de l’hospitalisation et les femmes de 30 à 67 ans.
Des anomalies lipidiques plus nettes.
Sur le plan physiopathologique, l’étude américaine SWAN (Study of Women’s health Across the Nation) a montré que la relation entre la femme et l’infarctus s’explique par son niveau de facteurs de risque (5). En effet, cette étude, qui a porté sur 3 302 femmes suivies pendant dix ans, a montré qu’à partir de la ménopause, le profil lipidique se modifie de manière nette, avec un accroissement parfois important du LDL-cholestérol, du cholestérol total et de l’apolipoprotéine B.
Afin de tenter de dissiper des idées reçues au sein du grand public, la Fédération française de cardiologie s’est mobilisée dès 2005 en organisant l’opération « Cœur de femme par femmes de cœur ». Elle précisait alors que « les maladies cardiovasculaires tuent davantage de femmes que d’hommes : 89 000 femmes par an contre 76 000 hommes » et rappelait aux femmes que « les maladies cardiovasculaires tuent plus que l’ensemble des cancers : 34 % contre 23 % ».
D’après un entretien avec le Pr Daniel Thomas (groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris).
Références
(1) Mikhail GW. Coronary Heart Disease in Women Is Underdiagnosed, Undertreated, and Under-Researched. BMJ 2005 ; 331: 467-8 (éditorial).
(2) M. Stramba-Badiale, S.G. Priori. Gender-Specific Prescription for Cardiovascular Diseases ? Eur Heart J 2005 ; 26(16): 1571-1572 (éditorial).
(3) C. Daly et coll. Gender Differences in the Management and Clinical Outcome of Stable Angina. « Circulation », 2006; 113 : 490-498.
(4) T. Simon et coll. Impact of Age and Gender on In-hospital and Late Mortality After Acute Myocardial Infarction : Increased Early Risk in Younger Women. Results From the French Nation-Wide USIC Registries. Eur Heart J 2006 ; 27 (11) : 1282-8.
(5) Matthews K, et coll. Are changes in cardiovascular disease risk factors in midlife women due to chronological aging or to the menopausal transition ?. J Am Coll Cardiol 2009 ; 54 (25) : 2366-73.
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