Combien de nouvelles demandes surgiraient de la loi de bioéthique du 2 août 2021 qui ouvre l'assistance médicale à la procréation (AMP) à toutes les femmes ? Telle était la grande inconnue de cette réforme médicale et sociétale. L'Agence de la biomédecine (ABM) avançait fin octobre le chiffre de 3 500 pour l'année 2021.
De facto, entre le 1er août et le 15 octobre 2021, ce sont 2 753 demandes de premières consultations qui ont été enregistrées dans les centres de don en vue d’une AMP avec don de spermatozoïdes, dont 1 171 de la part de couples de femmes et 1 316 de femmes non mariées, précise l'ABM ce 22 novembre, soulignant une nette hausse après la promulgation de la loi. L'agence s'appuie sur une enquête réalisée auprès des 29 Cecos*, ces centres de don de gamètes, 25 ayant répondu. Les résultats ont été présentés le 15 novembre, lors de la première réunion du comité national de suivi de la mise en œuvre de la loi*, rassemblant l’ensemble des parties prenantes du domaine de l'AMP sous l'égide de l'ABM.
Sur ces demandes, 934 premières consultations ont été réalisées en vue d'une AMP avec don de sperme (toujours entre août et mi-octobre), dont 352 au bénéfice de couples de femmes et 313 au bénéfice de femmes non mariées.
Pas d'inquiétude sur le nombre de paillettes…
Quant aux stocks de paillettes de spermatozoïdes, la présidente de l'ABM Emmanuelle Cortot-Boucher se voulait rassurante lors du lancement d'une campagne inédite pour encourager le don. « Les stocks sont suffisants, avait-elle déclaré. Même si la demande est dynamique, il n'y a pas d'inquiétudes sur la disponibilité », ce qui n'est en revanche pas vrai pour le don d'ovocytes. Quelque 3 003 paillettes ont été délivrées entre janvier et juin 2021. Au 1er août 2021, les Cecos comptaient un stock total de 87 926 paillettes de spermatozoïdes attribuables. Et 359 donneurs de spermatozoïdes avaient réalisé un don au 15 octobre, contre 317 hommes au cours de l’année 2019 (mais 386 en 2018, voire 404 en 2017).
... mais des préoccupations vives sur les personnels
En revanche, les témoignages rapportés à l'ABM lors de cette première réunion du comité de suivi font état d'inquiétudes des Cecos à l'égard du recrutement du personnel, pour répondre aux nouvelles demandes. Ceci malgré l'enveloppe accordée par le gouvernement de 8 millions jusqu'en 2023, dont 4 millions dès 2021 pour l'équipement et le personnel, et 3,3 millions de crédits d'amorçage accordés dès le premier semestre 2021.
De leur côté, les associations de patients ont fait état d’interrogations concernant les limites d’âge fixées pour l’accès à l’AMP, ainsi que sur l’évolution des délais d’attente. « Les mesures phares de la nouvelle loi de bioéthique dans le domaine de l’AMP ont été fortement attendues et il est donc essentiel que le texte puisse produire ses effets aussi vite que possible, explique Emmanuelle Cortot-Boucher. Ces mesures mettent le système de santé sous tension. Cette tension représente un défi pour tous, et le comité doit faire œuvre utile pour qu’elles puissent être surmontées dans les meilleures conditions ».
La prochaine réunion du comité de suivi se tiendra le 14 février 2022. En parallèle de l'enquête auprès des centres de don de spermatozoïdes pour évaluer l’évolution des demandes, un travail similaire sera conduit auprès des cliniciens des centres clinico-biologiques, et une enquête sera lancée sur l’autoconservation des gamètes.
* Centre d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains
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