LE QUOTIDIEN : Il existe un retard français persistant en chirurgie ambulatoire selon la Cour des comptes. Pourquoi ?
Pr CORINNE VONS : Les CHU sont à la traîne car ce sont des machines dinosaures freinées par leur taille. La toute-puissance du chef de service peut jouer : si l'ambulatoire ne l'intéresse pas, aucun chirurgien n'en fera ! Ce manque d'autonomie explique les dix ans de retard de services entiers sur la laparoscopie en ambulatoire.
Le fonctionnement est plus souple en clinique, où le taux de chirurgie ambulatoire dépend uniquement de la volonté du chirurgien. C'est aux sociétés savantes de convaincre les plus frileux.
Aux États-Unis, cette pratique est la norme : les praticiens adhérents perçoivent une incitation financière supérieure à celle des adeptes de l'hospitalisation conventionnelle. En France, le directeur d'établissement est rémunéré pendant qu'on nous demande de faire de l'ambulatoire sur un coin de table…
La création de centres autonomes est votre cheval de bataille. De quoi s'agit-il ?
Ce sont des structures déconnectées de la chirurgie conventionnelle, qui casse le rythme à flux tendu de l'ambulatoire. Les centres sont conçus autour du principe de marche en avant – le patient ne revient jamais en arrière. Il n'y en a que quatre ou cinq en France et pour cause : cliniques et hôpitaux freinent des quatre fers de peur de voir leurs lits se vider. C'est la raison pour laquelle les groupements hospitaliers de territoire (GHT) constituent pour nous un espoir. En raisonnant en termes de volume et de besoin territorial, un centre peut trouver sa place dans chaque GHT.
Existent-ils encore des marges de manœuvre sur le geste médical ?
Bien sûr ! Regardez la cholécystectomie. Des opérations complexes comme la transplantation hépatique sont irréalisables en moins de 12 heures aujourd'hui. Mais qu'en sera-t-il demain avec l'innovation et la recherche sur le foie artificiel ? Il y a dix ans, opérer un anévrisme de l'aorte abdominale en ambulatoire était inimaginable. C'est une réalité. Un jour, toute la chirurgie sera ambulatoire. S'il y a blocage, il ne viendra ni de la profession, ni de la nature de l'acte chirurgical mais du malade.
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