En psychiatrie, comme dans d'autres spécialités, les médecins sont toujours à la recherche de moyens pour délivrer des principes actifs sur plusieurs jours, voire sur plusieurs semaines, afin de diminuer le risque de mauvaise observance.
C'est pour répondre à ce besoin que la start-up montpelliéraine MedinCell poursuit la mise au point de Bepo, un dispositif d'injection à longue durée d'action. Le principe consiste en une co-injection du principe actif, d'un copolymère (le polyéthylène glycol), et d'un solvant (l'acide lactique). Une fois le mélange injecté en sous-cutané, le solvant se dilue dans le milieu biologique et le polymère se solidifie, emprisonnant le principe actif. Au cours des jours suivant, le polymère va se résorber progressivement, libérant le principe actif.
Une réduction des épisodes psychotiques
Une des premières applications de Bepo est la psychiatrie, un domaine où les problèmes d'observance sont fréquents. Le 24 juin 2015, une équipe de l'université de Californie, à Los Angeles (UCLA), a expérimenté ce mode d'administration à longue durée d'action dans la délivrance de rispéridone chez 83 patients schizophrènes récemment diagnostiqués.
Publiés dans le « JAMA Psychiatry », les résultats montrent qu'une injection longue durée d'action toutes les deux semaines via la solution mis au point par l'entreprise Risperdal Consta diminue le risque de mauvaise observance comparé à la prise quotidienne d'un médicament oral. « Nous savons que le fait de ne pas prendre son traitement constitue un des principaux risques encourus par les patients de voir revenir des épisodes psychotiques », explique le Pr Kenneth Subotnick, de l'UCLA, premier auteur de l'étude.
La moitié des patients ont reçu une formulation orale de rispéridone, tandis que les autres ont bénéficié d'une forme injectable à longue durée d'action. Au cours de l'année de suivi, 5 % du panel testé a souffert de nouveaux épisodes psychotiques, contre 33 % de ceux qui prenaient une forme orale.
Premiers pas en orthopédie
En France, un autre programme d'expérimentation du dispositif Bepo va commencer au CHU de Montpellier, sous la responsabilité du Pr Xavier Capdevila, anesthésiste et responsable du pôle urgence. « Bepo répond à un besoin non satisfait : celui de disposer d'un transporteur susceptible de délivrer un médicament de façon constante, explique-t-il au « Quotidien », pour l'instant, nous nous reposons sur des injections itératives ou des maintiens de cathéters en sous-cutané ».
L'expérimentation du Pr Capdevila va porter sur l'utilisation de Bepo pour délivrer de la ropivacaïne à libération prolongée an contact du nerf fémoral après une chirurgie du genou. « Le produit d'anesthésie sera délivré de façon progressive pendant une semaine, poursuit le Pr Capdevilla, nous espérons de cette manière éviter les morphiniques qui font courir un risque accru de chronicisation de la douleur. »
Une évaluation sur plusieurs niveaux
Au cours du programme complet d'évaluation, qui durera 5 à 6 ans, l'efficacité et la sécurité de Bepo seront comparées à celles de la prise en charge classique combinant anti-inflammatoires et paracétamol. Une autre étude comparera les effets d'injections de Bepo avec et sans produit anesthésiant. « Nous allons aussi faire du « dose range » afin d'identifier la dose optimale pour contrôler la douleur », ajoute le Pr Capdevila. Une dernière étape va consister à voir si l'utilisation de Bepo au bloc opératoire au lieu de la ropivacaïne par cathéter réduit la durée d'hospitalisation.
Si ses expériences sont un succès, de nombreuses applications vont s'ouvrir pour le procédé de MedinCell. Outre l'orthopédie, « l'ensemble des opérations chirurgicales qui entraînent des douleurs sévères thoraciques sont concernées, avec la possibilité d'injections intravertébrales, précise le Pr Capdevilla. Il y a aussi les gastrectomies au cours desquelles nous avons la possibilité d'infiltrer des zones ouvertes. »
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