Disposera-t-on bientôt en ville d'une nouvelle arme anti-Covid ? C’est ce que laisse espérer une récente annonce de Merck Sharp & Dohme (MSD), qui se félicite des bonnes performances d’un antiviral anti-SARS-CoV-2 en développement pour le traitement précoce de l'infection à coronavirus : le molnupiravir.
Vendredi, le laboratoire a fait état d’une analyse intermédiaire encourageante d'un essai clinique de phase III visant à confirmer la capacité du molnupiravir à prévenir l'aggravation de l'état clinique des individus récemment infectés les plus vulnérables. Selon l’industriel, cette évaluation préliminaire aurait donné des résultats suffisamment prometteurs pour que « le recrutement de patients dans l’étude [soit] arrêté de manière anticipée ».
De fait, cette première évaluation aurait montré que le candidat-médicament, administré dans les 5 jours suivant le début des symptômes, permettrait de réduire de moitié le risque d’hospitalisation ou de décès des patients à risque de développer une forme grave. Parmi les près de 400 infectés présentant un facteur de risque de mauvais pronostic inclus dans le bras interventionnel de l’analyse, aucun ne serait décédé, et moins de 30 auraient été hospitalisés. Et ce, alors que plus de 50 hospitalisations et 8 décès auraient été déplorés parmi les 377 volontaires du groupe contrôle.
Le premier traitement précoce disponible par voie orale
Face à ces résultats, le laboratoire a commencé à tester le molnupiravir en prophylaxie post-exposition chez les sujets à risque. Mais surtout, la firme envisage « de solliciter dans les plus brefs délais une demande d’utilisation d’urgence aux États-Unis et de soumettre des demandes d’autorisation aux autorités de santé dans le monde ».
De plus, un accord d’approvisionnement de près de 2 millions de traitements aurait été passé avec le gouvernement américain. « Par ailleurs, MSD a conclu un accord […] d’achat pour le molnupiravir avec d’autres gouvernements dans le monde […] et échange également en ce moment avec différents pays », se félicite l’entreprise, qui se préparerait à produire 10 millions de traitements d’ici fin 2021.
À l’origine de cet engouement : la facilité d’utilisation du molnupiravir. De fait, alors que les seuls traitements précoces disponibles à l’heure actuelle sont des anticorps monoclonaux, administrables uniquement par perfusion, à l’hôpital, le molnupiravir pourrait être « le 1er traitement antiviral par voie orale contre le COVID-19 ». Ainsi pourrait-il, à terme, être prescrit par les généralistes, délivré et utilisé en ambulatoire par les individus à risque.
Un risque de cancer à long terme ?
Cependant, quelques voix mettent en garde contre tout excès d’enthousiasme, rappelant que ces conclusions optimistes sont tirées d’un communiqué de laboratoire, et que des données complémentaires, revues par des pairs, restent requises pour conclure formellement à l’efficacité du molnupiravir.
Certains virologues s’inquiètent aussi des effets indésirables potentiels de la molécule. Si MSD ne rapporte pour le moment aucun signal de sécurité à court terme, des effets secondaires pourraient se manifester à plus long terme. Du fait de sa nature – analogue de nucléosides comportant une base modifiée – et de son mode d’action – mutagène capable de tuer le virus par accumulation de mutations –, le molnupiravir pourrait en effet contribuer à l’émergence de nouveaux variants.
Mais surtout, le molnupiravir pourrait s'avérer cancérigène. Une allégation qui fait débat dans la communauté scientifique. Si une publication du Journal of Infectious Diseases alertait en mai, sur « le potentiel d’incorporation et de mutagenèse de l’ADN de l’hôte » du molnupiravir, qui pourrait se confirmer même en traitement court, le Pr Yazdan Yazdanpanah (infectiologue à l’hôpital Bichat de Paris et directeur de l'ANRS-maladies émergentes) tend plutôt à rassurer, considérant début septembre, « que la posologie à laquelle pourrait être utilisé le molnupiravir suffise pour le rendre si dangereux ».
Quoi qu’il en soit, la piste des traitements oraux précoces par anti-viraux anti-SARS-CoV-2 semble prometteuse. D'autres candidats-médicaments de ce type auraient aussi donné de premiers résultats positifs contre le virus.
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