Comment gérer la vaccination chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) qui doivent débuter un traitement par méthotrexate (MTX) ? C’est une question fréquente en pratique à laquelle a voulu répondre l’étude Vacimra menée par le Pr Jacques Morel (CHU de Montpellier).
Le méthotrexate est le traitement de première ligne utilisé dans la PR. Comme il peut diminuer la réponse immunitaire à la vaccination anti-pneumococcique, il est logiquement recommandé de vacciner avant l’initiation du méthotrexate. « Mais par ailleurs, selon les recommandations de l’EULAR, le traitement par méthotrexate doit être initié dès que le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde est posé, rappelle le Pr Morel. Ainsi, si l’on introduit le traitement de la PR de façon différée, ne va-t-on pas entraîner une perte de chance pour le patient ? C’est le rationnel de notre étude », explique le spécialiste.
Des études avaient déjà montré que pour la vaccination contre la grippe, la meilleure réponse vaccinale était obtenue, si le méthotrexate était arrêté deux semaines après la vaccination. Mais jusque-là aucune ne s’était penchée sur la vaccination contre le pneumocoque. C’est désormais chose faite.
276 patients atteints de PR ont été recrutés. Leurs caractéristiques étaient les suivantes : 70 % de femmes, âge moyen 55,6 ans, durée de la PR 2 mois, 69 % ACPA +, 21 % de formes érosives et DAS 28-CRP à 4,6. Ces sujets ont été vaccinés avec le vaccin conjugué 13 valents (VPC 13) lors de la randomisation et deux mois plus tard, avec le vaccin polysaccharidique 23 valents (VPP 23). Après randomisation en deux groupes, le méthotrexate (MTX) a été initié immédiatement dans le groupe groupe MTX immédiat (GI) ou après un mois dans le groupe groupe MTX différé (GD). « Pour réduire si nécessaire l’inflammation clinique et biologique, les corticoïdes oraux étaient autorisés mais pas plus de 10 mg/jour », ajoute le Pr Jacques Morel.
Les concentrations spécifiques d’IgG des 13 sérotypes contenus dans le VPC 13 ont été mesurées par Elisa et par un test de neutralisation opsonophagocytique (OPA), rapportée sous forme d’indices d’opsonisation (IOs) à 0, 1,3, 6 et 12 mois. La réponse anticorps positive était définie comme une augmentation d’au moins 2 fois la concentration d’IgG par Elisa. Pour l’IO, la réponse était définie comme un doublement de la valeur seuil du sérotype fourni par le laboratoire. Le critère de jugement principal était les taux de répondeurs un mois après le VPC 13, définis par au moins 3 réponses anticorps positives sur 5 des sérotypes d’intérêt (1,3,5,7F,19A).
L’activité de la maladie, les infections et les effets secondaires ont été collectés tout au long de l’étude.
Un mois de délai
« Concernant la réponse humorale, les résultats montrent des taux de répondeurs significativement plus élevés dans le groupe GD par rapport au groupe GI avec les deux techniques de dosage : 88 % vs 75 % (p < 0,01) par Elisa et 96 % vs 88 % (p = 0,2) par OPA. Les proportions de répondeurs à 12 mois étaient encore plus élevées dans le groupe GD en Elisa. Quant au contrôle de la maladie, il était similaire dans les deux groupes : au-delà du premier mois, les scores DAS28 étaient comparables, sans que n’interfèrent les traitements puisque les doses cumulées de stéroïdes et de traitement ciblé étaient équivalentes entre GI et GD pendant le suivi à 12 mois », résume le Pr Jacques Morel.
En conclusion, cette étude démontre clairement avec un suivi à long terme (12 mois) que chez les patients PR, le vaccin VPC 13 administré un mois avant le début du MTX permet une réponse humorale significativement plus élevée à un mois par rapport aux patients vaccinés simultanément avec le MTX, et cette différence est maintenue à un an ; ceci sans aucun impact sur le contrôle de la maladie (cortisone à 10 mg/j possible). Ces résultats soutiennent fortement la vaccination des patients avant l’initiation du MTX.
« Le schéma vaccinal vient de changer avec l’arrivée récente du Prevenar 20, mais on retrouve les mêmes sérotypes que ceux étudiés dans le Prevenar 13, on peut donc imaginer que ces résultats sont transposables avec le nouveau vaccin »
D’après un entretien avec le Pr Jacques Morel (CHU de Montpellier)
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