Très en vogue actuellement, la notion de haut potentiel émotionnel (HPE) a été développée en 1990 par Salovey et Mayer. Il s’agit de « la capacité de surveiller ses propres sentiments et émotions et ceux des autres, de faire la distinction entre eux et d’utiliser ces informations pour guider sa pensée et ses actions ».
Mais, très vite, le terme a été utilisé pour couvrir d’autres traits différents, très mouvants, voire pathologiques, « alors que, selon la définition originale, les personnes HPE sont justement capables de réguler et comprendre leurs émotions et celles d’autrui mieux que les autres », insiste le Pr Nader Perroud (Genève). Ainsi, contrairement aux idées reçues, « l’ HPE n’est pas une dysrégulation des émotions et protège au contraire de la psychopathologie ».
La dysrégulation des émotions, c’est-à-dire des émotions pauvrement modulées, entraîne des comportements qui vont à l’encontre des intérêts de l’individu (colères intenses, agressivité envers soi et les autres, perturbations des interactions sociales et relationnelles…). « Ceux qui dysrégulent dans leurs émotions sont les personnes borderline (émotionnellement labiles), beaucoup de sujets TDAH et certains bipolaires (soft). Ils ont une faible capacité de mentalisation, contrairement aux personnes HPE qui régulent bien leurs émotions et ne sont pas en souffrance. Tout l’inverse de la notion construite sur internet… »
Une quête de réponses à un malaise
L’HPE et autres concepts tels que les hypersensibles, les zèbres, les indigos… sont des notions construites par des personnes en quête de réponses à leur malaise. « En revanche, si la personne se sent triste tout le temps, a des relations conflictuelles, se sent différente des autres et souffre, elle doit plutôt consulter un spécialiste que faire un test sur internet pour savoir si elle a ou non un HPE ! » a déclaré le Pr Nader Perroud.
Ce qu’on trouve sur internet n’a souvent aucun fondement scientifique et s’assimile à du marketing. « Il y a un marché de la souffrance psychique qui se développe, avec un effet Barnum (effet Forer ou encore effet puits), c’est-à-dire un biais cognitif induisant toute personne à accepter une vague description de la personnalité comme s'appliquant spécifiquement à elle-même », conclut Thomas Villemonteix. C’est une sorte de valorisation sociale qui se développera encore plus avec Chat GPT, prévient le spécialiste.
D’après la communication « HPE ou dysrégulation émotionnelle : de quoi parlons-nous ? »
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