Le dispositif “M'T dents” de l’Assurance maladie, étendu depuis peu à la femme enceinte, s’arrête à l’âge de 24 ans. Au-delà, aucune visite de contrôle systématique n’est prévue. Quant à un meilleur remboursement des soins dentaires avec le « reste à charge zéro », il ne devrait impacter dès 2020 qu’une partie des seniors, car il ne concernera pas à ce stade les prothèses amovibles, et les conditions entourant le choix des couronnes seront très encadrées.
Pourtant, une dentition parfaite est primordiale. Les pathologies bucco-dentaires rencontrées chez le senior affectant l’organisme dans son ensemble participent à la perte d’autonomie. En premier lieu figurent les pathologies gingivales, avec plus de la moitié des seniors atteints de parodontite.
« La mobilité, le déplacement, voire à terme la chute spontanée des dents jouent sur le potentiel masticatoire et, de ce fait, le type d’alimentation », indique le Dr Christophe Lequart, chirurgien-dentiste, porte-parole de l’UFSBD (Union française pour la santé bucco-dentaire), « avec une préférence pour une alimentation molle, un régime pauvre en fruits, fibres et protéines et riches en glucides. Outre la disparition du goût, car la personne âgée aura alors tendance à gober les aliments, une dentition déficiente couplée à l’atrophie physiologique de la muqueuse est un facteur de risque d’être en sous-poids associé à une malnutrition, voire une dénutrition, et donc un pas vers la dépendance ». Quelques études l’ont constaté : à mesure que le nombre de dents diminue, la vitamine A, les fibres et le calcium chutent, tandis que le cholestérol augmente.
Attention aux sécheresses buccales
À ces fréquentes parodontites s’ajoute une particularité chez le senior, à savoir la recrudescence de la pathologie carieuse, liée à de nouvelles habitudes alimentaires. « La sensation de soif s’estompe », souligne Christophe Lequart. « Boire moins accentue la sécheresse buccale, entretenue par une xérostomie et la prise de médicaments (anxiolytiques). Or la salive et son contenu en bicarbonates ont un effet antibactérien. Elle neutralise les acides synthétisés par les bactéries buccales suite à la prise alimentaire, aide à éliminer les restes d’aliments, apporte le calcium et le phosphate nécessaires à la reminéralisation dentaire. »
Par ailleurs, la salive favorise la mastication et la déglutition. Beaucoup de seniors, à la fois du fait de leur appétence augmentée pour le sucre et pour simuler les glandes salivaires, sucent de façon répétée des produits sucrés, augmentant alors le risque de lésions carieuses. Un cercle vicieux.
Conséquences coronariennes et tendineuses
La détérioration de l’état dentaire, au-delà de son effet sur la prise alimentaire, produit des conséquences systémiques désormais bien étayées. L’une des complications du diabète est la parodontite et à l’inverse, une parodontite déséquilibre la glycémie. « La parotidite favorise également le développement des lésions d’athérosclérose dans les coronaires, d’où un risque accru de maladies coronariennes et d’accidents vasculaires cérébraux de type ischémique », précise le Dr Lequart. « L’inflammation à bas bruit, en partie à l’origine de ces lésions, est entretenue par les toxines libérées dans la circulation générale par les bactéries responsables de la parodontite. »
Les problèmes pulmonaires ne sont pas en reste. En effet, l’augmentation de la charge bactérienne engendrée par des caries non traitées et des parodontites favorise l’inhalation de bactéries, et l’on constate chez les personnes âgées, a fortiori si elles ont une immunité déficiente, une augmentation des infections pulmonaires (abcès pulmonaires, pneumopathies). « Mêmes causes, même conséquences, certaines tendinites ou leur persistance auraient également pour origine des problèmes dentaires », précise-t-il.
Enfin, dans nos sociétés occidentales, l’édentement ou un état dentaire dégradé sont perçus comme une atteinte à l’intégrité corporelle. Les pathologies buccodentaires, en altérant l’image de soi, la phonation ou la nutrition, affectent la qualité de vie des seniors. Elles sont un obstacle à la communication et à la vie sociale et une source potentielle d’isolement des personnes âgées.
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