La colonisation urinaire ou bactériurie asymptomatique est une situation clinique fréquente pour laquelle il n’est pas recommandé de débuter un traitement antibiotique sauf situations particulières (femme enceinte, chirurgie urologique). Ces recommandations sont basées sur des études ayant démontré l’inefficacité d’un tel traitement antibiotique pour réduire la fréquence des épisodes symptomatiques à moyen terme (6 mois – 1 an).
Deux études récentes ont examiné à l’aide d’un essai randomisé, contrôlé, non aveugle chez plus de 600 femmes non ménopausées, l’effet du traitement antibiotique de la colonisation urinaire sur la fréquence de survenue d’un nouvel épisode symptomatique à 1 an et 3 ans (1, 2). De façon intéressante, les femmes ayant reçu un traitement antibiotique pour une colonisation urinaire avaient deux fois plus de probabilité de connaître un épisode symptomatique urinaire à 1 an et 4 fois plus à 3 ans, comparées aux femmes n’ayant pas reçu de traitement antibiotique. De plus, le taux d’Escherichia coli résistantes à l’amoxicilline-acide clavulanique, au triméthoprime-sulfamethoxazole, et à la ciprofloxacine était significativement plus important dans le groupe traité.
Colonisation volontaire
Partant de ces résultats suggérant un effet protecteur de la colonisation urinaire sur la survenue d’épisode symptomatique, l’équipe du professeur Wullt a réalisé un essai de colonisation urinaire volontaire par instillation (3). La souche utilisée était E. coli 83 972, initialement isolée d’une jeune femme souffrant de colonisation urinaire stable pendant 3 ans. Cette souche est dépourvue de facteur de virulence, et ne possède pas de gène de résistance acquise aux antibiotiques.
Dans cet essai randomisé en cross-over, contrôlé contre placebo, 20 patients souffrant d’infections urinaires récurrentes en rapport avec une vidange vésicale incomplète étaient instillés soit avec E. coli 83 972 puis avec du sérum salé, ou inversement. Les critères de jugement étaient le temps jusqu’au premier épisode d’infection symptomatique et le nombre d’épisodes symptomatiques.
Or le temps jusqu’au premier épisode symptomatique était significativement allongé dans le groupe E. coli 83 972, comparé au groupe sérum salé (11,3 vs. 5,7 mois ; p ‹ 0,05). De même, le nombre d’épisodes observés à 12 mois était significativement plus faible lorsque les patients étaient colonisés avec E. coli 83 972 que lorsqu’ils ne l’étaient pas (13 épisodes contre 35 ; p ‹ 0,001).
De manière remarquable, les épisodes symptomatiques étaient dus à E. coli 83 972 chez seulement deux patients. De plus, l’étude approfondie des 2 souches isolées chez ces patients, par des techniques phénotypiques, génotypiques et expérimentales (modèle murin), a indiqué que l’infection n’était pas en rapport avec un changement de la souche, notamment en termes de facteur de virulence, mais plutôt à une modification des défenses de l’hôte (4).
(1) Cai Tet al Clin Infect Dis Off Publ Infect Dis Soc Am 2012; 55: 771–7
(2) Cai T et al. Clin Infect Dis Off Publ Infect Dis Soc Am 2015
(3) Sundén F et al. J Urol 2010; 184: 179–85
(4) Köves B et al. J Urol 2014; 191: 519–28
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