La prothèse de genou est l’exemple type de traitement comportant un risque important de malentendu entre soignant et soigné sur les bénéfices à attendre (1).
« La prothèse peut faire disparaître la douleur. Mais si le patient s’attendait à pouvoir reprendre très rapidement une activité sportive intense (tennis, ski, bateau…), il risque d’être insatisfait du résultat. Savoir écouter les attentes des patients, expliquer ce que l’on est capable d’apporter en l’état actuel de la médecine et dire si les attentes sont adaptées ou non à ce que l’on peut proposer est essentiel si l’on veut que le patient soit satisfait du traitement choisi. Ce concept est porté en France dans l’arthrose par le Pr Serge Poiraudeau, (hôpital Cochin), dont l’équipe a développé et validé un questionnaire (2) pour évaluer les peurs et les croyances des patients atteints de gonarthrose. Ce genre de questionnaire aide à comprendre le ressenti de la maladie par le grand public et à apprécier si les attentes sont adaptées à ce que l’on peut proposer », explique le Pr François Rannou.
L’enquête stop arthrose
Parmi les différentes techniques permettant d’évaluer les attentes des patients, la plus pointue repose sur des synthèses d’entretiens dirigés par des sociologues sur de petits échantillons représentatifs. L’évaluation est alors fine et précise.
Mener des enquêtes sur de larges populations de malades pour recueillir un maximum d’information est une autre solution. C’est cette technique que l’association française de lutte antirhumatismale (AFLAR) a choisie. En 2012, elle a proposé à tout patient consultant son site internet de répondre à une grande enquête nationale sur l’arthrose intitulée « stop-arthrose ». L’enquête visait à préciser la façon dont les Français atteints d’arthrose vivent leur maladie et à évaluer leurs attentes vis-à-vis des traitements, du corps médical et paramédical, des autorités de santé et de la société.
L’enquête a recueilli 4 500 réponses dont 2 914 exploitables. Les personnes ayant répondu au questionnaire ont moins de 60 ans dans 47 % des cas, et leurs douleurs ont débuté avant 40 ans dans 35 % des cas. L’arthrose perturbe fortement leur quotidien : elle les fatigue (44 %), atteint leur moral (80 %), retentit sur leur vie professionnelle (70 %), l’image qu’ils ont d’eux-mêmes (64 %), leur vie sexuelle (28 %) et leur vie de couple (25 %). « Leur fardeau est lourd à porter. Il associe des douleurs (89 %), le sentiment de vieillir (46 %) et de nombreuses peurs : celles du handicap (53 %), de ne plus pouvoir se déplacer (36 %), de ne plus avoir de loisirs (46 %), d’avoir les articulations déformées (25 %) ».
Le ressenti de l’efficacité des traitements sur la douleur est médiocre : les antidouleurs soulagent seulement 56 % des interrogés, et les traitements non médicamenteux ne soulagent qu’un tiers d’entre eux. Une faible efficacité confortée par le questionnaire spécifique sur les besoins : 90 % disent vouloir qu’on soulage enfin leurs douleurs ! Parmi les autres besoins mis en évidence, l’envie d’avoir plus d’informations sur la maladie (80 %), un meilleur suivi médical (70 %) et de l’aide (20 %). Une situation que résume le Pr François Rannou : « Ils ont mal, souhaiteraient un meilleur service médical et ont le sentiment que personne ne s’intéresse à eux, ni le personnel médical, ni la société : en amont, il reste du travail à accomplir… ».
(1) Jourdan C et al. PLoS One 2012;7(1) :e30195
(2) Benhamou M et al. PLoS One 2013;8(1) :e53886
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