La BPCO est-elle un fléau de santé publique évitable ?
C’est avec cette interpellation que l’association BPCO a organisé en novembre son colloque annuel dans les locaux du Sénat à Paris. Quelques jours avant la Journée mondiale, l’association souhaitait ainsi rappeler, une nouvelle fois, tout l’enjeu de la prévention et de la détection précoce pour cette pathologie, qui semble parfois oubliée par les autorités sanitaires. « Il suffit de rappeler quelques chiffres pour faire prendre conscience de l’urgence à agir contre cette maladie qui, à notre grand regret, n’est jamais évoquée dans les grands plans de santé publique », indique le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue à La Rochelle et président de l’association BPCO.
« Aujourd’hui, on estime que 3,5 millions de personnes sont concernées par cette pathologie. Et les trois quarts d’entre eux ne sont pas diagnostiqués, poursuit-il. On recense aussi 120 000 personnes sous oxygène en France et la BPCO est à l’origine de 18 000 morts par an, soit 5,5 fois et demi plus que les accidents de la route. Enfin, la BPCO est à l’origine de 800 000 journées d’hospitalisation par an. Au total, on estime à 3,5 milliards d’euros par an les coûts de santé liés à cette maladie ».
Mal connue, peu considérée
En dépit des actions de sensibilisation menée depuis des années par les pneumologues, la BPCO reste encore très mal connue des Français, comme le montre un sondage réalisé par l’association à l’occasion du colloque de novembre. Huit Français sur dix n’ont jamais entendu parler de la BPCO et que 86 % d’entre eux ne se sentaient pas concernés par la maladie. « C’est la raison pour laquelle il est indispensable que des grandes campagnes de communication pluri-annuelles puissent être menées avec le soutien des pouvoirs publics et l’engagement des associations et des professionnels », indique le Dr Le Guillou.
Bien sûr, l’association BPCO composée de professionnels de santé et de patients, partage pleinement les objectifs de baisse du nombre de fumeurs, objectifs avancés par la ministre de la Santé dans son programme national de réduction du tabagisme. Toutefois, pour que les personnes à risques puissent profiter pleinement des bénéfices « des grandes mesures étatiques » menées en matière de prévention, il conviendrait que les campagnes d’information mentionnent systématiquement la BPCO (causée à 85 % par le tabac), ou que sur les paquets de cigarettes on puisse lire « la toux du fumeur peut cacher une BPCO » avec le visuel d’un malade sous oxygène.
Détection précoce
Une autre priorité concerne la détection précoce de cette maladie, qui évolue très lentement. « En France, le pivot des soins de proximité reste bien sûr le généraliste et il a un rôle essentiel à jouer pour assurer ce repérage précoce qui concerne un public ciblé : en effet, dans 85 % des cas, les patients BPCO sont des fumeurs. Et pour le reste, il s’agit le plus souvent de personnes exposées à des inhalations de particules dans certains secteurs professionnels : la sidérurgie, le textile, le BTP ou l’agriculture. Face à des patients, qui présentent un essoufflement, une dyspnée ou une toux, le généraliste ne doit pas hésiter à proposer le questionnaire validé par la HAS. En seulement 5 questions très simples, il permet de savoir s’il existe un risque de BPCO », souligne le Dr Le Guillou, en ajoutant que le généraliste doit savoir sensibiliser les patients à risque. « Souvent, ces derniers ont tendance à sous-estimer les symptômes ou à y adapter leur mode de vie ». Un autre acteur essentiel dans cette détection est bien sûr le médecin du travail qui voit les salariés et connaît les risques professionnels.
Diagnostic, oui mais formé !
L’étape suivante est la réalisation d’une spirométrie qui peut être faite au cabinet du généraliste. « En apparence, cela peut sembler tout simple. Mais en réalité, c’est un examen opérateur-dépendant. Cette technique nécessite un apprentissage et le respect d’un certain nombre de critères de qualité. Il faut aussi tenir compte du coût : un spiromètre coûte environ 1 400 euros et il faut changer de filtre (un euro pièce) pour chaque patient. Nous sommes tout à fait favorables à ce que les généralistes ou les pharmaciens puissent faire des spirométries mais à la condition qu’ils soient formés et qu’ils aient le temps et les moyens de le faire », indique le Dr Le Guillou.
Au final, le rôle du pneumologue reste crucial dans la réalisation du diagnostic. « C’est lui qui va faire un bilan complet d’évaluation spirométrique de la sévérité qui est indispensable avec l’établissement du diagnostic. Enfin, le pneumologue va évaluer l’ensemble des comorbidités, qui sont souvent nombreuses chez un patient BPCO », indique le Dr Le Guillou.
D’après un entretien avec le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue et président de l’association BPCO
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