La prise en charge de la sclérose en plaques (SEP) de l'enfant a longtemps été calquée sur celle de l'adulte. Or, les jeunes patients présentent des spécificités. Un premier protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) a été élaboré en 2016 par le centre de référence des maladies inflammatoires rares du cerveau et de la moelle. Il vise à présenter aux professionnels de santé concernés la prise en charge optimale chez l'enfant et à harmoniser les pratiques. La mise à disposition prochaine d'un nouveau traitement a conduit à une réactualisation de ce PNDS et de la fiche de synthèse destinée aux médecins traitants (disponibles sur le site de la Haute autorité de santé).
« Les enfants se trouvent dans une période de construction particulière, qui peut influencer l’évolution de la maladie. C’est pourquoi nous estimons qu’ils doivent être suivis par des pédiatres », indique au « Quotidien » le Dr Hélène Maurey, neuropédiatre à l’hôpital Bicêtre et co-coordinatrice du travail d’élaboration du PNDS.
Chez l’enfant, les premières poussées surviennent en moyenne à 11,9 ans, et sont environ trois fois plus fréquentes que chez l’adulte. Plus de 95 % des enfants présentent une forme rémittente de la maladie (évolution par poussées successives). « Le score de handicap (EDSS) est plus faible chez l’enfant que chez l’adulte, avec une bonne récupération entre les poussées », détaille la neuropédiatre.
« En 2016, nous avions peu de traitements disponibles, donc nous pouvions avoir recours uniquement à des traitements hors autorisation de mise sur le marché (AMM) », souligne le Dr Maurey. La prise en charge de la SEP repose sur les traitements de la poussée aiguë, comme les bolus de corticoïdes, et les traitements de fond.
Deux AMM attendues
Des essais thérapeutiques ont depuis été réalisés pour tester la tolérance et l’efficacité de différents traitements de fond de l’adulte chez l’enfant. « Deux nouvelles autorisations de médicaments sont ainsi attendues prochainement : Aubagio (tériflunomide) et Tecfidera (diméthyl fumarate) », avance la neuropédiatre. Les études évaluant ces deux médicaments sont en cours.
Gilenya (fingolimod) a déjà été approuvée par l’Union européenne en novembre 2018, son efficacité ayant été démontrée par l’étude PARADIGMS. Gilenya est ainsi le premier traitement par voie orale à recevoir une AMM chez l’enfant.
Il a aussi été approuvé chez l’enfant en mai 2018 par la Food and Drug Administration (FDA). « Il s’agit de la première approbation par la FDA d’un médicament destiné à traiter la SEP chez les patients pédiatriques », souligne la FDA.
Ce médicament est associé à une forte diminution des poussées et des signes d’évolution radiologique de la maladie chez les enfants de 10 ans et plus.
« Gilenya est indiqué comme traitement de première intention en cas de maladie très active ou en deuxième intention en cas d’échec aux traitements injectables (interférons β et acétate de glatiramère) », précise le Dr Maurey.
Les interférons β (Avonex, Rebif et Betaferon) et l’acétate de glatiramère (Copaxone) sont les seuls traitements approuvés par l’Agence européenne du médicament en première ligne chez les enfants de plus de 12 ans. Ce sont des immunomodulateurs qui permettent de réduire d’environ 30 % le taux de nouvelle poussée dans l’année. « En pratique, après présentation des différents traitements, la majorité des patients choisissent les traitements par interféron en une injection intramusculaire hebdomadaire », note le Dr Maurey.
« Pour les enfants de moins de 10 ans, les traitements mis en place sont prescrits hors AMM, ajoute la neuropédiatre. La SEP est rare chez les jeunes enfants, mais il paraît indispensable qu’ils aient accès à ces thérapeutiques, après avoir écarté les nombreux diagnostics différentiels, tels que les encéphalites à anticorps anti-MOG ». Seuls 0,2 à 0,4 % des personnes souffrant de SEP ont moins de 10 ans ; 3 à 10 % ont moins de 18 ans.
Accompagnement médicosocial
Par rapport à la version de 2016, ce nouveau PNDS comprend un volet sur l’accompagnement médicosocial. « Nous nous sommes rendus compte, lors de la journée des jeunes atteints de SEP organisée par la Fondation ARSEP et le centre de référence des maladies inflammatoires rares du cerveau et de la moelle, qu’il y avait une forte demande d’information sur la prise en charge médicosociale, rapporte le Dr Maurey. Si la SEP est peu invalidante à l’âge pédiatrique, un certain nombre de démarches sont à effectuer afin de ne pas pénaliser l’enfant à l’école, dans son orientation professionnelle… ». La SEP est notamment souvent associée à de la fatigue qui peut justifier des aménagements particuliers, comme la mise en place du tiers-temps pour les examens.
Les signes qui peuvent orienter vers un diagnostic de SEP sont en revanche les mêmes que pour l’adulte chez les enfants de plus de 12 ans - troubles sensitifs comme les picotements, troubles moteurs, troubles visuels… - alors que les enfants de moins de 12 ans ont plus fréquemment un tableau d’encéphalomyélite aiguë. Le diagnostic repose principalement, comme pour les adultes, sur l’IRM cérébrale et médullaire.
Une nouvelle réactualisation de ce PNDS devrait être réalisée début 2020, une fois que les résultats des études portant sur Aubagio et Tecfidera seront connus.
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