Les méningites

Toujours une urgence pédiatrique

Publié le 03/11/2010
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PLUSIEURS BACTÉRIES sont à l’origine de méningites. Les méningites à Hémophilus influenzae ont pratiquement disparu depuis la mise en place de la vaccination. Le méningocoque (Neisseria méningitidis) est la 2e cause de méningite après le pneumocoque (Streptococcus pneumoniae) de 0 à 12 mois et est responsable de 70 % des méningites bactériennes chez les 1-24 ans (chiffres de 2007). Les facteurs de virulence du méningocoque sont, comme pour d’autres bactéries telle Escherichia coli, avant tout les « pili » qui déterminent la capacité d’adhérence de la bactérie à l’épithélium. Le deuxième élément de virulence est la capsule qui protège contre la lyse par le complément et le troisième est constitué par les différentes couches de l’enveloppe du méningocoque qui ont surtout un potentiel antigénique. C’est le rôle primordial du complément dans la défense contre les agents bactériens qui était à l’origine des recommandations antérieures selon lesquelles, seuls devaient être vaccinés contre le méningocoque C, les enfants porteurs d’une asplénie ou d’un déficit en complément.

Méningite et purpura, deux complications sévères.

Après adhérence à un épithélium, le méningocoque passe dans le sang et donne lieu à une bactériémie qui est une urgence en pathologie infectieuse rappelle le Dr Michel Rodière (Infectiologie et Urgences pédiatriques - CHU Montpellier). L’infection peut prendre ensuite deux aspects : soit une infection méningée (méningite purulente), soit une infection invasive grave (choc septique). « La méningite est une forme localisée, c’est en fait une maladie d’organe mais d’autres localisations sont possibles : arthrite, péricardite, vascularite… ». Complication des méningococcémies, un purpura peut survenir et avoir des conséquences dramatiques : « Il est absolument nécessaire d’examiner et de déshabiller complètement un enfant fébrile. Les taches ecchymotiques peuvent être localisées sur les fesses ou « dans les chaussettes ». Il est donc facile de passer à côté. » Le purpura évolue de façon très variable. Si dans le purpura fulminans, l’extension des lésions est très rapide, il est possible aussi d’avoir des situations temporairement stabilisées avec quelques taches cutanées et de la fièvre. Les informations données par l’entourage du malade sont souvent significatives. S’il ressort de l’interrogatoire maternel que l’enfant « n’est pas comme d’habitude, est somnolent, ne va pas bien, est fatigué », il est important d’en tenir compte même si au moment de l’examen, le praticien ne constate rien de particulier. Dans tous les cas, devant un purpura fébrile, il y a obligation de traiter immédiatement par un antibiotique : céphalosporine de 3e génération ou aminopénicilline. Ce type d’antibiotique doit toujours être disponible au cabinet médical.

Une épidémiologie variable.

L’épidémiologie des infections invasives à méningocoques (IIM) en Europe varie selon les pays. En 2006, les IIM étaient plus nombreuses en Irlande et en Grande-Bretagne (2 à plus de 4 cas pour 100 000) qu’en France (1 à 2 cas pour 100 000). Ceci avait conduit ces pays à vacciner d’abord les plus jeunes enfants puis à généraliser la vaccination à toute la population pédiatrique. Actuellement, 95 % de celle-ci est vaccinée. « À savoir, précise le Dr Rodière qu’un étudiant français qui voudrait s’inscrire à Oxford ne pourra le faire que s’il est vacciné contre le méningocoque C… ! ».

L’épidémiologie en France est plus disparate. Il y a eu des « cas groupés » (ne pas parler d’épidémie précise le Dr Rodière) dans les Pyrénées-Orientales, à Clermont-Ferrand… Ces cas groupés ont amené les autorités de tutelle à recommander de vacciner les sujets contacts et à proposer des vaccinations régionales.

Toutes les tranches d’âge n’ont pas la même vulnérabilité aux IIMC. L’incidence est plus élevée chez les 0-24 ans avec 2 pics à 0-4 ans et à 15-24 ans. Contrairement aux infections invasives à pneumocoque, on n’observe pas de pic important vers 70-75 ans, cependant, l’immunité diminue avec le vieillissement et il est prudent de conseiller la vaccination à des personnes âgées en contact avec des jeunes enfants.

Une dose pour tous, de 1 à 24 ans.

Les stratégies vaccinales diffèrent d’un pays à l’autre. En France, différents éléments ont conduit le Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) à modifier ses recommandations concernant la vaccination antiméningococcique C en avril et juin 2009. En effet, les programmes de vaccination généralisée dans 13 pays européens avant 2009, ont démontré l’efficacité de la vaccination et l’absence d’émergence de clones virulents non couverts parla vaccination. De plus, la France n’ayant qu’un programme de vaccination restreint s’est retrouvée avec l’un des taux d’incidence d’IIMC les plus élevés d’Europe. Enfin, la constatation d’une augmentation des alertes sur des cas groupés, l’émergence d’un nouveau clone virulent de méningocoque C (prévenu par la vaccination), et l’association spatio-temporelle fréquente entre grippe et IIM ont confirmé la nécessité d’élargir la population ciblée par la vaccination.

Le HCSP recommande donc depuis avril 2009 de vacciner systématiquement les nourrissons à partir de l’âge de 12 mois avec une seule dose de vaccin méningococcique conjugué de sérogroupe C. Il recommande aussi l’extension de cette vaccination (rattrapage) jusqu’à l’âge de 24 ans révolus selon le même schéma à 1 dose. La vaccination antiméningococcique C est donc recommandée pour tous avec une seule dose de vaccin entre 1 an et 24 ans.

Réunion organisée avec le soutien institutionnel des Laboratoires Pfizer

 YVONNE EVRARD

Source : Le Quotidien du Médecin: 8849