Cela fait maintenant plusieurs années que les urgences pédiatriques se sont imposées comme une spécialité à part entière. « Et cela s’est traduit dans plusieurs pays, en particulier les États-Unis, par la mise en place d’une surspécialité diplômante. En France, on suit la même évolution avec la création récente de la formation spécialisée transversale (FST) urgences pédiatriques. Elle s’adresse aux internes de pédiatrie ou de médecine d’urgence. La première promotion a commencé sa formation ce mois de novembre, explique le Pr Ricardo Carbajal, chef des urgences pédiatriques de l’hôpital Armand Trousseau à Paris en soulignant la nécessité de reconnaître les spécificités des urgences pédiatriques. Ce n’est pas parce qu’on est pédiatre qu’on va obligatoirement savoir gérer les différentes urgences pédiatriques. Nous prenons en charge des pathologies qui, bien sûr, le sont aussi dans les services de pédiatrie. Mais l’approche est différente dans un contexte d’urgence et on ne gère pas de la même façon une arrivée massive de bronchiolites, crises d’asthme ou gastro-entérites, par exemple. Il y a donc la nécessité d’avoir un bagage de compétences tout à fait spécifiques ».
Travailler aux urgences pédiatriques demande aussi une compétence affirmée dans la maîtrise de certains gestes techniques devant être réalisés rapidement à tout moment du jour ou de la nuit. « On peut citer le maniement des voies aériennes, les ponctions lombaires ou les perfusions intra-osseuses. Et aujourd’hui, la formation repose largement sur des exercices de simulation très utiles dans ce domaine », indique le Pr Carbajal.
Un flux continu de patients
Une autre évolution importante a aussi été l’autonomisation des structures d’urgences pédiatriques. « Il reste encore du travail à faire car beaucoup d’hôpitaux n’ont pas pu – ou pas souhaité – donner une plus grande autonomie à ces structures. Mais c’est une évolution inéluctable », indique le Pr Carbajal,
Les urgences pédiatriques doivent aussi apprendre à bien gérer le flux de patients, toujours très important. « L’enjeu est de mobiliser au mieux l’expertise paramédicale et médicale pour assurer un tri clinique le plus pertinent possible et pour donner un temps d’intervention le plus adapté à chaque situation. C’est crucial lorsqu’on a des temps d’attente parfois de 4 à 8 heures », indique le Pr Carbajal. Trois types de situations se présentent : les consultations simples, les urgences vitales et les urgences ressenties. « Là encore, c’est une spécificité importante de la pédiatrie. Un enfant de 4 mois qui a 39 °C ou 40 °C de fièvre, cela affole les parents. Tant qu’on n’a pas fait une évaluation clinique de l’enfant, on ne peut pas savoir s’il s’agit d’une urgence ressentie, ou réelle », explique le Pr Carbajal.
Un rôle de protection de l’enfance
Mais les urgences pédiatriques n’ont pas uniquement un rôle médical à assumer. « Nous recevons de plus en plus de patients en état de forte précarité pour lesquels le problème médical se révèle moins grave que le problème social. C’est une évolution de notre société (lire p. 30). Dès qu’il y a une urgence sociale, le réflexe est souvent d’adresser la personne aux urgences, qui restent ouvertes jour et nuit. Une autre de nos missions est le repérage des situations de maltraitance (lire p. 25). Là aussi, cela demande une compétence spécifique qui a été un peu oubliée et négligée jusqu’à il y a peu de temps. Rien que dans notre service, on doit bien voir une centaine de cas de maltraitances par an et nous ne les détectons certainement pas tous ».
Exergue : Ce n’est pas parce qu’on est pédiatre qu’on va obligatoirement savoir gérer les différentes urgences pédiatriques
Entretien avec le Pr Ricardo Carbajal (Paris)
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