Prenant modèle sur la NASA et l’industrie aérospatiale, une équipe spécialisée en chirurgie cardiaque pédiatrique a recensé les erreurs survenant au cours de ces interventions chirurgicales à haut risque. L’équipe plaide pour mieux gérer les menaces et les erreurs afin d’améliorer la sécurité pour les patients.
Dans les années 70, des chercheurs de la NASA ont réalisé que deux tiers des accidents d’avion étaient imputables à des erreurs humaines. Depuis, les recherches menées sur plus de 30 000 vols ont confirmé que l’erreur est inévitable et omniprésente, et que dès lors elle doit être comprise et correctement gérée. De fait, une erreur mal gérée déclenche des cycles d’erreurs qui réduisent les marges de sécurité. En s’appuyant sur cette expérience de situations menaçantes et d’erreurs, la NASA et la FAA (Federal Aviation Administration) ont mis au point un « Modèle de menace et d’erreurs ».
Le trajet périopératoire = le vol
Une équipe canadienne a maintenant appliqué ce modèle au sein de leur service pédiatrique de chirurgie cardiaque à l’hôpital des Enfants malades de Toronto.
« Nous avons considéré le trajet périopératoire de chaque enfant comme un "vol". Nous l’avons surveillé en temps réel dans le but d’identifier les erreurs. Nous avons ensuite appliqué un modèle d’erreurs humaines qui est utilisé par la NASA, la FAA et les compagnies aériennes », explique au « Quotidien » le Dr Edward Hickey.
Les résultats des premiers 500 enfants (524 « vols ») admis pour une intervention chirurgicale (avec circulation extracorporelle dans 85 % des cas) ont été présentés à l’occasion du congrès annuel de l’American Association for Thoracic Surgery (AATS).
Le Dr Hickey met en avant plusieurs constats édifiants :
– les « menaces » sont très fréquemment rencontrées par les équipes chirurgicales, puisqu’elles surviennent chez plus de 75 % des patients ;
– les erreurs sont fréquentes, survenant chez 50 % des patients ;
– la majorité des erreurs (66 %) a une répercussion clinique – elles ne sont pas bénignes ;
– lorsqu’une erreur a des conséquences, les équipes médicales réussissent à contrôler la situation dans environ 40 % des cas ;
– dans les 60 % restants (soit 20 % des patients), l’erreur non bénigne déclenche un « cycle » d’erreurs supplémentaires et d’états cliniques indésirables ;
– de tels « cycles » sont extrêmement dangereux et sont associés a des taux élevés de problèmes cardiaques résiduels, de lésion cérébrale et de décès. Presque tous les décès (85 %) suivent des cycles d’erreurs maintenues.
Atterrissage forcé
« Nousdevons adopter des techniques de gestion d’erreurs comme celles utilisées par les autres industries à haut risque », propose le Dr Hickey. « Tous les pilotes de l’air, par exemple, reçoivent un entraînement obligatoire (Gestion des ressources de l’équipage, ou CRM) de façon à fonctionner correctement en situations de crises fortement dégradées. Le CRM met l’accent sur la bonne utilisation des ressources, la répartition des rôles, la coordination, la communication et la priorisation (maximiser les marges de sécurité ; puis résoudre le problème). »
« Des techniques excellentes de CRM étaient clairement évidentes lors de l’atterrissage forcé sur l’Hudson River (ou tout le monde a survécu), tandis que ce n’était pas le cas pour la catastrophe du vol AF 447. Nous pensons que les hôpitaux qui imitent les industries à haut risque (soins de santé de style entreprise) sont plus susceptibles de contrôler et d’atténuer l’erreur. »
94e Congres annuel de l’AATS, Toronto, 28 avril 2014, Hickey et coll.
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