DÉNÉGATION. Refus. Les deux maîtres attitudes auxquelles se trouve confronté le médecin face à son patient chez qui la soixantaine a altéré l’audition. Dès lors, comment lui faire reconnaître qu’une presbyacousie s’est installée insidieusement et lui faire accepter un appareillage, seul palliatif. Sur ces deux points, le Pr Bruno Frachet (chef du service d’ORL au CHU Avicenne, Bobigny), fortement impliqué dans la prise en charge des surdités, a recours à divers moyens.
« Le généraliste doit être alerté par de petits signes, en consultation. » Le patient peut rapporter ne pas bien comprendre ce qu’il entend. Ce que peut être aussi un conjoint qui s’exaspère de la mal audition de son partenaire. Ce peut être aussi le médecin qui constate qu’un patient lui fait répéter les noms propres, les chiffres…
La suspicion du déficit auditif peut alors se confirmer à partir questions simples : « Êtes-vous gênés pour comprendre au cours des repas familiaux ou par le bruit de fond des supermarchés ? » ; « Le bruit vous gêne-t-il ? » ; « Comprenez-vous le présentateur à la télé, mais mal les dialogues des films ? » ; « Ces questions servent à mettre en évidence le symptôme clé : la baisse de l’intelligibilité de la parole dans le bruit. Pour la tester, on peut parler à son patient en empêchant la lecture labiale, par exemple en se masquant la bouche de la main, ou en se penchant. »
Reste à expliquer la situation au patient. Dénégation. Puis à évoquer l’appareillage. Refus. « Donc plutôt que d’affirmer le besoin d’une aide auditive, mieux vaut lui demander s’il ne pense pas avoir besoin d’un aide auditive. En ajoutant que ce n’est pas facile au début, mais que depuis dix ans les progrès sont considérables. On peut alors proposer un essai et envisager une consultation d’ORL. »
L’essai d’un appareil doit être mené dans des conditions de vie courante, quotidiennes afin de voir si le patient en tire bénéfice. « C’est seulement s’il constate les avantages de l’appareillage que le patient pourra évaluer son propre rapport bénéfice/inconvénients. »
Ces conseils, les médecins le savent, peuvent ne pas suffire. Aussi, à des fins de dépistage et de sensibilisation, deux actions ont été mises en place par des ORL associés à des industriels de l’appareillage auditif. La première est un autobus, l’Audiobus, qui a circulé en France, elle a été suivie de la mise en place d’un test téléphonique automatisé (lire encadré).
L’autobus, en 60 étapes, a reçu tous ceux qui voulaient parler de leur audition. Dans le car, 10 personnes étaient là pour recevoir et expliquer. « Il ne s’agit en aucune façon d’une démarche mercantile, insiste Bruno Frachet, ce qui amenait, après le dépistage, à suggérer de prendre l’avis du médecin traitant. Il n’y avait pas de test de prothèse, pas de consultation. Nous avons beaucoup appris sur les personnes sourdes, dans une relation de simplicité hors du cabinet médical. Nous avons également pu tirer des données épidémiologiques sur la surdité dans la population, sur les conséquences de la précarité quant à la possibilité d’appareillage. Malheureusement cette expérience, commencée en 2006, a été arrêtée en 2008 pour une raison matérielle simple : chaque étape revenait à 7 000 euros. »
Trois sites à consulter : www. audiobus.fr ; www.francepresbyacousie.fr ; www.1-test.fr
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