LES PATIENTS schizophrènes présentent des symptômes positifs (hallucinations, idées délirantes…), mais aussi des déficits cognitifs sévères comme la perte du contrôle de la réalité. Le contrôle de la réalité est la capacité à distinguer la source d’une information générée par le « soi » d’une information générée par « l’autre », autrement dit à distinguer le « monde intérieur » de la « réalité extérieure ».
Dans les tests du contrôle de la réalité, l’aptitude des sujets normaux à distinguer leurs mots propres des mots présentés par quelqu’un d’autre (« je me souviens avoir créé ce mot », versus « je me souviens que vous me l’avez montré ») est fortement liée à la capacité des personnes à reconnaître les visages et identifier les émotions faciales et vocales. Elle est aussi associée à l’activation du cortex préfrontal médian (mPFC), une région qui supporte la cognition auto-référentielle. Les patients schizophrènes font des erreurs sur ces tests, et même lorsque la performance est exacte, ils montrent une sous-activation du mPFC. De plus, dans la schizophrénie, ces déficits du contrôle de la réalité sont associés à des déficits cognitifs dans les domaines de l’attention, de la mémoire, de la fonction exécutive et dans l’évaluation des signaux sociaux comme l’émotion du visage.
Un besoin pressant.
« Bien qu’il existe des médicaments qui réduisent les symptômes cliniques de la schizophrénie, les médicaments actuels n’améliorent pas les déficits cognitifs. De plus, la psychothérapie conventionnelle ne s’est pas révélée efficace, et il existe un besoin pressant de nouvelles stratégies thérapeutiques », souligne le Dr Sophia Vinogradov (Université de San Francisco) qui a dirigé ce travail.
Dans une étude publiée dans « Neuron », Subramaniam et coll. ont exploré une stratégie d’entraînement cognitif.
« Nous avons prédit que pour améliorer des fonctions cognitives complexes dans la maladie neuropsychiatrique, il nous faut d’abord cibler les déficits dans les processus perceptifs de niveau inférieur ainsi que dans la mémoire de travail et les processus cognitifs sociaux », précise le Dr Nagarajan.
Les chercheurs ont donc développé un programme d’entraînement cognitif comprenant des exercices auditifs pendant dix semaines (1 heure par jour avec un total de 50 heures), puis des exercices visuels (1 heure par jour avec un total de 30 heures) combinés à des exercices d’identification des émotions (15 minutes par jour avec un total de 10 heures) pendant six autres semaines.
Dans une étude randomisée, les patients schizophrènes (n = 31) ont été affectés soit à 80 heures d’entraînement cognitif informatisé soit à 80 heures de jeux informatiques (sur seize semaines).
Les résultats sont nets. Les patients schizophrènes qui ont reçu l’entraînement cognitif montrent une amélioration du contrôle de la réalité qui est associée à une activation accrue du mPFC.
En revanche, les patients affectés aux jeux informatiques ne montrent aucune amélioration comportementale ou neurale.
De plus, la restauration de l’activité du mPFC après l’entraînement est associée à un meilleur fonctionnement social six mois plus tard.
Pas immuable.
« Notre étude est la première à démontrer que, pour les patients schizophrènes, un entraînement des processus cognitifs élémentaires se généralise à une opération d’ordre supérieur et entraîne une amélioration des substrats neuraux », notent les chercheurs.
« Ainsi, il est possible d’améliorer significativement la fonction cérébrale dans la schizophrénie, même lorsque les patients ont été malades pendant une moyenne de vingt ans. »
« Ce travail de recherche élève la probabilité que les troubles neuraux dans la schizophrénie, et certainement dans d’autres maladies neuropsychiatriques, ne sont pas fixés de manière immuable, mais peuvent être sensibles à une intervention bien conçue qui cible la restauration du fonctionnement neural », concluent les auteurs.
Subramaniam et coll., Neuron (Cell Press) 23 février 2012.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024