La mise en œuvre des campagnes vaccinales contre le Covid-19, dans un contexte d’approvisionnement restreint et d’inquiétudes quant à des cas rares de caillots sanguins après la vaccination, s’est traduite par une adaptation des schémas vaccinaux.
En France notamment, l’intervalle entre deux doses du vaccin ChAdOx1 nCoV-19 (AstraZeneca/Oxford) a été porté de 9 à 12 semaines, tandis qu'un schéma vaccinal mixte associant une dose d’AstraZeneca et une du vaccin à ARNm de Pfizer/BionNTech ou de Moderna a été mis en place à la suite de la restriction d'utilisation du ChAdOx1 nCoV-19 aux 55 ans et plus. Plusieurs études se sont attachées à documenter l’efficacité de ces schémas modifiés et semblent confirmer leur bien-fondé.
Une 3e dose d'AstraZeneca, utile face aux variants ?
Dans une prépublication du « Lancet », des chercheurs de l’université d’Oxford se sont ainsi penchés sur le report de la 2e dose du vaccin d’AstraZeneca/Oxford. Des travaux avaient précédemment établi le bénéfice d’un intervalle de 3 mois entre les deux injections, comparé à un intervalle de 6 semaines. Cette fois, les chercheurs démontrent que les 30 participants qui ont reçu une 2e dose tardive (en médiane à 44 semaines après la 1re dose) avaient des titres d’anticorps plus élevés. Les titres médians d'IgG s’établissaient ainsi à 923 pour un intervalle de 8 à 12 semaines, à 1 860 pour 15 à 25 semaines et à 3 738 pour 44 à 46 semaines. « Ces données sont importantes pour les pays où l'administration d’une 2e dose est retardée en raison d’une pénurie d'approvisionnement », est-il souligné.
Les auteurs ont également évalué l’efficacité d’une 3e dose du vaccin AstraZeneca/Oxford chez 90 sujets. Comparé à un groupe de 75 personnes ayant reçu deux doses à un intervalle de 8 à 16 semaines, le groupe ayant reçu une 3e dose affichait des taux d'anticorps « significativement plus élevés » (les titres des IgG étaint en médiane à 216 à J +28 après une 2e dose et à 3 746 à J +28 après une 3e dose). Une 3e injection offrait également une meilleure protection contre les variants Bêta (B.1.351, dit « sud-africain »), Alpha (B.1.1.7, dit « britannique »), et Delta (B.1.617.2, dit « indien »). Enfin, « les réponses des cellules T ont également été amplifiées après une 3e dose », est-il relevé.
Une autre étude, présentant les résultats de l’essai britannique Com-COV, prépubliée dans « The Lancet », s’est intéressée à l’efficacité d’un schéma vaccinal hétérologue, combinant une dose de vaccin AstraZeneca/Oxford (ChAd) et une de Pfizer/BioNTech (BNT) ou l’inverse. Les 830 participants (âgés en moyenne de 57,8 ans, 45,8 % de femmes, 25,3 % appartenant à des minorités ethniques) ont été randomisés dans huit schémas différents à deux doses : ChAd/BNT, BNT/ChAd, BNT/BNT, ChAd/ChAd, à 28 ou à 84 jours d’intervalle*.
Des schémas hétérologues pour plus de flexibilité
La concentration géométrique moyenne des IgG chez les receveurs ChAd/BNT (12 906 ELU/ml) « n'était pas inférieure à celle des receveurs ChAd/ChAd (1 392 ELU/ml) », relèvent les auteurs. Mais, chez les participants amorcés avec BNT, « nous n'avons pas réussi à montrer la non-infériorité du calendrier hétérologue (BNT/ChAd, GMC 7 133 ELU/ml) par rapport au calendrier homologue (BNT/BNT, GMC 14 080 ELU/ml) », poursuivent-ils, relevant que si le schéma BNT/ChAd ne répond pas aux critères de non-infériorité, les concentrations d’anticorps des deux schémas hétérologues « étaient supérieures à ceux d'un schéma vaccinal homologué (ChAd/ChAd) avec une efficacité prouvée contre le Covid-19 ».
Des résultats encourageants ont également été obtenus par une équipe espagnole. Dans une étude publiée dans « The Lancet », les chercheurs ont évalué l’immunogénicité et la réactogénicité d’un schéma combinant une dose du vaccin d’AstraZeneca/Oxford, suivie entre 8 et 12 semaines par une dose du vaccin Pfizer/BioNTech. Au total, 676 participants (âge moyen de 44 ans, 57 % de femmes), sans antécédent d’infection au SARS-CoV-2, ont été recrutés, dont 450 ont bénéficié du schéma mixte, les autres n'ayant reçu qu'une dose d'AstraZeneca. Ce dernier « a induit une réponse immunitaire robuste, avec un profil de réactogénicité acceptable et gérable », rapportent les auteurs.
Dans un commentaire associé à l’article, l’intérêt et les bénéfices d’introduire des schémas hétérologues dans les campagnes vaccinales sont exposés. D’un point de vue logistique d’abord, la flexibilité offerte peut permettre de répondre aux fluctuations des approvisionnements. D’un point de vue clinique, « les régimes hétérologues ont également le potentiel de produire une réponse plus forte, conduisant ainsi à une plus grande efficacité », estiment les auteurs, pointant également l’espoir d’une efficacité face aux variants. Des recherches supplémentaires restent nécessaires, notamment « des essais de phase 3 à grande échelle incluant la vaccination homologue comme comparateur et d'autres études d'observation », concluent-ils.
* D’autres résultats, issus de cet essai et portant sur un intervalle de 12 semaines entre les deux injections, devraient être disponibles prochainement.
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