13 novembre 2015, 18 h. « Nous nous croisons, Lola et moi, devant la piscine de la butte aux cailles, proches de nos lieux de travail respectifs dans le 13e arrondissement, sa maison d’édition et le Laboratoire d’hygiène de la ville de Paris (le Dr Salines, médecin de santé publique, est chef du bureau de la santé environnementale et de l’hygiène de la ville de Paris - NDLR). Nous échangeons un salut sans savoir que c’est un adieu ».
1 h du matin. « L’un de mes fils (avocat - NDLR) m’appelle après l’assaut donné au Bataclan, il tentait de joindre sa sœur depuis 3 heures. Plongé dans mes lectures, j’ignorais alors tout des événements. »
5 h du matin. « Alors que nous croulons sous les messages de sympathie, après avoir lancé des appels sur Tweeter et FaceBook, avec un message qui nous dit que Lola est en sécurité, nous arrivons enfin à joindre les urgences à l’AP-HP ; on nous demande les prénom, nom, date de naissance de Lola, elle ne figure pas sur les listes mais beaucoup de blessés ne sont pas encore identifiés, on nous rappellera. »
Jusqu’à 17 h, « Nous appelons et rappelons partout, La Pitié, les hôpitaux militaires de Bégin et Percy, Delafontaine, Créteil. À l’IML, on nous demande d’attendre le passage de la cellule d’identification de la PJ, peut-être cet après-midi, peut-être demain. Nous n’allons pas à l’École militaire où sont regroupées des familles, en l’absence de renseignement sur le site. Mais nous allons à l’HEGP (Hôpital européen G. Pompidou) où nous avons appris que beaucoup de blessés du Bataclan sont pris en charge. Alors que tous ont été identifiés, Lola n’est pas sur les listes. C’est à ce moment-là que nous commençons à perdre espoir. »
17 h 30. « La cellule interministérielle d’aide aux victimes nous appelle sans nous donner de nouvelle définitive. »
18 h . « Appel de l’IML qui demande à ma femme (le Dr Emmanuelle Salines est médecin à la GGS) de donner une description de Lola. Ma femme est choquée. Plus tard, nous apprendrons par la PJ que Lola avait gardé ses papiers sur elle ».
18 h 05. « La brigade d’investigation de la PJ nous annonce le décès. Pour d’autres familles, c’est bien pire. Pendant plusieurs jours des séquences épouvantables se multiplient : des familles ont veillé des corps qui n’étaient pas ceux de leurs proches, une mère, dans un tel état de choc, a dit reconnaître son fils, alors que ce n’était pas lui. » « Comme disent les chirurgiens après une intervention qui a mal tourné, c’est foiré ! »
9 janvier 2016. « Réunion au siège de la FENVAC* d’une vingtaine d’impliqués, blessés et endeuillés. On élit un conseil d’administration, qui désigne un bureau. Et qui m’élit président, alors que j’avais proposé quelqu’un d’autre. Mon expérience de médecin de santé publique, en médecine de catastrophe et aussi en media-training, me conduit à accepter, en attendant l’AG qui devra se tenir dans trois mois. »
18 janvier. « Nous apprenons qu’une réunion de retour d’expérience est programmée au ministère de la santé et demandons à y participer. L’accord est immédiat, mais j’aurais préféré qu’on nous appelle plutôt que d’avoir à quémander. C’est quand même le sens de l’histoire d’associer les usagers à ces travaux. »
20janvier. Marisol Touraine reçoit le Dr Salines avec les responsables de tous les services dans le cadre du RETEX (retour d’expérience) sur les attentats. Quand la ministre rend hommage à « l’excellence de notre système de santé » et souligne que la mobilisation de tous n’a connu « aucune faille », le président de « 13 novembre, fraternité et vérité » tousse. « Je ne mets pas en cause le dévouement remarquable de tous les acteurs, mais les structures qui ont mal coordonné les bonnes volontés. » (voir encadré).
21 janvier. Christiane Taubira dresse à son tour un bilan de la prise en charge des victimes. Elle auditionne le Dr Salines dans les locaux de l’association Paris aide aux victimes. Il plaide pour la possibilité pour une association de victimes d’attentat de se constituer partie civile. Un statut qui conditionne l’accès aux dossiers, essentiel pour participer aux retours d’expériences.
« Être dans l’action après un drame, confie encore le Dr Salines, c’est à double tranchant : c’est une aide pour tenir le coup, mais encore faut-il faut arriver à suivre le rythme. »
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