LES RECOMMANDATIONS de pratiques cliniques (RPC), publiées en 2005 par le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF) relatives à l’épisiotomie, plaident pour une restriction de cette pratique. Elles ne reconnaissent plus d’indication systématique, « l’analyse de l’accoucheur restant prépondérante ». Un taux inférieur à 30 % des accouchements par voie basse est préconisé.
« Suite à ces RPC, notre service a radicalement modifié son attitude », expliquent les praticiens du service de gynécologie-obstétrique du CHU de Caen*.
Une première évaluation interne sur la pratique de l’épisiotomie en 2004 et en 2006, a montré un net recul : 54,2 % versus 22,7 %, sans induire pour autant de morbidité maternofœtale évidente.
Partant de ces bons résultats, cette évaluation initiale a été prolongée, dans l’objectif de « déterminer l’impact de la politique plus restrictive de l’épisiotomie des RPC de 2005, sur la prévalence des épisiotomies et sur les conséquences périnéales maternelles. »
Le service publie son étude dite d’évaluation non expérimentale, type « avant-après », rétrospective, portant sur la période de janvier 2004 à décembre 2009, dans cette maternité universitaire de niveau 3.
Pendant cette durée, il y a eu 19 208 patientes qui ont accouché, dont 79,25 % par voie basse spontanée et 20,75 % par voie basse assistée d’une extraction instrumentale (EI, essentiellement par ventouse). On observe une chute significative (p ‹ 0,01) du taux global d’épisiotomies, qui est passé de 55,7 % à 13,3 %. Cette diminution a été observée chez les primipares comme chez les multipares, que la voie basse ait été spontanée ou assistée d’une EI. Lors d’une EI, une épisiotomie était réalisée dans 87 % des cas en 2004 contre 35,5 % des cas en 2009 (p ‹ 0,01). Le taux des épisiotomies a été divisé par 10 chez les multipares accouchant de manière spontanée et par 2,5 chez les primipares avec assistance par EI.
Déchirures vaginales ou périnéales simples, éraillures des petites lèvres.
Quelles ont été les conséquences de cette réduction des épisiotomies ? Les taux des lésions mineures, sans conséquences fonctionnelles : déchirures vaginales ou périnéales simples, éraillures des petites lèvres (dites du premier et deuxième degré dans la classification anglo-saxonne), a augmenté de manière significative, de 27,1 % en 2004 à 63,9 % en 2009 (p ‹ 0,01). Mais le taux de lésions périnéales sévères, définies par la présence d’une atteinte sphinctérienne (classées comme des déchirures de troisième et quatrième degrés selon la classification anglo-saxonne) a légèrement baissé, sans que ce soit significatif : 1,3 % en 2004 et 1,1 % en 2009.
En parallèle, le taux de périnées intacts a significativement augmenté, de 17,6 % à 21,7 % (p ‹ 0,01), notamment dans les EI.
« Nos taux ne se sont pas réduits en 2007 et 2008 (20 %), contrairement à certains résultats publiés dans la littérature », indiquent les auteurs. « Nous estimons que le retour de l’information aux praticiens a un impact réel sur leur pratique quotidienne. Ainsi, une relance de l’information fin 2008, a produit une nouvelle décroissance du taux d’épisiotomies, alors qu’il tendait à réaugmenter. »
Poursuivre les efforts, notamment en cas d’extraction instrumentale.
Ainsi, une des voies de l’amélioration peut être la rétro-information personnalisée anonymisée. Donner à chaque professionnel son taux d’épisiotomies, et la possibilité de consulter le taux anonymisé des autres professionnels, comme cela a été fait en 2008, a eu pour effet une réduction du taux global d’épisiotomies.
Ces résultats donnant une image de la réalité d’un service hospitalier, attestent que l’on peut réduire le taux d’épisiotomies sans accroître le nombre des lésions périnéales sévères. « Nos efforts doivent être poursuivis, notamment lors des accouchements avec EI, pratiqués uniquement par les obstétriciens. » Toutefois, si ces résultats qui sont en accord avec les RPC françaises, sont encore loin des conclusions récentes de l’« Evidence Based Medicine », selon lesquelles la pratique de l’épisiotomie devrait être évitée, notent les auteurs
* D. Reinbold, C. Eboue, R. Morello, N. Lamendour, M. Herlicoviez et M. Dreyfus, dans le Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction, vol. 41, février 2012.
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