Rester jeune et actif ! Aujourd’hui, les seniors n’ont pas le choix, ils doivent travailler plus longtemps. Cette injonction sociétale et politique s’accorde parfois mal avec les réalités de santé, les trois quarts des plus de 65 ans souffrant d’une maladie chronique. Notre dossier détaille pour chaque pathologie les enjeux de la prévention primaire et secondaire afin d’accompagner les jeunes seniors.
La retraite, qui est au cœur de notre actualité sociale, fait – comme souvent – écho à notre espérance de vie. Avec cet adage que l’on entend fréquemment de la part de nos dirigeants : « Puisque l’on vit plus longtemps, il est normal d’augmenter l’âge du départ à la retraite ». Pour les Français, et surtout pour les seniors, la préoccupation n’est pas tant l’espérance de vie en elle-même que la période sans incapacité. Un sondage* de 2018 révèle que 62% des plus de 55 ans ont peur de vieillir en mauvaise santé.
à la naissance, l’espérance de vie sans incapacité, établie par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), se situe aux alentours de 63-64 ans selon les sexes. Cet indicateur se base sur des données démographiques et une enquête de l’Insee sur la limitation dans l’activité quotidienne (depuis au moins 6 mois suite à un problème de santé) d’une population étudiée par classe d’âge. « Il ne permet pas d’avoir d’élément tangible pour juger de l’état de santé de ces personnes », précise Thomas Deroyon de la Drees. Autrement dit, cette analyse porte sur des sujets en bonne santé ou qui peuvent avoir une pathologie, mais sans en ressentir des conséquences fonctionnelles ou algiques.
Mais ce qui intéresse davantage les seniors et les personnes partant à la retraite est l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans. Elle atteint 11,2 ans pour les femmes, et 10,1 ans pour les hommes, et a gagné plus d’un an dans les deux sexes depuis 2008. Ce gain prouve une meilleure prise en charge et prévention (primaire et secondaire) des pathologies pouvant affecter cette population, grâce à des actions de terrain orchestrées par différents acteurs de santé. Les trois quarts des Français de plus de 65 ans souffrent d’une maladie chronique (Inserm, 2019).
Évaluer la vulnérabilité
En illustration, la consultation de prévention seniors, mise en place en 2018 au CHU de Rouen par le Dr Caroline Levasseur : « Cette consultation répond à la priorité de la stratégie nationale de santé 2018-2022 visant à améliorer la prévention tout au long de la vie, dans tous les milieux sociaux, en sensibilisant les seniors en bonne santé apparente. » Le profil type de la personne consultant est un citoyen (ici, on ne parle pas de « patient ») généralement de plus de 60 ans, qui ne se considère pas malade (même s’il peut être porteur d’une pathologie), pour faire un état des lieux de sa santé. « Notre consultation a la particularité de se situer souvent sur la “vulnérabilité”, en amont de la fragilité », se plaît à dire le Dr Levasseur. Un courrier est systématiquement adressé au médecin traitant, même si le « citoyen » n’est pas adressé par lui, en indiquant les éventuelles fragilités identifiées et les axes d’amélioration.
à cet âge, ce bilan de prévention est essentiel vis-à-vis d’une perte d’autonomie. « Tout médecin qui entre dans ce type de démarche doit repérer les signes de fragilité. Cela peut-être un symptôme aussi simple qu’un déficit auditif risquant d’être à l’origine d’un isolement, voire d’une dépression. Car la fragilité peut être réversible », argumente le Dr Levasseur.
* sondage à l’occasion du lancement de la plateforme Silverpro.fr