D’ABORD développé aux États-Unis dans les années 1970, le dépistage néonatal de la drépanocytose(DNN) a prouvé son efficacité. La prise en charge précoce de la maladie a permis de faire chuter la mortalité chez l’enfant drépanocytaire de moins de 5 ans d’un facteur 10. Sur la base de cette expérience, le DNN a été développé, à titre expérimental, aux Antilles à partir de 1981 avant d’être étendu à la France métropolitaine. Depuis 2000, la France dispose d’un dépistage national de la drépanocyose organisé par l’Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) et financé par la Ciasse nationale d’assurance maladie des travailleurs (CNAMTS). Le DNN de la drépanocytose s’est ajouté aux autres dépistages réalisés à la 72e heure de vie grâce au prélèvment capillaire au talon comme ceux de la phénylcétonurie mis en place en 1972, de l’hypothyroïdie congénitale (1978), de l’hyperplasie congénitale des surrénales (1995), de la mucoviscidose (2002). S’il est réalisé de manière systématique à tous les nouveau-nés dans les départements d’Outre-mer, en métropole, Il « a pour particularité de n’être effectué que chez les nouveau-nés dont les parents appartiennent à un groupe à risque pour cette maladie, soit essentiellement les parents originaires d’Afrique subsaharienne, des Antilles et du Maghreb », précisent Josiane Bardkdjan-Michau et Michel Roussey dans le « BEH ».
Incidence stable.
En 2010, 292 041 nouveau-nés ont bénéficié du dépistage (253 466 nés en métropole et 38 575 dans les DOM). Le DNN a permis de repérer 409 syndromes drépanocytaires majeurs dont 341 en métropole. En métropole, 31,5 % (19 % en 2000) des nouveau-nés ont été ciblés avec une répartition « très hétérogène », le pourcentage allant de 5,5 % en Bretagne à 60 % en Île-de-France. Longtemps considérée comme une maladie exotique, la drépanocytose « est devenue la première maladie dépistée en fréquence », soulignent les auteurs. Son incidence dans la population dépistée, relativement stable entre 2006 et 2010 (1/743 en 2010), reste particulièrement élevée dans les DOM, avec par ordre décroissant la Guyane (1/227), la Guadeloupe (1/297), la Martinique (1/343), Mayotte (1/633) et, loin derrière, la Réunion (1/4 5551).
Le DNN de la drépanocytose permet aussi de repérer les hétérozygotes. Même ces nouveau-nés « ne sont pas malades et n’ont aucun bénéfices direct à avoir été dépistés » : 8 900 enfants de génotypes AS et 2 092 de génotype AC ont ainsi été identifiés en 2010. « Il est légitime que que les familles soient informées de ce résultat, même si cette annonce entraîne parfois une inquiétude », estiment les auteurs. Les parents ont alors le choix ou non de réaliser une étude génétique. « Une information et un conseil génétique bien compris peuvent permettre à un couple de porteurs du trait S, dépisté secondairement au dépistage du nouveau-né, de choisir d’avoir un autre enfant mais en connaissance du risque », soulignent-ils. Or ce type d’information reste hétérogène et il n’existe pas d’enquête permettant de savoir si elle est réellement donnée. Actuellement, au moins 70 % des parents qui ont eu un enfant atteint n’avaient pas connaissance du risque.
Généralisé ou ciblé ?
L’utilité et l’efficacité du dépistage ne font plus de doute. Un débat susbsiste cependant entre dépistage généralisé et dépistage ciblé. Plusieurs études s’accordent sur le fait qu’un dépistage systématique réalisé dans des régions à faible incidence de drépanocytose reviendrait plus cher, par malade dépisté, qu’un dépistage ciblé. Restent les questions éthiques. « Est-il possible de recourir à la seule notion d’origine géographique.ethnique pour évaluer un risque génétique ? », interrogent les auteurs. Primauté des règles éthiques ou préminence des considérations économiques ? Les auteurs soulignent que l’identification des « catégories ethniques » par l’observation, ou sur la foi des déclaration des intéressés, n’est pas suffisamment fiable (possibilité de manquer des enfants atteints). De plus, poser la question de l’origine des parents peut être difficile pour les services de maternité (perception de générer de la stigmatisation) et peut poser des problèmes d’équité dans le cadre d’un programme de santé publique. Des pays confrontés au problème comme les États-Unis ou le Royaume-Uni ont opté pour le dépistage systématique. Conscient de cette question, le ministère de la Santé a saisi en 2012 la Haute Autorité de santé afin d’étudier la faisabilité d’un déspistage appliqué à l’ensemble de la population.
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