LA GLOMÉRULONÉPHRITE extra-membraneuse (GEM), diagnostic le plus fréquent chez les adultes atteints de syndrome néphrotique, est caractérisée par la présence de dépôts immuns au niveau de la membrane basale glomérulaire. La forme idiopathique (85 % des cas) est généralement considérée comme une maladie auto-immune. La maladie a été associée aux allèles HLA-DR chez les Caucasiens. Et, il y a 2 ans, des anticorps circulants dirigés contre le récepteur phospholipase A2 de type M (PLA2R) ont été découverts chez 70 % des patients (New England Journal of Medicine, 2 juillet 2009). Cependant, sa base étiologique est mal comprise.
Dans 3 populations indépendantes.
Espérant identifier des facteurs de risque génétique, une équipe internationale a réalisé une étude génomique d’association. Stanescu et coll. ont évalué environ 243 000 variants SNP dans 3 populations indépendantes de patients atteints de glomérulonéphrite extra-membraneuse idiopathique (75 Français, 146 Néerlandais, 335 Britanniques). Ils ont été comparés à 2 338 sujets témoins de mêmes origines.
Une analyse combinant les données des 556 patients étudiés (398 hommes) identifie les plus fortes associations de la maladie avec l’allèle HLA-DQA1 (HLA-DQ alpha chain 1) sur le chromosome 6p21, et l’allèle PLA2R1 sur le chromosome 2q24.
Les risques des 2 allèles impliqués sont remarquablement similaires dans ces cohortes française, néerlandaise et britannique. En effet, les risques relatifs (RR) pour le variant HLA-DQA1 sont de 4,48, 3,76, et 5,33 respectivement, les risques relatifs pour le variant du PLA2R sont de 1,87, 2,27 et 2,10.
Le RR de GEM idiopathique augmente considérablement avec le nombre d’allèles à risque, atteignant presque 80 chez les personnes homozygotes pour les 2 allèles à risque.
Le développement d’autoanticorps.
« Il apparaît que le risque de GEM idiopathique est plus élevé avec l’allèle HLA-DQA1 qu’avec l’allèle PLA2R1, ce qui laisse supposer que l’allèle HLA-DQA1 pourrait faciliter le développement d’autoanticorps ciblant non seulement PLA2R1 mais aussi d’autres antigènes », proposent les chercheurs.
« Ces résultats n’établissent pas une causalité. Ils suggèrent fortement qu’une interaction entre des variants génétiques des protéines du système immunitaire et des composants glomérulaires forme la base du développement de la GEM idiopathique. Ils établissent un facteur déclenchant ou gâchette (le système immunitaire), une balle (autoanticorps anti- PLA2R1) et une cible (antigène glomérulaire). Toutefois, le lien causal entre la présence de l’allèle à risque HLA-DQA1 et les autoanticorps anti- PLA2R1 reste inconnu ».
Comme le remarque dans un éditorial le Dr Marten Segelmark (Université Lund, Suède), la GEM a une incidence annuelle de 1 cas pour 100 000 personnes, ce qui représente, pour une personne vivant en Occident et atteignant l’espérance de vie moyenne, un risque de 1 pour 1000 de développer cette maladie au cours de la vie. Pour une personne homozygote pour les 2 allèles, ce risque serait donc « à un niveau (de 80 pour 1 000) où le dépistage et des mesures préventives seraient utiles si des interventions efficaces devenaient disponibles, estime-t-il. Cette étude pourrait rediriger la recherche vers la découverte d’un traitement de cette maladie. »
« Nous avons identifié 2 gènes de prédisposition à la maladie : un gène de réponse immune HLADQA1 et le gène qui code pour l’antigène majoritaire PLA2R1 reconnu par les anticorps pathogènes, explique au "Quotidien" le Pr Pierre Ronco (Hôpital Tenon, Paris).L’implication clinique est la possibilité de prévoir le risque, 80 fois plus élevé quand les couples d’allèles à risque sont associés au niveau des 2 gènes, et de surveiller l’évolution grâce à la détection des anticorps anti-PLA2R1 dans le sérum. Nous envisageons de séquencer le gène PLA2R, à la recherche d’anomalies qui pourraient expliquer pourquoi PLA2R1 devient un antigène dans certaines circonstances, et de rechercher d’autres antigènes présentés par le gène de réponse immune HLADQ1. »
New England Journal of Medicine, 17 février 2011, Stanescu et coll. p 616 et 679.
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