DE NOTRE CORRESPONDANT
L’INTER-RELATION entre le gène de la protéine 5-HTT et les événements stressants de la vie dans le risque de dépression n’a jamais été entièrement clarifiée. Des chercheurs se sont intéressés, récemment, à un modèle d’analyse dit de « plasticité génétique » qui plaide en faveur d’un effet « croisé » entre les facteurs génétiques et les facteurs environnementaux, certains génotypes étant sensibles à l’influence du terrain tandis que d’autres ne le sont pas.
Les auteurs ont appliqué ce modèle croisé (crossover) à une étude portant sur un échantillon de population de 1 206 mères appartenant à la cohorte Fragile Families and Child Wellbeing Study (FFCWS). Une PPD a été diagnostiquée, durant la première année suivant la naissance d’un enfant, chez 17 % de ces femmes. Le facteur environnemental choisi a été le statut socio-économique (SES). Les mères à SES bas ont en effet un risque de dépression doublé par rapport à celles à SES élevé. Pour examiner l’influence des facteurs génétiques sur la PPD, deux polymorphismes ont été considérés : 5-HTTLPR et STin2 VNTR. Les allèles les plus couramment observés dans le polymorphisme 5-HTTLPR sont ceux à 14 répétitions, dits courts (S), et ceux à 16 répétitions, dits longs (L). L’allèle de type « S » est associé, plus volontiers que l’allèle « L », à des troubles mentaux, la dépression en particulier. En ce qui concerne le polymorphisme STin2 VNTR, les allèles les plus rencontrés sont ceux à 10 et 12 répétitions, l’allèle « 12 » étant plus couramment associé à la dépression que le « 10 ».
Le nombre d’allèles réactifs.
Pour quantifier l’interaction gène-environnement (GxE), l’équipe de Sara McLanahan a mesuré le nombre d’allèles 5-HTT « réactifs » (soit S et 12 pour les polymorphismes 5-HTTLPR et STin2 VNTR, respectivement), les prélèvements d’ADN salivaire étant effectués au 9e mois du suivi. Les chercheurs observent que chez les mères à zéro allèle réactif, le SES n’a pas d’impact significatif sur la PPD, tandis que le facteur environnemental à un effet négatif significatif sur la PPD chez celles ayant 3 à 4 allèles réactifs. Mais le risque de PPD « change de direction » en fonction du niveau d’éducation. Alors qu’en cas de SES bas, la présence de 3 à 4 allèles réactifs est associée à un risque élevé de PPD, c’est l’inverse en cas de SES élevé : le risque de PPD est minoré.
Les auteurs constatent aussi que cette relation croisée reste vraie quand ils considèrent l’interaction de chacun des polymorphismes (HTTLPR et STin2), pris isolément, avec le SES, et, qui plus est, que leur effet est additif. Ils se sont, par ailleurs, demandés si le niveau d’instruction des grands-parents, qui est un des indicateurs du SES, jouait un rôle dans l’association à la PPD. Ils découvrent qu’il existe une interaction significative entre le génotype 5-HTT de la mère et le niveau d’instruction de ses parents. Toutefois, d’autres considérations excluent que la composante héritée du SES soit la source principale des interactions GxE observées. Il faut ajouter que les résultats des chercheurs anglo-saxons ne varient pas en fonction de l’ethnie des participantes.
Cette étude, réalisée dans une large cohorte de mères américaines, apporte des arguments convaincants à l’existence d’une interaction croisée, plus complexe que ne le fait supposer le modèle classique de diathèse-stress, entre l’environnement socio-culturel et certains gènes sur le risque de dépression du post-partum. Il est intéressant de noter que cette interaction est renforcée lorsqu’on prend en compte les deux polymorphismes du gène 5-HTT ensemble. Il n’est pas impossible qu’on découvre l’intervention d’autres variants de ce gène, ou d’autres gènes du système sérotoninergique, dans cette forme d’interaction.
C Mitchell, S McLanahan et coll. Role of mother’s genes and environment in postpartum depression. Proc Natl Acad Sci USA (2011) Publié en ligne
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