La théorie du « tout génétique » n’a plus cours dans l’autisme. Une étude de la faculté Albert Einstein à New York enfonce le clou en apportant la preuve d’une piste épigénétique dès le stade embryonnaire. L’hypothèse environnementale dans l’autisme ne cesse de prendre de l’ampleur. Déjà, une étude suédoise chez des jumeaux parue dans le « JAMA » début mai annonçait que « l’héritabilité » ou la part génétique était en cause non pas dans 90 % des cas d’autisme mais dans 50 % seulement, la moitié restante étant liée à l’environnement.
Les chercheurs ont mis en évidence chez des sujets nés de mères âgées de ≥ 35 ans qu’il y avait davantage de méthylations anormales dans une sous-population de cellules progénitrices chez des autistes. Ces anomalies épigénétiques surviendraient précocement dans le développement embryonnaire au stade ectodermique. Comme le soulignent les auteurs, loin d’apporter des réponses et de clore le débat, la découverte de l’épigénétique alimente la réflexion sur l’autisme et ses causes. Ce phénomène de méthylation anormale peut être en rapport avec le vieillissement des gamètes parentaux mais aussi avec d’autres facteurs au cours de l’embryogénèse. À moins qu’il ne soit la conséquence des mutations des gènes régulant la chromatine, elles-mêmes très fréquentes chez les sujets autistes.
Un niveau de complexité qui tend vers l’infini
La compréhension de l’autisme pourrait atteindre un niveau de complexité plus élevé. C’est en substance ce qu’a expliqué le Pr Bruno Falissard, pédospychiatre à l’hôpital Robert Debré et chercheur INSERM, dans une tribune publiée cette semaine dans le quotidien « Le Monde ». Pour le pédopsychiatre, si la théorie du « tout génétique » a permis de se libérer « de décennies de pensée unique psychologisante », la réalité de l’autisme se situe bien au-delà « de cette vision parfois caricaturale de la génétique ». « La survenue d’interactions réciproques subtiles entre un nombre considérable de facteurs, les uns génétiques, les autres (...) environnementaux. Il n’est d’ailleurs pas exclu que le niveau de complexité potentiel de ce déterminisme soit tel que, même en incluant dans une étude l’ensemble des êtres humains de la planète, on manque encore d’informations pour estimer les paramètres des modèles ».
PLOS Genetics, publié en ligne le 29 mai 2014. JAMA, publié le 7 mai 2014
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