LA MISE en évidence de l’action de ce médicament fait suite à la découverte récente d’une anomalie moléculaire se traduisant par la formation du gène de fusion ALK, après une translocation chromosomique entre le domaine à activité tyrosine kinase d’ALK et d’autres gènes. Le gène de fusion ALK, identifié dans certains adénocarcinomes pulmonaires et localisé sur le chromosome 2 (2p23), code pour une enzyme spécifique à activité de type tyrosine kinase. Le réarrangement du gène ALK, retrouvé dans 3 à 5 % des cancers du poumon non à petites cellules (dont la grande majorité sont des adénocarcinomes), principalement chez des sujets jeunes, favorise la croissance tumorale. Les adénocarcinomes représentent une faible proportion (environ 5 %) des cancers pulmonaires, mais 20 % des adénocarcinomes surviennent chez des personnes qui n’ont jamais fumé ou ont arrêté de fumer depuis de nombreuses années.
« Le crizotinib (PF-1066), qui est administré sous forme orale, a pu être mis au point dans un délai record », indiquait le Pr Calvo (directeur de la recherche à l’INCA) interrogé par « le Quotidien ». « C’est le premier produit de cette nouvelle classe d’anticancéreux ». L’étude présentée à l’ASCO, une étude de cohorte étendue de phase I, a été conduite chez 76 patients à un stade avancé d’adénocarcinome pulmonaire. Les participants étaient des fumeurs ou d’anciens fumeurs et étaient porteurs du gène de fusion ALK.
On a enregistré, au bout d’une durée médiane de traitement d’environ six mois, un taux de 57 % de réponses partielles, soit, en d’autres termes, une régression d’au moins 30 % du volume tumoral dans toutes les localisations. Dans certains cas, on a observé des réductions de la taille tumorale de plus de 50 %. Les effets secondaires les plus fréquents sont représentés par des nausées et des vomissements.
Ces résultats sont qualifiés de très importants par les auteurs, dans la mesure où ils concernent une forme très sévère de cancer pulmonaire (dont la survie à cinq ans ne dépasse pas 10 %). « Nombre de ces patients avaient reçu auparavant trois lignes de chimiothérapie, voire davantage. Nous nous attendions à un taux de réponse avoisinant les 10 % », a précisé l’auteur principal, Yung-Jue Bang (National College of Medicine, Séoul, Corée). « Ces résultats représentent une avancée par rapport à ce qu’on peut espérer obtenir, actuellement, des chimiothérapies classiques utilisées chez les patients ayant un cancer au stade métastatique. »
« Les spécialistes ont bien pris note de ce résultat », poursuivait le Pr Calvo. « Les plateformes de génétique moléculaire en France sont capables de tester la combinaison génétique et d’identifier les patients susceptibles de bénéficier du traitement dès qu’il aura été approuvé par les agences pour les essais. »
Une étude de phase III randomisée, nommée PROFILE-1007, a d’ores et déjà été mise en route. Son objectif est de comparer les effets thérapeutiques du crizotinib à ceux d’une chimiothérapie standard de seconde ligne. Plus de 300 patients doivent être inclus dans ce nouvel essai.
« La découverte de cette anomalie génétique spécifique répondant à un traitement ciblé rappelle l’identification des mutations du récepteur du facteur de croissance épidermique EGFr, pour lequel un inhibiteur spécifique a été mis au point », rappelle le Pr Calvo.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024