DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA SUSCEPTIBILITÉ à une infection microbienne et l’évolution de l’infection dépendent de l’interaction entre l’organisme pathogène, les facteurs génétiques de l’hôte et les facteurs environnementaux.
La lèpre (ou maladie de Hansen), maladie infectieuse chronique due à Mycobacterium leprae, demeure un problème de santé publique majeur, notamment en Chine et en Inde. Cette maladie affecte la peau et les nerfs périphériques, provoquant des infirmités sévères.
La génétique des individus contribue grandement à leur susceptibilité à développer la lèpre, avec une héritabilité estimée à 57 %. Cependant ces facteurs génétiques ne sont pas bien connus ; de plus, l’absence de modèle animal et la difficulté à cultiver le bacille ont entravé la recherche pour comprendre les mécanismes sous-tendant la lèpre.
Il y a deux ans, Zhang et coll. identifiaient 6 loci de susceptibilité (CCDC122, LACC1, NOD2, TNFSF15, RIPK2, et le locus HLA-DR-HL-DQ) grâce à une étude d’association génomique dans la population chinoise (N Engl J Med, décembre 2009).
Puis Wong et coll., à l’issue d’une étude d’association génomique génocentrique dans la population indienne, ont identifié une association entre la lèpre et TLR1, HLA-DRB1 et HLA-DQA1(PLoS, 2010). Il était clair toutefois que de nombreux autres gènes de susceptibilité restaient à identifier.
Zhang et coll. ont maintenant élargi leur étude d’association génomique en reprenant leur précédente cohorte de 706 individus lépreux et 1 225 témoins, et en y ajoutant 4 367 autres témoins chinois.
Cette analyse a permis d’identifier une association avec 24 variants SNP situés dans 22 nouveaux loci, lesquels ont été examinés dans une étude de réplication chez 3 301 individus lépreux et 5 299 témoins chinois.
Récepteur pour l’IL23.
L’association a été confirmée pour des variants SNP dans deux nouveaux gènes de susceptibilité pour la lèpre : IL23R (chromosome 6q24) et RAB32 (chromosome 1p31).
Le gène IL23R encode un récepteur pour l’interleukine 23 (IL-23) qui intervient dans la même voie de signal que le produit d’un autre gène de susceptibilité à la lèpre, TNFSF15.
L’IL23R, avec la sous-unité bêta de l’IL12, fait partie des cascades IL12/IL-23 et IFN-gamma reconnues pour jouer des rôles essentiels dans la réponse immunitaire aux mycobactéries.
Le gène RAB32, de la superfamille Ras des protéines G de bas poids moléculaire, est requis pour la formation des vacuoles autophagiques, ainsi que la régulation de l’élimination par autophagie des protéines agrégées. On sait que la protéine Rab32 contribue à contrôler le recrutement de la cathepsine D aux phagosomes qui contiennent la mycobactérie de la tuberculose, ce qui suggère que Rab32 pourrait jouer un rôle similaire dans la lèpre.
Par ailleurs, l’analyse a identifié une interaction entre les loci NOD2 et RIPK2, ce qui est compatible avec l’association biologique des protéines encodées par ces gènes (complexe NOD2-RIPK2) qui active la voie NF-kappaB dans la réponse de défense de l’hôte à l’infection.
Enfin, l’étude n’a pas trouvé d’association avec le gène TLR1, ce qui suggère qu’il pourrait être un gène de susceptibilité uniquement dans certaines populations (au moins indienne).
Immunité innée.
« Nos résultats élargissent les fonctions biologiques de l’IL23 en révélant son rôle dans la susceptibilité à la maladie infectieuse et suggèrent un rôle potentiel de l’autophagocytose dans la pathogenèse de la lèpre. L’association IL23R confirme les précédentes observations d’un net chevauchement des gènes de susceptibilité pour la lèpre et pour la maladie de Crohn, ce qui suggère des mécanismes pathogènes communs », concluent les chercheurs.
« Ces 9 gènes de susceptibilité sont impliqués dans l’immunité innée de l’homme, y compris la reconnaissance du pathogène et l’autophagocytose », explique au « Quotidien » le Dr Furen Zhang, de l’Institut de dermatologie et vénérologie de la province de Shandong à Jinan (Chine).
« Les individus porteurs de défaut de ces gènes développeront des manifestations cliniques après une période d’incubation (en général de deux à dix ans) lors d’une infection par la mycobactérie de la lèpre, tandis que ceux sans anomalie de ces gènes ne développeront pas la maladie même s’ils sont infectés par la bactérie. Nous avons également analysé la fonction des 9 gènes et découvert que deux d’entre eux, NOD2 et RIPK, ont un puissant effet d’interaction ce qui veut dire que si une personne porte les deux gènes défectueux, la manifestation clinique sera beaucoup plus sévère après l’incubation si elle est infectée par M. leprae. »
« Pour la prochaine étape, nous essayerons de coopérer avec d’autres groupes en Chine et à l’étranger afin de découvrir d’autres gènes de susceptibilité à la lèpre, dans l’objectif d’une prédiction du risque dans les régions endémiques. De plus, nous effectuerons une cartographie fine et une recherche fonctionnelle de ces gènes, afin de découvrir des cibles d’intervention pour la maladie. »
Nature Genetics 23 octobre 2011, Zhang et coll.
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