dE NOTRE CORRESPONDANTE
De grands progrès ont été faits pour identifier les mutations génétiques qui sous-tendent fréquemment la cardiomyopathie, toutefois d’autres causes génétiques restent à identifier. Ainsi, des mutations dans 8 gènes encodant des protéines du sarcomère causent la cardiomyopathie hypertrophique, mais elles ne sont détectées que chez 40 à 70 % des patients affectés. Plus de 40 gènes codant principalement pour des composants du sarcomère et du cytosquelette ont été impliqués dans la cardiomyopathie dilatée, qui est familiale dans 30 à 50 % des cas, mais des mutations responsables ne sont trouvées que chez 20 à 30 % des patients.
Une étude dirigée par le Dr Christine Seidman (Harvard Medical School, Boston) marque une nouvelle avancée. L’équipe s’est intéressée à la titine, une protéine géante du sarcomère, la plus grande protéine connue avec environ 30 000 acides aminés. C’est, après la myosine et l’actine, la protéine la plus abondante dans le muscle strié.
Des mutations de son gène (TTN) ont été liées à la cardiomyopathie dilatée dans 3 familles, mais n’ont pas été liées à la cardiomyopathie hypertrophique. Cependant, le gène TTN n’a jamais été complètement étudié dans la cardiomyopathie, en raison des difficultés techniques liées à sa grande taille.
Des techniques de nouvelle génération.
Herman, Seidman et coll. ont utilisé les technologies de séquençage de « nouvelle génération », en plus de la technique de séquençage traditionnelle, pour déterminer dans quelle mesure les mutations du gène TTN contribuent aux cardiomyopathies.
Le gène TTN a été analysé chez 352 patients atteints de cardiomyopathie dilatée (analyse par séquençage de pointe pour 203 patients, et par séquençage traditionnel pour 149 patients), 231 patients affectés de cardiomyopathie hypertrophique et 249 témoins.
Le principal résultat est la découverte fréquente de mutations tronquantes de la titine dans la cardiomyopathie dilatée, trouvées dans 25 % des cas familiaux de cardiomyopathie dilatée idiopathique et 18 % des cas sporadiques.
Parmi les patients étudiés par séquençage de pointe, des mutations tronquantes de TTN sont identifiées chez 27 % des patients atteints de cardiomyopathie dilatée (54 sur 203 patients CMD). Le séquençage traditionnel apparaît moins efficace pour détecter des mutations tronquantes de TTN, qui sont identifiées chez seulement 8 % (12/149 patients CDM).
En revanche, des mutations tronquantes de TTN ne sont identifiées que chez 1 % des patients atteints de cardiomyopathie hypertrophique (3 de 231 patients CMH) et chez 3 % des témoins ; vu que la mutation TTN chez les patients CMH est chaque fois associée à une mutation d’un autre gène connu de la CMH, il est probable que ces mutations de TTN ne causent que rarement voire jamais une CMH.
Les mutations tronquantes de TTN coségrèguent bien avec la CMD dans les familles, et la pénétrance est supérieure à 95 % après l’âge de 40 ans.
Parmi les patients affectés de CMD, les manifestations cliniques et la morbidité et mortalité sont similaires chez ceux portant des mutations de TTN et ceux sans mutations de TTN. Mais les hommes porteurs de mutations de TTN, comparés aux femmes porteuses, ont des complications plus tôt.
Les mutations associées à la CMD surviennent surtout dans la bande A de la titine, jamais dans la bande Z ou M.
Rechercher des traitements.
Comment les mutations de la titine pourraient-elles causer la CMD ? Les chercheurs proposent que les protéines titines tronquées sont incorporées dans le sarcomère, ancrées à la ligne Z, mais il leur manque la bande M qui les ancre normalement au milieu du sarcomère ; cela perturberait la régulation de la force sarcomérique et aboutirait à la CMD.
L’incorporation du séquençage de pointe du gène TTN dans le dépistage génétique devrait augmenter de 50 % la détection des mutations de la cardiomyopathie dilatée, selon les chercheurs, et permettre ainsi de diagnostiquer et traiter les patients à un stade plus précoce.
« Nos prochains pas seront de définir les signaux déclenchés par les mutations de la titine et de découvrir des approches pour les limiter, en d’autres termes découvrir des thérapies pour cette cause fréquente d’insuffisance cardiaque », confie au « Quotidien » le Dr Christine Seidman.
Herman et coll., New England Journal of Medicine du 16 février 2012.
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