« Il serait irresponsable de procéder à un usage clinique des cellules germinales », a déclaré David Baltimore, président honoraire à l’université de technologie de Californie, en conclusion de la conférence internationale sur l’édition du génome humain, organisée la semaine dernière à Washington, par les académies américaines de médecine et des sciences, la société royale britannique et l’académie des sciences de Chine.
Cette conférence fait partie d’une initiative lancée au mois de mai 2015 par les académies américaines, suite à une expérience de manipulation de gènes sur des embryons humains non viables menée en Chine, et qui a alarmé la communauté scientifique. De nombreux chercheurs craignent en effet qu’à la faveur d’un vide réglementaire et éthique, ne soit tentée la transformation de caractères héréditaires humains avec des répercussions imprévisibles pour les personnes concernées et leurs descendances. Ils craignent également que cette démarche mène à une nouvelle forme d’eugénisme.
CRISPR/Cas
Depuis 2012, la recherche dans le domaine de la modification génétique s’est intensifiée, avec l’introduction d’une nouvelle méthode d’édition – le système CRISPR/Cas (acronyme de l’expression anglaise : Clustered regularly interspaced short palindromic repeats/CRISPR associated protein). Cette technique est inspirée d’un processus naturel utilisé par les bactéries pour se défendre contre les invasions virales. Elle met en jeu une enzyme – une endonucléase – couplée à un ARN-guide, programmable à volonté. Bon marché, elle a considérablement simplifié la transformation de l’ADN de tous les organismes.
La conférence de Washington n’est pas allée jusqu’à recommander un moratoire sur les manipulations des cellules reproductrices, comme certains chercheurs le souhaitent. Le comité d’organisation de ce sommet considère que l’utilisation de cellules souches ou de cellules d’embryons humains dans les premiers stades de développement est acceptable en recherche fondamentale ou préclinique, à condition que l’embryon n’ai pas été conçu dans le cadre d’une grossesse.
En outre, le comité préconise qu’avec les progrès de la recherche scientifique et l’évolution de la société, les applications concernant les caractères héréditaires fassent l’objet d’un examen régulier. Cette position est moins restrictive que celle du gouvernement fédéral américain, qui, agissant en particulier par l’intermédiaire des instituts nationaux de la santé, ne finance pas l’utilisation des techniques de manipulation génétique des embryons humains.
Établir des normes
Autre conclusion de ce sommet, au cours duquel il a été montré que les recommandations éthiques et leurs applications varient beaucoup d’un pays à l’autre : les chercheurs ont appelé à débattre du sujet au niveau mondial. « Le génome humain est partagé par toutes les nations, rappelle David Baltimore. Il convient donc que la communauté internationale établisse des normes concernant les usages acceptables des cellules germinales humaines et harmonise ces réglementations afin de décourager des activités inacceptables, tout en contribuant au progrès de la santé et du bien-être ».
Dans un éditorial publié dans le quotidien britannique « The Guardian », Marcy Darnovsky, directrice générale du Center for Genetics and Society, à Berkeley, en Californie, qui a participé à la conférence, déplore cependant une « conclusion » « peu concluante ». Mais cette dernière se réjouit que les experts réunis considèrent cette réunion comme « un premier pas » vers des délibérations plus larges et plus inclusives. « La reconnaissance par les scientifiques qu’ils ne peuvent pas décider seuls d’utiliser cette technologie, qui est susceptible de transformer la société, est sans doute le résultat le plus probant de ce sommet », écrit-elle.
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