« Les médicaments qui font aujourd’hui l’objet d’essais pour la polykystose rénale et la sclérose tubéreuse de Bourneville n’ont initialement pas été développés pour elles. Par exemple, le tolvaptan (Samsca, Otskuka), un inhibiteur des récepteurs V2 de l’ADH, a été développé au départ en tant qu’agent aquarétique pour traiter les états de rétention hydrique, précise le Pr Dominique Joly. Le tolvaptan a obtenu une Autorisation de mise sur le marché (AMM) au Japon pour la polykystose rénale mais elle a été refusée l’an passé aux États-Unis ; en Europe, les discussions sont toujours en cours à propos de ce produit qui présente des avantages mais aussi quelques inconvénients ».
Le tolvaptan est un inhibiteur du récepteur V2 de la vasopressine dont l’efficacité dans la polykystose rénale a été démontrée chez l’animal et plus récemment chez l’homme. L’essai de référence est l’étude TEMPO, conduite par le Pr Vincente Torres de la Mayo Clinic (Rochester) publié en 2012. Cet essai multicentrique international a été mené chez plus de 1 400 patients avec une polykystose rénale, une fonction rénale normale et des reins de grande taille (volume rénal supérieur à 750 cm3). « Les résultats sont positifs : l’augmentation du volume rénal total mesurée par IRM, était moins marquée dans le groupe traité que dans le groupe placebo. Le déclin de la fonction rénale était moins important dans le groupe Tolvaptan que dans le groupe placebo », explique le Pr Joly. Mais ces résultats positifs doivent être mis en balance avec la tolérance. « On a observé des effets indésirables attendus comme la soif ou la nycturie, mais aussi des effets moins prévisibles, plusieurs cas d’hépatites médicamenteuses, potentiellement sévères. Par ailleurs, l’efficacité sur le long terme reste à démontrer ».
Pour la polykystose rénale, l’espoir repose aussi sur des analogues de la somatostatine. « Ces produits sont utilisés actuellement en endocrinologie dans l’acromégalie et les tumeurs neuroendocrines », souligne le Pr Joly, en précisant que deux produits suscitent l’intérêt des néphrologues : l’octréotide (Novartis) et la lanréotide (Ipsen Pharma). « Dans la polykystose rénale, on sait qu’il y a des récepteurs tubulaires à la somatostatine. Chez les animaux, les produits se sont montrés efficaces », indique le Pr Joly, avant d’évoquer la publication, l’an passé dans le Lancet, des résultats de l’étude Aladin. « Il s’agissait d’un essai randomisé octréotide versus placebo conduit chez 79 patients avec une polykystose rénale et une filtration glomérulaire supérieure à 40. Le résultat est peu spectaculaire sur le volume rénal mesuré en IRM, mais le déclin de la fonction rénale était nettement ralenti dans le groupe octréotide. Deux études plus vastes sont en cours avec le lanréotide aux Pays-Bas et en France ».
Pour la sclérose tubéreuse de Bourneville, l’espoir repose principalement sur l’evérolimus (Votubia, Novartis). « Il s’agit, tout comme du sirolimus (Rapamune, Pfizer) d’un inhibiteur de mTOR. Les inhibiteurs de mTOR sont utilisés en greffe d’organes et en cancérologie. Il est logique qu’on ait songé à les utiliser pour la sclérose tubéreuse de Bourneville, cette pathologie résultant de la mutation de protéines (hamartine et tubérine), qui sont des inhibiteurs endogènes de mTOR. Quand ces protéines sont mutées, il y a activation de la voie mTOR », explique le Pr Joly.
L’evérolimus a récemment obtenu une AMM pour la sclérose tubéreuse de Bourneville à la suite de l’essai Exist-2. « Celui-ci a montré que le médicament réduit le volume des angiomyolipomes rénaux de plus de 3 centimètres, avec peu d’effets secondaires à six mois. Si la bonne tolérance se confirme, l’evérolimus pourrait devenir le traitement de première intention des angiomyolipomes rénaux de plus de 3 centimètres dans la sclérose tubéreuse ».
D’après un entretien avec le Pr Dominique Joly, hôpital Necker, Paris.
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