Deux études publiées dans « Nature », auxquelles ont participé des Français, soulignent l’importance de la flore digestive et de sa composition dans le métabolisme humain. L’une établit un lien entre la richesse en formes bactériennes de la flore intestinale et la susceptibilité à présenter des complications médicales de l’obésité ; l’autre montre qu’il est possible d’améliorer un profilé métabolique défavorable en enrichissant le microbiome digestif des individus.
Métagénomique quantitative
La première étude a été menée par le consortium international MetaHIT (METAgenomics of the Human Intestinal Tract, programme de recherche européen coordonné par l’Inra). Elle a porté sur une cohorte de 292 Danois adultes - 123 personnes non obèses et 169 obèses. Les chercheurs ont analysé le génome bactérien intestinal en utilisant la technique de la « métagénomique quantitative ».
L’étude fait apparaître deux groupes d’individus qui se distinguent selon la variété des gènes microbiens présents dans leur microbiote digestif. Les trois quarts des individus possèdent une flore digestive riche, où le nombre des espèces de bactéries apparaît relativement important. Toutefois, 23 % des individus ont une flore pauvre en espèces bactériennes, moins diversifiées, avec une adiposité plus importante. « C’est la première fois qu’une telle distinction est mise en évidence dans la population », écrivent Emmanuelle Le Chatelier et coll.
Flore riche et flore pauvre
Des sujets maigres et obèses sont présents dans les deux groupes, mais dans celui déficitaire en bactéries la proportion des obèses est majoritaire (80 %).
Les chercheurs montrent aussi que les personnes dont la flore est plus pauvre présentent un risque plus important de complications métaboliques de l’obésité - diabète de type 2, dyslipidémie, problèmes hépatiques et maladies cardiovasculaires - comparativement aux personnes dont le microbiote digestif est riche. « Ces individus ont notamment une tendance à développer une inflammation chronique », soulignent les auteurs.
De plus, dans le groupe pauvre en bactéries, les individus obèses prennent plus de poids au cours du temps que les personnes non obèses. Le Chatelier et coll. individualisent 8 espèces de bactéries peu représentées dans le groupe pauvre en bactéries par rapport à l’autre groupe, qui « pourraient avoir un rôle protecteur contre la prise de poids ».
La seconde étude menée par le consortium français MicroObes (Microbiote intestinal humain dans l’obésité et la transition nutritionnelle, programme de recherche de l’ANR coordonné par l’INRA) confirme les résultats de la première étude sur une cohorte de 49 Français adultes, obèses (38) ou en surpoids (11).
Mêmes caractéristiques que les Danois
Les 40 % d’individus au microbiome réduit, présentent les mêmes caractéristiques que les Danois : dysmétabolisme, inflammation à bas grade. Les communautés bactériennes sont similaires.
Les auteurs observent que l’on peut distinguer les communautés riches et pauvres en bactéries, en se fondant sur seulement 6 espèces de bactéries. « Ces résultats pourraient conduire à l’élaboration d’une méthode simple pour déterminer quel type de communauté microbienne intestinale un individu porte. »
L’impact sur le microbiome d’un régime riche en protéines et en fibres et pauvre en calories a été étudié chez ces patients français. On observe une amélioration des caractéristiques cliniques après 6 semaines : perte de poids, modification des paramètres métaboliques. Et aussi un enrichissement des colonies bactériennes digestives initialement pauvres.
Réflexions et recherches
Les chercheurs ont ainsi « corrélé l’augmentation de la richesse bactérienne avec la réduction du poids, du tissu graisseux et avec une amélioration de paramètres métaboliques (taux de triglycérides ou cholestérol) ou inflammatoires », même si l’inflammation chronique n’a pu être corrigée par le régime chez les individus pauvres en espèces bactériennes aussi efficacement que chez les individus riches.
Pour les auteurs, ces notions ouvrent la voie à une réflexion et des recherches sur une détection précoce des individus à risque, et sur des interventions nutritionnelles ou à l’aide de probiotiques pour lutter contre l’obésité et ses complications.
Un programme européen
Un programme de recherche européen, sur la flore intestinale et son rôle dans les complications cardiométaboliques de l’obésité est en cours. Intitulé « Métacardis » (metagenomics in cardiometabolic diseases), coordonné par l’INSERM, il a débuté en novembre 2012. Il implique 14 partenaires issus de 6 pays européens. Il est prévu pour durer 5 ans et est soutenu par l’Europe.
Nature, 29 août 2013.
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