LA MISE au point d’un pancréas artificiel fonctionnant grâce à un système de boucle fermée avance à un rythme prometteur. « Je reviens de Washington où j’ai assisté au meeting international sur les technologies appliquées au diabète. Toutes les équipes, qui travaillent sur la boucle fermée étaient présentes, et nous avons pu échanger longuement sur le sujet. Et tout le monde était à peu près d’accord pour estimer que si les prochains essais se montrent concluants, un premier système de boucle fermée pourrait être commercialisé dans un délai de quatre à cinq ans », explique le Pr Éric Renard, chef du département d’endocrinologie-diabéte-nutrition du CHU de Montpellier.
Avec son équipe, l’une des plus en pointe au niveau mondial dans la recherche sur la boucle fermée, il vient de publier dans Diabetes Care (1) les résultats préliminaires d’un essai multicentrique conduit hors de l’hôpital en octobre 2011 en lien avec les universités de Padoue (Italie), Charlottesville (Virginie) et Santa Barbara (Californie).
« Le principe de la boucle fermée est simple : assurer le contrôle du diabète au moyen d’une pompe à insuline guidée non pas par le patient, mais par un système de mesure du glucose en continu fonctionnant avec un capteur placé sur la peau. Les informations émises par ce capteur sont transmises à un système informatique qui va guider la pompe à distance et assurer le contrôle de la glycémie », explique le Pr Renard.
D’octobre 2011 à mars 2012, l’équipe du CHU de Montpellier a mené un essai sur cinq patients qui, pour la première fois, ont utilisé ce système de boucle fermée en dehors de l’hôpital. « Cela a été rendu possible grâce au développement d’un système de contrôle exécuté par l’intermédiaire d’un smartphone plutôt que via un ordinateur portable. Cela nous permet d’avoir un dispositif beaucoup plus mobile, facilement utilisable en dehors de l’hôpital », indique le Pr Renard.
Les cinq patients ont d’abord été accueillis dans un hôtel proche du CHU où ils ont été équipés avec le système. Le lendemain, ils sont allés à l’hôpital pour que soit enclenchée la boucle fermée par la mise en route de l’algorithme. Ils sont restés au CHU de 8 heures à 18 heures avant de pouvoir regagner leur hôtel et d’aller dîner au restaurant. Le lendemain, ils se sont promenés en ville et ont regagné le CHU à la mi-journée pour arrêter l’expérience. « Les trois autres sites ont procédé au même type d’essai avec, à chaque fois, cinq patients explorés. L’objectif était de démontrer la faisabilité de la thérapeutique automatisée en dehors de l’hôpital, et ainsi de prouver qu’on pouvait traiter en ambulatoire des patients avec un système de boucle fermée. Les résultats ont été très bons, au-delà même de nos espérances, pour 97 % du temps attendu, alors qu’on s’était fixé un objectif de 80 % », précise le Pr Renard.
Les patients inclus dans l’essai étaient atteints d’un diabète de type 1, habituellement sous pompe à insuline, qui étaient tous très impliqués dans le contrôle de leur maladie. « La plupart d’entre eux avaient déjà eu une expérience de l’utilisation de capteurs pour être en mesure de modifier par eux-mêmes le débit de la pompe sur la base des données du capteur. La nouveauté était que tout se faisait de manière automatisée », indique le Pr Renard.
Prochain objectif, la normoglycémie.
Prévue au début de l’année 2013, l’étape suivante sera la réalisation d’un nouvel essai, là encore sur cinq patients dans chaque centre, avec un objectif plus ambitieux. « Cette fois, nous visons un contrôle strict de la glycémie. L’algorithme va être modifié pour tenter d’atteindre la normoglycémie avec des patients maintenus en permanence entre 0,80 et 1,40 g/l la nuit et entre 0,70 et 1,80 g/l la journée. Si tout se déroule bien, on envisagera ensuite un essai à plus large échelle avec un nombre plus important de patients qui pourront passer deux semaines chez eux, en dehors de l’hôpital », précise le Pr Renard.
En dehors des quatre sites engagés dans cet essai multicentrique, d’autres équipes dans le monde travaillent sur la boucle fermée. « On peut citer l’université de Cambridge qui devrait bientôt faire un essai en dehors de l’hôpital avec des enfants. Il y a aussi l’équipe de Boston qui utilise un système qui permet de perfuser de l’insuline mais aussi du glucagon en cas de risque hypoglycémique », indique le Pr Renard.
Une fois mis au point, ce système de boucle fermée s’adressera d’abord à des patients motivés par le contrôle de leur diabète. « Il faut des sujets qui aient une démarche active. Dans certains papiers, on lit que ce système sera idéal pour contrôler les patients qui n’acceptent pas leur diabète et s’en désintéressent. C’est totalement faux. L’utilisation de la boucle fermée nécessite un engagement du patient. Ainsi, les meilleurs candidats seront ceux qui utilisent une pompe mais qui ont tendance à se trouver trop souvent en hyperglycémie à cause de leur crainte des hypoglycémies. Le système pourrait également convenir aux malades qui adaptent un peu trop leur pompe et se mettent en hypoglycémie par « excès de zèle », souligne le Pr Renard, en ajoutant que le système sera surtout utile durant la nuit. La principale crainte des patients est de faire une hypoglycémie durant la nuit et tous les essais de boucle fermée ont démontré leur grande efficacité pour prévenir ce type d’incident ».
D’après un entretien avec le Pr Éric Renard, chef du département d’endocrinologie-diabéte-nutrition, CHU de Montpellier.
(1) Diabetes Care 2012;35(9):e65-7.
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