Pour les experts réunis par l’Académie de chirurgie autour du thème de la chirurgie bariatrique, il est urgent de structurer le suivi à long terme des patients après ce type d’intervention. Plus de 40 000 opérations, dont 57 % de gastrectomies longitudinales, ont été réalisées en France en 2014, soit cinq fois plus qu’il y a cinq ans. « Au rythme actuel, on atteindra les 500 000 patients opérés dans cinq ans, soit 1 % de la population Française », note le Pr François Pattou, chef du service de chirurgie générale du CHRU de Nice. « Nous finirons submergés si le suivi n’est pas repensé », prévient le Pr Jean Gugenheim, chef du service de chirurgie digestive du CHU de Nice.
En théorie, les recommandations publiées en 2009 par la HAS imposent quatre consultations lors de la première année, et une à deux consultations par an pendant toute la vie du patient. Le texte met l’accent sur les risques de carences vitaminiques et nutritionnelles, la recherche de dysfonctionnement du montage chirurgical et le suivi psychologique et psychiatrique.
La pratique bien loin de la théorie
Dans la pratique, moins de la moitié des patients effectuent ces consultations dans les deux premières années, selon les données de la CNAMTS. Les chirurgiens n’ont pas le temps ni les compétences nécessaires pour suivre seuls ces patients, tandis que les endocrinologues et les nutritionnistes sont trop peu nombreux ou trop occupés par la prise en charge d’autres patients relevant de leurs spécialités.
Les patients ne sollicitent d’ailleurs pas souvent ces consultations. « Ils ne se voient pas comme des malades », explique le Dr Jean-Marie Zimmermann, chirurgien de l’hôpital Clairval - Résidence du Parc, à Marseille. Ce spécialiste a pu constater à quel point les tentatives du centre spécialisé obésité (CSO) PACA ouest pour toucher les populations de patients se sont révélées vaines. « Tous les spécialistes sont regroupés, le nutritionniste et le psychiatre sont remboursés, la ligne téléphonique est disponible 24 heures sur 24. Malgré cela, les patients ne viennent pas. Il y a un gros problème de sensibilisation », déplore-t-il.
Un modèle économique à inventer
Partant de ce constat, les membres de l’Académie de chirurgie proposent plusieurs pistes d’amélioration, à commencer par une valorisation incitative par l’assurance-maladie du suivi postopératoire. « Les différentes consultations sont inégalement remboursées, de même que les supplémentations en vitamines », explique le Pr Pattou. Une solution possible consisterait en un forfait comme celui proposé aux Pays-Bas, qui comprend 27 visites sur cinq ans. Une prise en charge ambulatoire d’une journée, qui cumulerait une visite chez un endocrinologue, un diabétologue et un nutritionniste a également été évoquée. La codification des actes pourrait également être revue. « Dans mon hôpital privé, nous avons pris des infirmières dédiées à ce suivi mais il n’existe pas de tarif pour leur activité », constate le Dr Zimmermann.
Ulcères et décompression psychologique
À court terme, les complications possibles sont diverses et variées : douleurs abdominales, ulcères mais aussi des épisodes de décompression psychologique liés à l’important changement qui intervient dans la vie du patient : « énormément de couples se défont après un tel événement » note le Pr Pattou. À plus long terme, des études de cohortes indiquent un possible risque d’ostéoporose après un by-pass gastrique et de reflux gastro œsophagien après une gastrectomie. Des recherches montrent également de profonds changements du microbiote après une chirurgie bariatrique.
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