LE COLLOQUE, passionnant par l’exceptionnelle qualité des exposés accueillis avec recueillement, a montré que les pesticides et phtalates, ainsi que les 100 000 molécules toxiques synthétisées par l’industrie chimique, sont devenus un grand ennemi des espèces humaine et vivantes en général. Parmi ces substances citées on trouve des polluants bioaccumulables dont la durée de vie peut dépasser les 100 ans ! Et ils peuvent avoir un effet nocif à des taux où ils ne sont pas dosables dans le plasma.
Un risque multiforme.
Les participants ont pu juger de l’étendue des risques : ours polaires hermaphrodites, alligators à pénis raccourci, tortues et mollusques féminisés… et les humains ne se différencient pas des animaux. De nombreux perturbateurs endocriniens sont probablement à l’origine de la multiplication par 4 du nombre d’enfants hypospades au Danemark, pays agricole grand utilisateur de pesticides. Les cancers du testicule y sont devenus plus nombreux, ce qui n’est pas du tout le cas en Finlande, pays à forte industrialisation. Par ailleurs, la diminution de la concentration des spermatozoïdes, observée seulement par certains laboratoires, pourrait annoncer une baisse de la fertilité. Et le nombre de couples infertiles aurait été multiplié par 2 depuis quelques années.
Or ces substances sont présentes partout : même dans les tuyaux de perfusion et les sachets contenant les globules rouges. D’autres substances toxiques servent (ou ont servi) à la désinfection des biberons. La cuisine est un lieu de prolifération. L’eau qui sort du plus moderne épurateur n’en est pas entièrement débarrassée (et les boues issues des épurateurs sont répandues sur les champs agricoles !). La poêle peut en être recouverte. Fruits et légumes peuvent en contenir. Les poissons gras apportent des omega 3… et des perturbateurs endocriniens concentrés. Les déchets des médicaments, surtout l’ethinyl estradiot des pilules et des patchs, aggravent l’œstrogénie ambiante. Les centres de soin, avec leurs antimitotiques, sont un condensé de perturbateurs. Autre notion apportée, les produits toxiques fabriqués dans un pays risquent, portés par les vents et les eaux, d’être envoyés dans les pays voisins ou lointains, par exemple au pôle Nord.
Cependant, un conférencier a donné une nouvelle rassurante : depuis 1980 le taux de dioxine dans le corps des sujets testés a diminué de 8 % par an. Et dans 3 secteurs de Belgique, les enfants ayant présenté le moins d’effets susceptibles d’être attribués aux toxiques avaient été nourris au sein ! Il a
aussi confirmé un des points sur lequel ce colloque a mis un accent appuyé : il existe une fenêtre d’activité de ces perturbateurs, qui sont surtout nocifs à la période fœtale et durant la petite enfance. Les pesticides et autres molécules qui s’y surajouteront chez l’adulte, n’auront vraisemblablement d’effets que s’ils sont absorbés en très grande quantité.
Les polluants chimiques pourraient être à l’origine de l’accroissement marqué des cancers hormono-dépendants. En particulier ceux du sein et de la prostate. Mais d’autres conséquences inattendues de leur diffusion ont été rapportées. S’ils sont présents en abondance chez une femme enceinte, ils affectent la division des cellules intestinales fœtales, réduisant chez l’adulte leur nombre total et rendant l’intestin moins fonctionnel. De même, pour les cellules à vocation immunitaire intestinales, ce qui diminue les défenses du
sujet. L’obésité et le diabète attribués à la sédentarité et aux excès alimentaires font le lit des complications cardiovasculaires. Les perturbateurs endocriniens fixés sur les cellules adipeuses joueraient un rôle notable dans leur augmentation.
Parmi tous ces perturbateurs, le distilbène a été largement cité. Or il n’est pas exclu ni prouvé (selon un orateur qui a fait preuve d’une grande prudence, assise sur une connaissance bibliographique exceptionnelle) que les comportements des sujets exposés puissent en être perturbés ou avoir
tendance à la dépression. Certaines autres substances toxiques pourraient avoir aussi de tels effets.
Ainsi la santé du sujet serait « cadrée » dès l’adolescence !
Réagir vite.
Cependant, ce danger quoi que réel, est très difficile à cerner car les paradigmes en cours pour juger de la toxicité d’une substance sont obsolètes, pour 2 raisons : ils ne s’appliquent pas à la toxicité chronique ; on ne dispose d’aucun moyen de juger des risques dépendant de la sommation de ces substances que l’on est encore incapable de mesurer dans leur ensemble.
La nécessité de réagir vite est donc indéniable. On peut cependant regretter la quasi-absence, dans l’ensemble des conférences, de réflexions globalisantes : c’est-à-dire sur les effets bénéfiques apportés à l’humanité par les substances citées, qu’il est difficile de nier en bloc sans dire du même coup que la recherche n’est le fait que de docteurs Folamour. Il est donc souhaitable de prendre en compte l’urgence des décisions sans que la vision soit à sens unique.
Ce colloque s’est tenu sous les auspices du groupe Santé environnementale de l’Assemblée nationale. Le président en est le député Gérard Bapt. Cela augure bien des suites qui lui seront données.
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