Voilà des décennies que la recherche d’une pilule contraceptive pour homme n’aboutissait pas. Certaines femmes doutaient que cette recherche existât, y voyant une marque de machisme de plus, avec la volonté de laisser les contraintes de la contraception aux seules femmes. En 2015, une étude internationale montrait que dans le monde 60 % des femmes en couple avec un homme utilisent une forme de contraception, pour seulement 11 % des hommes. Il s'agit essentiellement du préservatif et de la vasectomie.
Par le passé, les scientifiques ont tenté plusieurs méthodes, comme le Risug (reversible inhibition of sperm under guidance), l’injection contraceptive ou le gel contraceptif. Rien de probant, ou des effets secondaires très pénibles pour les deux partenaires, en particulier des impuissances. C’est qu’il est autrement plus complexe de bloquer la spermatogenèse sans trop de dégâts sur la sexualité que de bloquer l’ovulation ! Il n’existe donc à ce jour aucune contraception hormonale disponible pour l’homme, essentiellement pour des raisons de physiologie.
Un double blocage de l'axe gonadotrope
Des recherches récentes ont montré qu’administrer à la fois de la testostérone et de la progestérone permet de bloquer l’axe gonadotrope, de réduire la production de testostérone et la spermatogenèse. Ainsi, la diméthandrolone undécanoate (DMAU), précurseur converti en diméthandrolone (DMA), lie les récepteurs des androgènes et de la progestérone. Une première étude chez l’homme, menée en double insu dans deux centres, a montré que des doses orales uniques de 200 à 800 mg étaient « bien tolérées » et supprimaient de façon réversible la LH circulante.
Les auteurs ont évalué l’innocuité, la tolérance, la pharmacocinétique (PK) et la pharmacodynamique (PD) d’un traitement quotidien pendant quatre semaines de DMAU par voie orale chez des hommes jeunes (18-50 ans) en bonne santé. Ils ont été randomisés, soit sous un placebo oral quotidien soit sous DMAU au cours d’un repas, en trois groupes de doses (100, 200 ou 400 mg) et selon la formulation, huile H ou poudre P. Sur 100 sujets randomisés, 83 ont terminé l’étude. Tous, quel que soit le groupe de traitement, ont obtenu des réductions des taux de testostérone dans l’intervalle défini d’hypogonadisme, sans différence significative entre les doses ou les formulations.
Tous les sujets du groupe P 400 mg et une douzaine du groupe H 400 mg ont obtenu une suppression de la FSH et de la LH (< 1 IU/L). Il n’y eut modification ni de l’humeur ni de l’ECG. Le taux de HDL-c a diminué, l’hématocrite a augmenté, ainsi que le poids (médiane de 1,5 à 3,9 kg) dans les groupes DMAU. Il n’a pas été observé d’événements indésirables graves. 9 sujets ont rapporté une diminution de la libido, 1 dans le groupe placebo et 8 sous DMAU (20 %), et 8 cas d’acné ont été signalés (5 médicaments, 3 placebos), tous résolutifs à l’arrêt de l’étude.
Résultats prometteurs mais effets secondaires sérieux
Cette étude montre que l’administration orale quotidienne de DMAU pendant quatre semaines chez des hommes en bonne santé est « bien tolérée », les doses de 400 mg permettant de supprimer les taux sériques de testostérone, de LH et de FSH. Ces résultats prometteurs sont à suivre lors de la poursuite du développement de la DMAU en tant que pilule contraceptive orale masculine.
« Le niveau normal de testostérone chez un homme peut varier entre 350 et 1 100 ng/dL. Après les vingt jours de test, certains participants sont descendus à 13 ng/dL », dixit Seth Cohen, urologue à New York. Pour un autre spécialiste d’andrologie, ce taux est bien en dessous du seuil de castration chimique de 50 ng/dL.
En somme, si pour la première fois une pilule contraceptive orale masculine semble envisageable, on ne peut qu’être réservé sur ses effets : 11 % des sujets ont ressenti une baisse de libido (mais ce phénomène toucherait aussi les femmes sous pilule), et un niveau aussi bas de testostérone peut entraîner des effets secondaires qui peuvent varier, certains étant très sérieux – prise de poids, développement mammaire, thrombose, dépression, effets cutanés, sur les lipides sanguins, la masse osseuse, le poids, etc. Et d’autant plus réservé qu’il ne s’agit ici que d’une étude de très courte durée.
Professeur émérite à l’université Grenoble-Alpes
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