Des recommandations concernant les indications opératoires des hyperparathyroïdies avaient déjà été émises en 2021 par un consensus européen d’experts. Au printemps 2022, le cinquième symposium international s’est tenu aux États-Unis, avec des conclusions globalement consensuelles.
Penser et affirmer le diagnostic
La première étape est bien d’affirmer le diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire. « Il repose sur la présence simultanée d’une hypercalcémie (calcium total, calcium ajusté selon l’albuminémie, voire calcium ionisé) et d’une élévation des taux de parathormone. Ces taux sont à confirmer à deux semaines d’intervalle », rappelle le Pr Igor Tauveron (CHU de Clermont-Ferrand), responsable de centre de compétences Oscar*. Encore faut-il penser à les demander. « Cela vaut la peine de réaliser systématiquement un bilan calcique devant une ostéoporose, mais aussi face à des calculs urinaires calciques. Or, après le passage aux urgences et une fois l’épisode aigu passé, ce n’est pas toujours fait », déplore le spécialiste. C’est d’autant plus dommage que les manifestations osseuses (ostéoporose, fractures pathologiques) et/ou rénales (lithiase urinaire calcique, néphrocalcinose) font partie des situations devant faire évoquer une hyperparathyroïdie.
La seconde étape consiste à éliminer les autres causes. « Devant une hypercalcémie et une élévation des taux de parathormone, il faut réaliser un diagnostic différentiel avant de conclure à une hyperparathyroïdie primaire. L’hypercalcémie hypocalciurique familiale est une maladie génétique qui ne débouche, en règle générale, sur aucune prise en charge. C’est le rapport d’excrétion urinaire du calcium sur la créatinine qui permet de faire la différence : il est effondré dans cette maladie génétique mais élevé dans l’hyperparathyroïdie primaire. Attention aussi à la prise médicamenteuse de thiazidiques et/ou de lithium, qui peuvent fausser les résultats », détaille le Pr Tauveron.
Une fois le diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire posé, on en recherchera les éventuels retentissements. Doivent être vérifiés : la calcémie, la phosphorémie, le taux de parathormone, la vitamine D et la créatinine, mais aussi le retentissement osseux par absorptiométrie biphotonique sur trois sites (lombaire, hanches, extrémité distale du radius), voire des fractures pathologiques. La mesure du score osseux trabéculaire peut être réalisée, mais elle n’est pas disponible partout. Le retentissement rénal s’apprécie, quant à lui, sur la clairance de la créatinine, la calciurie des 24 heures. On recherchera éventuellement une lithiase urinaire et/ou une néphrocalcinose (radio ou échographie).
Dernière étape (réalisée le plus souvent dans un centre de compétences Oscar*) : explorer une cause génétique d’hyperparathyroïdie chez un jeune de moins de 30 ans ou en cas de notion familiale d’hyperparathyroïdie.
Qui est éligible à l’intervention ?
Les critères chirurgicaux ont évolué au fil des années et les dernières recommandations incluent les patients qui ont au moins une manifestation parmi les suivantes :
— une calcémie supérieure de 10 mg/l à la limite supérieure de la normale ;
— une atteinte osseuse, avec soit une fracture clinique ou radiologique, soit un abaissement de la densité minérale osseuse abaissée (T-Score < — 2,5 sur un des trois sites) ;
— une atteinte rénale, avec soit une clairance de la créatinine < 60 ml/mn, soit la présence d’une néphrocalcinose ou d’une lithiase urinaire, soit l’existence d’une hypercalciurie (avec des seuils ayant évolué à la baisse : plus de 250 mg/jour chez la femme et 300 mg/jour chez l’homme)
— un âge inférieur à 50 ans, avec ou sans retentissement.
L’intervention doit être envisagée exclusivement par un chirurgien expert, c’est-à-dire qui opère plus de 40 parathyroïdes par an. Lorsque l’indication chirurgicale est retenue, et seulement à ce moment-là, un bilan morphologique est à faire : échographie cervicale, scintigraphie parathyroïdienne, PET-scan à la F-Choline ou scanner 4D. Le geste chirurgical est beaucoup plus simple s’il y a une image permettant de faire une chirurgie sélective : « s’il y a un adénome, la stratégie est de retirer uniquement celui-ci. Mais, en cas d’hyperplasie, le chirurgien retire 3,25 ou 3,5 parathyroïdes. Dans les heures qui suivent l’intervention, il faut bien surveiller la calcémie car il y a un risque d’hypoparathyroïdie et d’hypocalcémie transitoire. L’hospitalisation dure de 3 à 4 jours au maximum. Au long cours, calcémie et récupération de la masse osseuse sont à surveiller. Une récidive de l’hyperparathyroïdie après des années est rare mais possible », prévient le Pr Tauveron.
Enfin, chez les patients non opérables ou ne relevant pas de l’opération, il est possible de prescrire du cinacalcet pour contrôler la calcémie et, pour améliorer la masse osseuse, un biphosphonate. Dans tous les cas, il faut veiller à un apport calcique suffisant : 800 mg chez les femmes non ménopausées et les hommes de moins de 70 ans, 1 000 mg au-delà. Il faut enfin s’assurer que tous reçoivent une supplémentation en vitamine D adaptée.
Entretien avec le Pr Igor Tauveron, chef du service d’endocrinologie du CHU de Clermont-Ferrand et responsable de centre de compétences Oscar* * Filière Oscar : réseau national des acteurs des maladies rares de l’os, du calcium et du cartilage : www.filiere-oscar.fr
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