Dans quelle mesure est-il bénéfique de viser un contrôle glycémique strict chez les sujets âgés de plus de 60 ans ? À cette question qui fait débat depuis quelques années, une étude américaine chez les vétérans, appelée VADT (pour Veterans Affairs Diabetes Trial), apporte de nouveaux éléments de réflexion au terme d'une période de 15 ans, combinant une intervention de 5,6 ans et un suivi observationnel.
L'équipe dirigée par le Dr Peter Reaven montre dans « The New England Journal of Medicine » que les bénéfices en termes de survenue d'événements cardiovasculaires sont réels le temps de l'intervention mais ne perdurent pas sur le long terme à la reprise d'une prise en charge standard.
Le bénéfice n'est pas capitalisé pour le futur
Autrement dit, il n'y a pas d'effet capitalisé pour le futur ni « de mémoire métabolique », – « legacy effect » selon le terme utilisé par les auteurs –, tout le bénéfice acquis se perd au fur et à mesure que l'hémoglobine glyquée (HbA1c) rejoint celle du groupe traité de façon standard.
Dans cette étude, les sujets âgés en moyenne de 60 ans (n = 1 655 à l'inclusion puis 1 391 pour le suivi), très majoritairement des hommes (97 %), présentaient à l'inclusion un diabète de type 2 évoluant depuis un peu plus de 11 ans avec une HbA1c à 9 %. Les autres facteurs de risque cardio-vasculaires étaient plutôt contrôlés : si 40 % d'entre eux étaient hypertendus, la tension artérielle moyenne était équilibrée aux alentours de 13/7, plus des trois quarts étaient non ou ex-fumeurs (respectivement 25 % et 56 %), le profil lipidique correct (LDL cholestérol moyen à 1,1 g/L).
Stabilisation de l'HbA1c à 8 %
Au cours des 5,6 années d'intervention, la cible glycémique dans le groupe standard était définie entre 8 % et 9 %, celle dans le groupe intensif inférieure à 1,5 point en médiane (6,9 %). À la fin de l'intervention, l'écart d'HbA1c entre les deux groupes s'est estompé progressivement pour se stabiliser à 8 % dans les 2 groupes.
Avec comme critère de jugement la survenue d'événements cardiovasculaires majeurs (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque, amputation, décès de cause cardiovasculaire), les auteurs avaient montré précédemment qu'il y avait une réduction significative du risque (près de 17 %) pour un suivi de 10 ans.
Priorité à un contrôle agressif des autres FDR
Ici, sur la totalité du suivi à 15 ans, il n'y a plus de différence entre les 2 groupes. Si le risque cardiovasculaire est resté moindre dans le groupe intensif tant que l'HbA1c était plus faible, le bénéfice a disparu dès qu'elle était au même niveau dans les 2 groupes.
Ces résultats suggèrent que le contrôle glycémique strict n'a pas d'effet durable sur la survenue d'événements cardiovasculaires, comme l'avaient montré d'autres essais par le passé (ACCORD, ADVANCE). En 2018, une société savante de médecins généralistes avait publié des recommandations allant dans le sens d'assouplir les valeurs cibles d'HbA1c entre 7 et 8 %.
Mais pour les éditorialistes, ce constat est à interpréter avec précaution, en se limitant aux sujets âgés, car « un effet capital glycémique pourrait exister chez les sujets jeunes », écrivent-ils. Chez les sujets âgés, plutôt qu'une cible glycémique ambitieuse (< 8 %), mieux vaut, estiment-ils, donner la priorité à des interventions agressives sur les autres facteurs de risque – sevrage tabagique, contrôle tensionnel, statines, antiplaquettaires et choix des antidiabétiques - qui, elles, ont clairement montré leurs bénéfices.
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