Il y a deux semaines, l’étude médicoéconomique suédoise SOS publiée dans « The Lancet Diabetes & Endocrinology » montrait qu’au bout de 15 ans, des patients diabétiques en surpoids ayant bénéficié d’une opération de chirurgie bariatrique ne généraient pas plus de dépenses de santé que ceux qui bénéficiaient d’une prise en charge non chirurgicale.
Plus récemment, des résultats présentés au Congrès mondial sur les thérapies interventionnelles du diabète de type 2 (DT2), par le Dr Bjorn Eliasson, de l’université suédoise de Göteborg, ont montré une diminution de 58 % de la mortalité toutes causes et de 59 % de la mortalité cardiovasculaire, chez 6 132 patients diabétiques en surpoids bénéficiant d’une dérivation Roux-en-Y par rapport aux contrôles qui n’en bénéficiaient pas, après un suivi médian de 3 ans et demi.
L’IMC n’est plus le seul critère
La chirurgie bariatrique est de plus en plus considérée comme une option sérieuse de traitement du diabète de type 2. « L’enjeu, c’est de savoir si l’IMC doit rester la pierre angulaire de la décision ou si l’insulinorésistance doit également être considérée comme une indication chez des patients un peu moins gros », résume le Pr François Pattou, chef du service de chirurgie générale et endocrinienne du CHRU de Lille.
Il y a six ans, un groupe de consensus s’est mis en place, composé de membres de la Société européenne de diabétologie, de chirurgiens, d’associations de patients ainsi que l’ONG RAND Europe – le tout chapeauté par l’Institut des politiques publiques du King’s College de Londres. Le groupe s’est réuni le mercredi 30 septembre, lors du congrès de Londres, pour dresser la liste des obstacles à l’utilisation de la chirurgie bariatrique comme traitement du DT2 non contrôlé.
« Il manque encore des données pour savoir quels sont les bénéfices, à long et court termes, à attendre en fonction de l’état clinique des patients : poids et glycémie », commente le Pr Jennifer Rubin de l’Institut des politiques publiques du King’s College. La question du profil du patient a aussi été évoquée : peut-on attendre le même bénéfice médico-économique chez un homme actif, une jeune femme de 22 ans ou une mère de famille ?
Une étude en France
C’est notamment pour répondre à ces questions qu’un essai multicentrique randomisé a été lancé en France il y a deux ans, recrutant des patients avec un IMC d’au moins 30 kg/m², souffrant d’un DT2 non-contrôlé.
Ces critères de recrutement accordent une place plus importante au DT2 que les recommandations de la HAS, qui réservent la chirurgie bariatrique aux patients présentant un IMC d’au moins 40 kg/m² ou bien avec un IMC de plus de 35 kg/m² avec au moins une comorbidité susceptible d’être améliorée après la chirurgie, dont le DT2.
« Ce n’est pas une étude facile à mettre en place, avoue le Pr Pattou, il faut que les patients acceptent que ce soit le sort qui décide de leur prise en charge ». Les malades sont suivis pendant 6 mois pour vérifier que le taux d’HbA1C ne descende pas en dessous de 7,5, malgré les traitements médicamenteux. Au bout de 2 ans, la survie et les coûts de santé de ces patients seront calculés. « Une année de vie en bonne santé obtenue grâce à la chirurgie coûte moins de 10 000 euros, explique le Pr Pattou, un prix à comparer aux 30 000 euros par an que coûte une dialyse. »
Un forfait de suivi
Le groupe de consensus réuni à Londres a aussi jugé qu’il fallait mesurer quelle serait la nouvelle demande occasionnée par un tel élargissement de l’indication de la chirurgie bariatrique, et si les capacités en termes d’offre et surtout de suivi sont suffisantes. « Vraisemblablement pas, prédit le Pr Pattou, il faut déjà trouver un modèle économique pour améliorer le suivi de la chirurgie. Une très bonne piste pour le parcours de soin serait un forfait de suivi sur 5 ans comme celui proposé aux Pays-Bas. »
Selon le Pr Francesco Rubino, qui occupe la chaire de chirurgie métabolique et bariatrique au King’s College, « La chirurgie ne doit pas être considérée comme un "traitement de masse" du diabète mais elle est largement sous employée à l’heure actuelle ».
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