EN OUVRANT la séance extérieure 2013 de l’Académie devant plus de 200 personnes, son président, le Pr François Richard, a planté le décor : « La GMCAO présente des possibilités importantes de développement médical, économique et industriel. J’apprécie particulièrement que cette nouvelle recherche en chirurgie se développe entre laboratoires, cliniciens et l’industrie. Grenoble est de toute évidence pionnière dans cette voie. C’est en toute logique que l’Académie, dont une des missions est de soutenir le progrès de la chirurgie, tient sa séance dans ce creuset d’innovation. » La journée co-organisée par ECCAMI, le Centre d’excellence qui fédère, depuis 2010, cliniciens, chercheurs et industriels de la GMCAO, et le LabEx CAMI, réunion de six* laboratoires qui ont transféré la GMCAO en clinique routinière, a été orchestrée par les Prs Philippe Cinquin et Jean-Jacques Rambeaud.
Vingt-cinq ans d’une innovation en marche
Jocelyne Troccaz, chercheur CNRS, une des pionnières de la GMCAO, a rappelé le contexte. La GMCAO naît dans les années 1980 pour donner au clinicien des outils pour mieux réaliser sa tâche. Depuis les premières interventions en neurochirurgie stéréotaxique, d’autres évolutions sont notables : automatisation, robots synergiques, petits robots spécifiques en contrepoint au Da Vinci, le guidage couplé à l’image et jusqu’aux technologies liées aux smartphones.
Au début, la cible est osseuse, en neurochirurgie ou orthopédie. À ce travail « facile » sur des structures rigides permettant une planification préopératoire, vont succéder des applications sur des tissus mous, où il faut en plus suivre et modéliser les déformations. La robotique se lie intimement au traitement des données, souvent issues de l’imagerie, à la modélisation, à l’informatique pure.
L’incontournable chirurgie
À Grenoble, la GMCAO a été appliquée à la chirurgie du rachis, et notamment pour la pose d’implants pédiculaires, puis du bassin. Les problèmes liés à l’intervention ont diminué depuis 1995, selon le Pr Philippe Merloz, de 12 % à 4 - 6 % grâce à la « navigation » chrirurgicale. La stabilisation du bassin a bénéficié de la fusion des images scanner et fluoroscopiques qui a permis un geste en percutané suivi en temps réel. La même technique est appliquée par le Pr Saragaglia à la chirurgie du genou avec des gains en temps et en qualité (prothèse et ostéotomie tibiale).
Pionnière, la neurochirurgie, continue à s’améliorer. Le Pr François Berger a décrit un outil miniaturisé multimodal devant permettre la première biopsie de cerveau en temps réel. Un essai clinique dans le glioblastome avec Clinatec et l’Hôpital St Anne Henri Mondor doit démarrer prochainement.
Urologie : à l’honneur
La GMCAO a connu « une conjonction très favorable » en urologie, a confié Jocelyne Troccaz : « Il y avait des vrais besoins et les réponses scientifiques, rapidement développées, ont trouvé toute leur place. »
Ces travaux ont débuté en 1991 en radiothérapie, puis en imagerie, pour aboutir à des moyens d’action aidés pour la biopsie, la curiethérapie, la prostatectomie et même à la conception d’un sphincter urinaire artificielle décrit par le Pr Pierre Mozer de la Pitié Salpêtrière.
Le Pr Jean-Luc Descotes a détaillé la curiethérapie prostatique focale robotisée, une innovation visant à diminuer la morbidité grâce à l’automatisation de la pose des implants radioactifs. Le dispositif à 7 degrés de mobilité, en phase de tests, repose sur la fusion avec des images échographiques et IRM, facilitera peut-être demain traitements par cryothérapie, laser, ultrasons...
Une multitude de finalités...
Le Pr Ivan Bricault a décrit une application en radiologie interventionnelle naviguée qui a donné lieu à une station de contrôle du geste en temps réel et à la création de l’entreprise Imactis.
Autre objectif pour la GMCAO : protéger l’opérateur, le patient, ou les deux. C’est ce que permet le robot de ponction, conçu en 2005 et aujourd’hui en phase de validation clinique au CIC-IT* de Grenoble, qui se positionne et s’oriente sur le patient. C’est également le cas d’une application vasculaire pour l’imagerie per-op en chirurgie de l’anévrisme conçue par le Dr Albéric de Lambert et les Pr Jean-Luc Magne et Carmine Cessa. Afin d’éviter des produits de contraste néphrotoxiques, elle recourt à une sonde localisée de façon magnétique et séduit par sa précision, sa stabilité et sa compatibilité avec les procédures.
Des vidéo-transmissions avec les blocs du CHU de Grenoble, le LIRMM, laboratoire à Montpellier et à l’Institut Mutualiste Montsouris (Paris) ont complété ce tour d’horizon par des exemples concrets. Et le public a pu, lors d’un show-room, voir et tester les appareillages de GMCAO. « Dans le marasme actuel, ces présentations qui nous projettent dans le futur de la médecine sont une source d’espoir », s’est félicité le président de l’Académie, le Pr Richard.
* Brest, Grenoble, Montpellier, Paris, Rennes et Strasbourg
** Centre d’Investigation Clinique – Innovation Technologique
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