La chirurgie orthopédique est une vieille dame qui ne cesse de se réinventer. Après avoir fêté ses 100 ans l'an dernier, la Société française de chirurgie orthopédique et traumatologique (SOFCOT) se tourne vers l'avenir et aborde depuis hier au palais des congrès de Paris (et jusqu'à demain) les nouveaux sujets qui comptent pour la discipline.
À commencer par l'application depuis la rentrée du décret « anti-hospitalité » issu de la loi de santé. Ce texte interdit à l’industrie pharmaceutique de participer aux frais « d'hospitalité » des étudiants et internes lors de congrès ou colloques scientifiques (nuits d'hôtel, repas, déplacements). Cette nouvelle règle déplaît aux chirurgiens orthopédiques. La pose de dispositifs médicaux comme les prothèses, financées en partie par les industriels, fait partie intégrante de leur formation. « On ne sait pas comment faire. La SOFCOT nous a aidés cette année mais ce n'est pas une solution pérenne », indique le Dr Pierre Martz, assistant chef de clinique au CHU de Dijon et membre du collège des jeunes orthopédistes.
La société savante a déjà déboursé 90 000 euros pour pallier le retrait des industriels. « Il va falloir trouver une autre solution, explique le Pr Hervé Thomazeau, chirurgien à Rennes et président du collège de la SOFCOT. La collaboration avec les industriels est indispensable dès lors qu'il y a des dispositifs médicaux. Les universités n'ont pas les moyens de financer ces derniers ! » Des réunions sont en cours avec les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur pour trouver un éventuel régime dérogatoire, précise le médecin.
Autre sujet d'importance pour la profession : le développement de l'activité en ambulatoire (sans nuitée). « La tutelle y voit une économie financière pure et dure, alors que nous voulons surtout de la qualité », résume le Pr Christophe Hulet, chef de service au CHU de Caen. Un acte de chirurgie orthopédique sur deux est actuellement réalisé en ambulatoire (l'objectif fixé par le ministère étant de 70 %, toutes chirurgies confondues). Les ligaments croisés du sportif sont opérés à 60 % en ambulatoire, mais les actes plus fréquents comme la pose de prothèses de hanche (120 000 par an) ou de genou ne sont qu'à 2 % ou 3 %. « Les volumes de patients augmentent cependant de façon considérable. De 800 patients opérés en ambulatoire l'an dernier, nous sommes passés à 2 200 cette année », précise le Pr Hulet. Forte de ces bons résultats, la discipline demande qu'une partie des moyens économisés grâce à l'ambulatoire – et la réduction des durées moyennes de séjour – soient redistribués aux équipes.
Féminisation… à petits pas
Ces bouleversements organisationnels peuvent cependant générer une course à l'acte et à l'activité, et donc du stress pour le chirurgien et son équipe. La profession souhaite donc s'investir dans la prévention du burn-out. « 30 à 40 % des chirurgiens orthopédistes sont touchés par l'un des trois aspects du burn-out : l'épuisement émotionnel, la dépersonnalisation et la perte du plaisir d'exercer, estime le Dr Vincent Travers, praticien à la clinique Saint Charles (Lyon) qui a planché sur le sujet. Plus de contraintes dans le métier, plus d'exigences du patient et moins de valorisation peuvent y conduire. » Pour faire prendre conscience aux chirurgiens de ce risque, trois conférences abordent le sujet lors du congrès.
La féminisation de la discipline est également un aspect dont la SOFCOT tient compte. Si actuellement 5 % des chirurgiens orthopédiques sont des femmes, cette proportion passe à 12,5 % chez les moins de 40 ans et 20 % chez les internes en formation. Le Dr Pomme Jouffroy, chef de service à l'hôpital Saint-Joseph (Paris), fait office de pionnière. « J'ai commencé mon internat en 1982 et j'étais la première interne de tous mes patrons, raconte-t-elle. J'ai entendu beaucoup d'énormités machistes pendant ma carrière, mais j'ai été très bien formée, mes chefs m'ont fait toujours fait confiance. » Et d'insister sur l'importance du compagnonnage, également facteur de prévention du burn-out pour les jeunes internes.
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