Un groupe de travail d’experts s’est réuni à plusieurs reprises pour élaborer les recommandations pour la pratique clinique du collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) de 2022 sur la césarienne. Le but de ce travail était de déterminer les procédures chirurgicales, mais aussi médicamenteuses et environnementales permettant de réduire la morbidité maternelle lors de la réalisation d’une césarienne.
Les experts ont élaboré les recommandations selon la méthodologie Grade (1), avec des questions formulées sous le format Pico (Patients, Intervention, Comparison, Outcome) et des critères de jugement définis a priori et classifiés selon leur importance. Cette méthode permet, après une analyse quantitative de la littérature, de déterminer séparément la qualité des preuves (élevée, modérée, basse, très basse) et de formuler, lorsque cela est possible, une recommandation forte ou faible. Deux tours de relectures après sollicitations de relecteurs extérieurs ont permis de conserver les recommandations pour lesquelles un consensus était atteint.
Un total de 27 questions, concernant la prévention de l’hypothermie, des nausées et vomissements per- et postopératoires, l’antibioprophylaxie, la désinfection préopératoire, l’installation préopératoire et l’abord chirurgical, les modalités de réalisation de l’hystérotomie, l’administration prophylactique d’oxytociques et le mode de délivrance, les modalités de réalisation de l’hystérorraphie, la fermeture péritonéale et la fermeture cutanée et sous-cutanée ont été retenues.
Les recommandations retenues
Les recommandations émises à l’issue des tables rondes d’experts ayant abouti à un accord consensuel avec les relecteurs étaient les suivantes :
• Il est recommandé de réaliser une prévention de l’hypothermie par le réchauffement de la patiente à l’aide d’air chauffé pulsé (couverture ou matelas) ou de solutés chauffés, pour réduire la perte de température maternelle, le taux d’hypothermie liée à l’anesthésie, augmenter la satisfaction et le confort maternel (recommandation faible) ; et réduire la baisse de température du nouveau-né et l’hypothermie néonatale (recommandation forte).
• Il est recommandé d’administrer un antiémétique après le clampage du cordon de l’enfant chez les femmes ayant une césarienne programmée sous anesthésie locorégionale pour diminuer l’incidence des nausées et des vomissements per et postopératoires (recommandation forte).
• Il est recommandé d’administrer une antibioprophylaxie pour réduire la morbidité maternelle infectieuse (abcès de paroi et endométrite) (recommandation forte).
• Il est recommandé de réaliser la technique de Misgav-Ladach ou ses apparentées plutôt que la technique de Pfannenstiel pour réduire la morbidité maternelle (durée opératoire, fièvre et douleurs postopératoires) (recommandation faible).
• Il est recommandé de ne pas réaliser de décollement vésical systématique avant hystérotomie (recommandation faible), d’étendre l’hystérotomie aux doigts comparativement aux ciseaux (recommandation faible) et de façon craniocaudale comparativement au sens transversal (recommandation faible) pour diminuer la morbidité maternelle.
• Il est recommandé de ne pas réaliser de délivrance manuelle systématique du placenta en cas de césarienne en comparaison à la délivrance spontanée ou à une traction contrôlée du cordon (recommandation faible).
• Il est recommandé de ne pas fermer systématiquement le péritoine viscéral ou pariétal (recommandation faible).
Les questions en suspens
Les données de la littérature, soit parce que de trop faible niveau de preuve, soit parce que trop discordantes, n’ont pas permis de statuer s’il était pertinent ou non de recommander une attitude plutôt qu’une autre laissant ainsi le choix aux équipes concernant les questions suivantes :
• Le choix entre l’administration préventive d’un ou de deux antiémétiques afin de diminuer les vomissements et/ou les nausées per et post-opératoires.
• Le choix d’une céphalosporine ou d’une pénicilline pour diminuer la morbidité maternelle infectieuse.
• L’administration d’une bithérapie incluant l’azithromycine pour les femmes ayant une césarienne en cours de travail.
• Le moment d’administration de l’antibioprophylaxie : avant l’incision ou après le clampage du cordon.
• La désinfection cutanée abdominale préopératoire à l’aide d’un désinfectant cutané alcoolique par rapport à un désinfectant sans alcool.
• La désinfection cutanée abdominale préopératoire à l’aide d’un désinfectant cutané iodé par rapport à un désinfectant non iodé.
• La pertinence de réaliser une désinfection vaginale préopératoire chez les femmes ayant une césarienne, que les membranes soient rompues ou non.
• Le choix entre l’absence de sondage per opératoire précédé d’une miction une heure avant la césarienne et la mise en place d’une sonde vésicale peropératoire.
• Le choix d’utiliser la carbétocine plutôt que l’ocytocine après clampage du cordon pour diminuer significativement l’incidence des pertes sanguines supérieures à 1 000 ml, d’une anémie ou de la transfusion sanguine.
• La réalisation d’une suture en deux plans plutôt qu’en un plan de l’utérus.
• L’extériorisation ou non de l’utérus lors de sa suture.
• L’abord extra plutôt qu’intrapéritonéal.
• La fermeture systématique du plan sous cutané.
• La pertinence d’une fermeture systématique du plan sous-cutané chez les patientes obèses ou en surpoids.
• La pertinence d’un surjet intradermique chez les patientes obèses afin de diminuer les complications de paroi.
En outre, il n’a pas été possible d’aboutir à un consensus entre les experts du groupe du travail et les relecteurs concernant la réalisation d’un surjet intradermique plutôt qu’une fermeture cutanée par agrafes afin de diminuer les complications de paroi, essentiellement la survenue d’une désunion de cicatrice.
* Service de gynécologie-obstétrique, CHU de Bordeaux ** Experts du groupe de travail : Hanane Bouchghoul (CHU de Bordeaux), Florent Fuchs (CHU de Montpellier), Charles Garabédian (CHU de Lille), François Goffinet (Maternité Port-Royal APHP), Diane Korb (Robert-Debré APHP), Hugo Madar (CHU de Bordeaux), Karine Nouette-Gaulain (CHU de Bordeaux), Nicolas Sananès (CHU de Strasbourg), Thomas Schmitz (Robert-Debré APHP), Loïc Sentilhes (CHU de Bordeaux), Marie-Victoire Sénat (Le Kremlin Bicêtre APHP), Jeanne Sibiude (Louis Mourier APHP) (1) Atkins D, Best D, Briss PA, Eccles M, Falck-Ytter Y, Flottorp S, et al. Grading quality of evidence and strength of recommendations. BMJ 2004;328:1490
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024