Le 18 décembre 2013, la bioprothèse CARMAT, cœur artificiel total, après vingt ans d’un développement médico-technologique acharné, est implantée dans le plus grand secret sur un patient de 75 ans en insuffisance cardiaque terminale, à l’Hôpital européen Georges Pompidou à Paris.
Une fuite déclenchera deux jours plus tard une hypermédiatisation tant en France qu’à l’étranger. Le président François Hollande salue « une prouesse médicale » et « une action exceptionnelle au service du progrès humain ». Une prouesse qualifiée de première mondiale, réalisée par le consortium français CARMAT, né en 2008 de l’association de la Fondation Carpentier avec la société Matra Défense (filiale d’EADS) et le fonds d’investissement Truffle Capital. Devant les perspectives financières considérables, Oseo (BPI France Financement) apporte un soutien public sans précédent, à hauteur de 33 millions d’euros au titre de l’aide à l’innovation, soutenant un projet totalement français né de la rencontre du Pr Alain Carpentier et de l’industriel Jean-Luc Lagardère. Près de 100 000 malades en Europe et aux États-Unis sont concernés par cette prothèse, assure le Dr Philippe Pouletty, cofondateur de Carmat. Dès lors, l’enthousiasme des médias est général.
Zones d’ombre et interrogations
Après le décès du premier patient implanté, qui a vécu 74 jours avec son cœur CARMAT, des zones d’ombre commencent à soulever des interrogations. Le patient avait subi plusieurs interventions après l’implantation, révèle sa famille, sans qu’aucune information ne soit publiée par HEGP. Aucune précision n’est délivrée par CARMAT sur la suite des essais cliniques, pas davantage que sur les conclusions des deux commissions chargées d’expertiser les causes du décès du patient. L’ANSM se retranche devant les clauses de confidentialité qui la lient au promoteur pour ne pas s’exprimer sur les essais. L’AP-HP n’est pas en mesure de communiquer sur le CCP (comité de protection des personnes) qui a donné son feu vert au sujet des questions éthiques relatives aux expérimentations. Certains spécialistes, tel le Pr Daniel Loisance (ex-chef du service de chirurgie cardiaque d’Henri Mondor) estiment que « le cœur artificiel n’est pas une priorité médicale » et déplorent « le plus grand secret » qui entoure le cœur CARMAT, avec une seule publication scientifique à l’appui (dans « European Journal Cardio-thoracic Surgery », en 2012). Diverses questions sont posées sur le poids de la bioprothèse (900 g, contre 300 pour un cœur organique), ainsi que sur son prix (autour de 160 000 euros).
C’est sur ces différents points que le Pr Alain Carpentier intervient aujourd’hui dans les colonnes du « Quotidien », reconnaissant que « l’extrême médiatisation est contre-productive ». Et que son travail impose « silence et réflexion ».
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