C’EST SUR le modèle de la journée nationale de dépistage de l’artérite des membres inférieurs, à l’initiative de la Société française de médecine vasculaire (SFMV), qu’une équipe médico-chirurgicale (1) de l’Hôpital Edouard Herriot de Lyon a lancé un dépistage gratuit de l’anévrisme de l’aorte abdominale (AAA). « Notre but, indique le Pr Patrick Lermusiaux, chirurgien vasculaire, est de relancer le débat sur le dépistage ». En effet, 6 000 personnes décèdent chaque année de cette pathologie, « soit un chiffre supérieur aux morts sur la route » tient à préciser ce chirurgien.
Un groupe de travail avait été créé sur le sujet par la Haute Autorité de Santé (HAS) en 2007, mais ses travaux n’ont pas abouti. De multiples études confirment pourtant l’existence d’un bénéfice du dépistage systématique par échographie. C’est le cas de l’étude MASS (Multicenter Aneurysm Screening Study), dont les derniers résultats, assortis d’un recul de 10 ans, ont été publiés en 2009 (2). Plusieurs organismes publics, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis, ont donc proposé des lignes directrices de dépistage, pour les hommes de plus de 65 ans.
Qu’un examen simple permettrait d’éviter.
L’AAA, fortement associé au tabagisme, se traduit par une dilatation permanente et localisée de l’aorte d’un diamètre excédant 3 cm. Il résulte d’une expansion continue, souvent irrégulière et imprévisible, qui peut présenter, à partir d’un diamètre de 5 cm, un risque élevé de rupture pouvant entraîner le décès. « Pour nous, explique ainsi le Pr Lermusiaux, c’est épuisant et déprimant d’opérer des anévrismes rompus, car nous mobilisons des hélicoptères, de la transfusion massive, de la réanimation, tout cela pour arriver in fine au décès du patient 8 fois sur 10, alors qu’un examen simple, sensible, spécifique et peu coûteux permettrait d’éviter cela ». En effet, cet anévrisme peut parfois être décelé à l’examen physique, mais la méthode diagnostique recommandée reste l’échographie abdominale, localisée à l’aorte.
Si après dépistage, la prise en charge d’un anévrisme de grande taille, supérieur à 5,5 cm, est chirurgicale et, ce, sans controverse, celle des anévrismes de petite taille, entre 3 et 5,5 fait encore l’objet de quelques discussions. En France, la SMFV a cependant pris l’option de suivre le patient dès qu’un anévrisme de 3 cm est découvert. Elle émet des recommandations précises de suivi : pour un anévrisme à 4,5 cm, par exemple, « il faut une surveillance 3 fois dans l’année » précise le Pr Lermusiaux.
Un dépistage systématique viserait essentiellement les hommes. De fait, l’AAA est de 3 à 11 fois plus fréquent chez eux que chez les femmes, pour lesquelles le dépistage ne serait pas « rentable », d’un point de vue médico-économique. Mais, la donne pourrait encore changer en raison de la montée en puissance du tabagisme chez ces dernières.
(1) Prs Patrick Feugier et Patrick Lermusiaux, Service de Chirurgie vasculaire, Pr Jean Ninet et Dr Pascal Bureau du colombier, responsables des Explorations Fonctionnelles Vasculaires à l’Hôpital Edouard Herriot.
(2) BMJ juin 2009 ; 338 : b2307 S G Thompson http://www.bmj.com/content/338/bmj.b2307.abstract.
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