Prise en charge de l’AVC ischémique

Dater le début des troubles, c’est aujourd’hui possible

Publié le 16/10/2014
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Crédit photo : PHANIE

Tout va très vite en neuroradiologie. De la recherche à l’application, les développements sont extrêmement rapides, avec une place centrale de l’IRM. Le rôle du neuroradiologue est aujourd’hui au centre de la prise en charge de l’Accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique à la phase aiguë, pendant laquelle le patient peut bénéficier d’un éventuel traitement, la fibrinolyse. Le bénéfice attendu de ce traitement d’urgence est la reperfusion tissulaire, avec amélioration du pronostic fonctionnel et vital mais au prix d’un risque d’hémorragies, rares mais redoutables. « Le rôle du clinicien, souligne la Dr Myriam Edjlali-Goujon, est de suspecter un AVC ischémique aigu. Celui du radiologue est d’affirmer le diagnostic, d’écarter une contre-indication à la fibrinolyse, notamment un saignement intracrânien. C’est possible aujourd’hui grâce à l’IRM ».

Time is brain

La fibrinolyse est indiquée quand le début de l’AVC date de moins de 4 heures 30 (1). Après ce délai, la balance bénéfice/risque n’est plus en faveur du traitement. La lésion ischémique est en grande partie constituée, le risque de transformation hémorragique augmente.

Si le début des troubles peut être daté –le plus souvent par un proche du patient qui relate des troubles neurologiques brutaux (aphasie, hémiplégie…)– la moitié des AVC ischémiques se produisent la nuit et les signes déficitaires sont alors observés au réveil, sans notion d’horaire. « Sans l’IRM, insiste la Dr Edjlali-Goujon, on ne pourrait pas proposer de traitement à ces patients. C’est la séquence de diffusion et le Flair FLuid attenuated inversion recovery (Flair), séquence T2 avec inversion récupération et annulation du signal de l’eau, qui vont permettre de dater l’ischémie. Si on visualise l’AVC ischémique en séquence de diffusion mais pas en séquence Flair, on est sous la barre des 4 heures 30, le patient peut donc bénéficier d’une fibrinolyse ».

Pour tous les patients présentant une suspicion d’AVC ischémique, le protocole est le suivant: séquence de diffusion, Flair, T2*, angiographie pour visualiser le polygone de Willis et séquence de perfusion, le tout devant être réalisé en 10 minutes. « C’est une course contre la montre,insiste la Dr Edjlali-Goujon. Une minute de moins avant de lancer la fibrinolyse, ce sont 2 jours de gagnés sans handicap pour le patient (2) ».

Évidemment, la prise en charge d’un patient présentant un AVC ischémique aigu implique une concertation entre le radiologue qui pose le diagnostic de certitude –idéalement sur IRM– le neurologue qui lance la fibrinolyse et le radiologue interventionnel qui, sur certaines indications, extirpe le caillot par voie intra-artérielle. « Plus un patient est proche d’une Unité neurovasculaire (UNV) équipée d’une IRM ouverte 24 heures/24, plus ses chances de recevoir une fibrinolyse en cas d’AVC aigu est importante, et donc ses chances de survie et de moindre handicap, indique la Dr Edjlali-Goujon. Optimiser les délais de prise en charge quelle que soit la localisation du patient doit faire partie des priorités de santé publique et représente un vrai challenge pour les années à venir ».

Autre point essentiel qui conforte l’intérêt de l’IRM : affirmer de façon certaine le diagnostic. Un AVC ischémique très récent ne se voit pas au scanner. Il existe 14% de pathologies qui miment un AVC ischémique, difficilement diagnostiquables au scanner et qui risqueraient d’être thrombolysées à tort (3). Par exemple, une tumeur gliale ou encore un déficit post-critique après une crise épileptique convulsive.

Entretien avec la Dr Myriam Edjlali-Goujon service de neuroradiologie, centre hospitalier Sainte-Anne.

(1) Petkova M et al. Radiology. 2010 Dec;257(3):782-92

(2) Meretoja A et al. Stroke. 2014 Apr;45(4):1053-8

(3) Chernyshev OY et al. Neurology. Apr 27, 2010;74(17):1340-45

Dr Brigitte Martin
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Source : Bilan spécialistes