L’Institut national du cancer (INCa) vient de publier le dernier rapport annuel du 3e Plan cancer 2014-2019. En attendant un bilan complet de ces 6 ans qui devrait être présenté à la rentrée de septembre, Thierry Breton, directeur général de l'INCa, en dresse un premier tableau et évoque la consultation citoyenne prévue en septembre dans le cadre de la stratégie décennale de lutte contre le cancer 2021-2031 qui doit succéder aux différents Plans cancer.
LE QUOTIDIEN : Quels sont plus grands succès de ce 3e Plan cancer ?
Thierry Breton : Le niveau de réalisation des objectifs fixés est de 90 % parmi les 1 200 jalons du Plan, c'est considérable. C'est le fruit du travail collectif mené par l'INCa et de tous ses partenaires. Avec ce 3e Plan, nous avons pu constater un véritable élan national.
En six ans, il y a eu de nombreuses avancées de différentes natures. Certaines sont emblématiques, comme le droit à l'oubli qui a été mis en place en 2016 afin de permettre à d'anciens patients d'avoir de nouveau des projets comme tout un chacun.
Citons aussi la mise en place du programme de dépistage organisé du cancer du col de l'utérus et l'amélioration du lien entre les équipes de santé et le patient, patient qui est devenu une partie importante de ce qu'on appelle l'alliance thérapeutique.
Le Plan a également contribué à la mise à disposition d’innovations telles que les CAR-T cells et a permis l'amélioration de la prise en charge des patients concernant notamment les prothèses capillaires. Un accompagnement financier est aussi prévu dans le cadre du parcours de soins global après le traitement aigu d’un cancer.
Des actions fortes en matière de recherche et d'organisation de la prise en charge ont été engagées dans le domaine des cancers pédiatriques.
En matière d'essais cliniques évaluant les traitements anticancéreux, le nombre d'inclusions a doublé. C'est une chance pour la recherche et les patients. Ces dernières années, 16 centres d’essais cliniques précoces ont été labellisés, dont sept sont spécialisés pour les enfants.
Un certain nombre de documents ont par ailleurs été mis à la disposition des médecins pour les accompagner dans l'exercice de leur métier, tels que des recommandations de bonnes pratiques et des fiches de bon usage du médicament.
Quels sont au contraire les axes à améliorer ?
Nous en avons identifié trois pour lesquelles les avancées ont été réelles mais encore loin d'être suffisantes.
Le premier porte sur la promotion de la santé et de la prévention alors que 40 % des cancers sont évitables. Le facteur de risque prédominant étant le tabagisme qui représente 45 000 décès par cancer par an. Nous avons enregistré une baisse de 1,6 million de fumeurs en 2 ans, mais le tableau reste très négatif. Le tabac reste donc une priorité absolue en termes de prévention.
Le deuxième axe concerne la limitation des séquelles. Si les traitements ont beaucoup progressé et que l'on observe globalement une amélioration de la survie nette à 5 ans sur la quasi totalité des localisations, la complexification des traitements et leur chronicisation entraînent un niveau de séquelles important. Cinq ans après un diagnostic de cancer, environ deux tiers des malades ou anciens malades ont des séquelles, comme des douleurs ou de la fatigue. La façon dont nous abordons ces séquelles aujourd'hui n'est pas suffisante, nous devons nous en saisir de manière plus forte.
La lutte contre les cancers de mauvais pronostic, comme les cancers du poumon, les cancers du pancréas et les cancers du sein triple négatif, constitue le troisième axe, avec des questions d'organisation de parcours et de recherche. Nous devons améliorer la compréhension de la genèse de la maladie et de son histoire naturelle, en particulier pour ces cancers, pour mieux la caractériser. Nous avons dans ce cadre lié un partenariat avec des collègues américains du National Cancer Institute (NCI) pour travailler sur les pré-néoplasies.
C'est autour de ces trois axes que va s'articuler la stratégie décennale 2021-2031.
Pourquoi passer d'un Plan sur 6 ans à une stratégie sur 10 ans ? Quelles sont les échéances de cette stratégie ?
Il nous a semblé qu'une durée 6 ans était en réalité un peu courte par rapport à la difficulté des défis à relever. Un horizon de 10 ans permet de fixer des objectifs plus ambitieux, à condition bien sûr que l'on puisse adapter et actualiser cette stratégie si nécessaire.
À partir des trois axes prioritaires identifiés, nous sommes en train d'établir une proposition avec des actions fortes. Un temps de consultation des Français est prévu en septembre via une plateforme dédiée qui sera mise en ligne sur le site de l'INCa et qui permettra à tous les citoyens de commenter les actions proposées et d'exprimer leurs besoins. Cette stratégie doit être le fruit d'un choix collectif. L'adhésion des Français est importante, alors qu'un sondage de l'INCa a montré que 76 % des Français déclarent qu’ils feront plus attention à leur santé suite à la crise du Covid-19.
La stratégie sera ensuite fixée par un décret début 2021.
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