Avec la création d’un bâtiment destiné à rassembler l’ensemble des équipes de médecins et de chercheurs actuellement répartis sur les sites de Paris et Orsay, le centre Siredo* de l’Institut Curie entend poursuivre la dynamique (pluridisciplinaire) engagée en faveur de l’amélioration des taux de survie des cancers pédiatriques et de la réduction des séquelles des traitements.
Le projet qui doit aboutir en 2024 doit permettre d’« accélérer les échanges entre recherche et pratiques cliniques » dans un « continuum de la recherche à la prise en charge médicale, mais aussi sociale et psychologique », expliquait le Dr Olivier Delattre, directeur de Siredo, à l’occasion d’un point presse pour le lancement de « Septembre en Or », le mois de sensibilisation aux cancers pédiatriques.
Raccourcir les délais entre recherche et applications cliniques
Selon lui, plusieurs évolutions récentes permettent une accélération de la mise à disposition des applications de la recherche. Alors que 12 ans se sont écoulés entre la découverte en 2008 d’une mutation du gène ALK impliquée dans le neuroblastome (troisième cancer pédiatrique le plus fréquent) et l’introduction des inhibiteurs de l'ALK dans les paramètres à prendre en compte dès le diagnostic, le directeur de Siredo estime que la période est propice à une réduction des délais entre la recherche et ses applications cliniques.
Le contexte apparaît plus favorable avec un développement des connaissances arrivant à « maturité pour des applications cliniques », mais aussi par une mobilisation des industriels. Ces derniers, qui ne « s’intéressaient pas » à l’oncologie pédiatrique, intègrent désormais un « aspect pédiatrique dans leurs projets » de recherche, observe-t-il, insistant sur les progrès récemment réalisés.
Pour les 2 500 cas de cancers de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte (jusqu’à 25 ans) diagnostiqués chaque année en France, la survie moyenne (à 5 ans) est désormais « supérieure à 80 % grâce à la triade "chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie" », indique le Dr Delattre, rappelant néanmoins qu’« un bon nombre garde des séquelles à vie et environ 20 % ne guérissent pas ».
Améliorer la survie, mais aussi réduire les séquelles
L’amélioration de la survie reste ainsi un enjeu majeur de la recherche. Dans le cas du médulloblastome, tumeur cérébrale la plus répandue chez les enfants avec environ 120 à 130 cas par an en France (avec un pic d’incidence entre 2 et 7 ans), le taux de survie à 5 ans n’était que de 5 à 8 % dans les années 1960. « Il est actuellement à 80 % », se félicite le chimiste Olivier Ayrault, directeur de recherche au CNRS et chef de l’équipe Signalisation, développement et tumeurs cérébrales à l’Institut Curie. Les années 2000 et les travaux sur l’ARNm ont constitué un « tournant », selon lui, avec la stratification en quatre sous-groupes de ce cancer, permettant des traitements plus ciblés et débouchant sur des pronostics variables, de 100 % de survie pour l’un à 50 ou 60 % pour un autre.
Un autre enjeu de la recherche porte sur la réduction de la toxicité des traitements, notamment des rayons chez les jeunes enfants atteints de tumeurs cérébrales qui ont un risque de séquelles. « La protonthérapie permet d’administrer des traitements plus ciblés et d’épargner les parties du cerveau non touchées par les tumeurs », explique le Dr Franck Bourdeaut, pédiatre et chef d’équipe au laboratoire Recherche translationnelle en oncologie pédiatrique à l’Institut Curie. Autre piste, l’identification de biomarqueurs pourrait permettre de prédire la sensibilité aux traitements et d’en réduire l’intensité.
Un travail sur l’adaptation des doses est également mené. Il « commence par la taille des cachets [conçus pour des patients adultes, N.D.L.R.], mais il faut aussi identifier des cibles spécifiques qui ne sont pas toujours les mêmes que chez les adultes », souligne le pédiatre. La difficulté reste d’attirer les industriels sur des pathologies qui restent marginales, alors que les cancers pédiatriques ne représentent que 1 % des cancers en France. Les collaborations internationales apparaissent ainsi nécessaires : « elles permettent une caractérisation plus fine, mais aussi d’augmenter la taille des échantillons de malades », poursuit le Dr Bourdeaut, citant le cas du médulloblastome pour lequel 7 années ont été nécessaires pour recruter les 80 jeunes patients atteints d’une forme spécifique de ce cancer.
* Soins, Innovation, Recherche, en oncologie de l’Enfant, l’aDOlescent et de l’adulte jeune
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